Qu'est-ce qui peut être encore fabriqué en Algérie qui ne soit pas menacé dans les années qui viennent par son équivalent chinois ? Le tapis de la vallée du M'zab sans doute et le burnous des Aït Hichem, mais ce n'est pas très sûr pour ce dernier. Cette boutade est effrayante de réalisme. Un mois après l'ouverture du marché algérien à des produits européens libres de douanes, on parle partout... des produits chinois. Les chiffres du commerce extérieur des neuf premiers mois de l'année le montreront certainement, le made in China poursuit sa montée en puissance dans le marché algérien. Les cadeaux de mariage de l'été ont été offerts par les fabriques du Yunan, la rentrée scolaire a été assurée par les ateliers de Shenzhen, les habits de l'Aïd le seront par les filatures de Shanghai. Ou l'inverse. Peu importe. Le container qui vient de Chine est très inventif en produits nouveaux. Et personne en Algérie ne se sent plus à l'abri derrière les mers et les océans. Quelle est la solution ? Réduire ses coûts de production en engageant des expatriés... chinois. Plus sérieusement, les parades paraissent courtes. Faire dans le produit de qualité ? La belle chemise Redman elle-même n'a pas survécu. Elle est en cessation d'activité depuis trois mois. Utiliser les avantages de matières premières ? La belle faïence dure que donnent les superbes argiles du pays ne résistent pas devant l'assiette à 20 dinars des Chinois. La décalcomanie peut toujours s'effacer au bout d'un mois, le bord se fissurer au premier passage dans le micro-onde : la dictature du premier prix est ainsi faite, on achètera donc d'abord chinois. Et tant pis pour « mantouj bladi ». Heureux encore que les Algériens préfèrent la baguette de pain du matin. La situation est sérieuse, mais pas sans issue. Il est déjà possible de s'accrocher à « l'espoir » d'un important renchérissement des coûts de transports maritimes et aériens consécutifs à l'envolée du prix du baril. Tous les produits made in China ne demeureraient pas compétitifs après 10 mille kilomètres de mer. La mondialisation ralentirait. Les produits locaux redresseraient la tête grâce à la proximité de leur premier marché. Mais tout de même, la liste des faillites pourraient s'allonger de beaucoup au tribunal de commerce avant que ce scénario - pas farfelu du tout - n'apporte de l'air à la production nationale. Il serait mieux venu pour les entreprises algériennes de faire face. Mais comment ? En disposant de la surface financière pour se retourner ou d'un contact abouti pour se marier à un partenaire technologique. De l'un et l'autre serait le mieux. Il faut pour cela souvent un coup de pouce des pouvoirs publics. Le ministère de l'Intérieur a donné du plan de charge à SNVI Rouiba en lui commandant des bus pour ses collectivités locales. Cela donnera du mou pour poursuivre la quête d'un partenaire dans le véhicule industriel. En France, Dominique de Villepin ne fait rien d'autre en cherchant, recapitalisation en bandoulière, à sauver la SNCM de la privatisation que son personnel refuse avec la force du désespoir. Il faut toujours un temps de latence pour savoir si la sentence de la concurrence est fatale. Des grossistes ont eu un retour d'écoute sur la mauvaise qualité de la vaisselle chinoise. Ils se sont retournés vers leurs fabricants nationaux. Ils étaient morts.