Depuis quelques jours, l'enclave de Melilla sort de sa quiétude insulaire légendaire pour offrir l'image d'une contrée assiégée et menacée dans sa stabilité. Cette ville qui fait office de porte d'entrée en Europe des immigrants clandestins en provenance des pays du Maghreb lesquels sont supplantés depuis ces dernières années par l'immigration sub saharienne enregistre quotidiennement des flux sans cesse croissants de candidats à l'immigration. Ces derniers tentent de passer de l'autre côté de la muraille érigée le long de la frontière pour gagner Melilla avant de continuer leur longue, dangereuse et incertaine odyssée dans un hypothétique espoir de gagner les villes du nord de l'Europe. Les scènes des embarcations de fortune ployant sous le poids des immigrés clandestins, qui finissent souvent dans les rets des gardes-frontières espagnoles et italiennes, quand elles ne sombrent pas avec leurs occupants au cours des traversées de tous les dangers, sont devenues monnaie courante. Tous les moyens sophistiqués de surveillance mis en place par les autorités espagnoles pour venir à bout de l'immigration clandestine se sont révélés inefficaces et inappropriés, car on a cherché à traiter les effets au lieu et place des causes qui ont généré ce phénomène. Au problème économique et social qui pousse tous ces naufragés du sous-développement et de la misère du continent africain à quitter leur pays et leurs êtres chers pour aspirer à un mieux-être ailleurs, les capitales occidentales opposent froidement un traitement politique et policier. C'est ce que viennent de faire les autorités de Madrid qui n'ont trouvé d'autre solution pour repousser les assauts des immigrants clandestins, qui tentent à l'aide d'échelles de fortune d'escalader le mur de l'espoir pour se rendre à Melilla, que d'ordonner de surélever de quelques mètres encore cette barrière. Des affrontements entre immigrés clandestins et gardes-frontières sont enregistrés quotidiennement. On déplore même des victimes dans les rangs des immigrés clandestins, et des ONG accusent ouvertement les autorités espagnoles et marocaines d'avoir fait usage de leurs armes. Au nom de la sécurité dans son acception la plus large, l'Europe ferme aujourd'hui ses frontières aux ressortissants de pays dont la main-d'œuvre était courtisée, choyée il n'y a pas longtemps, et dont les ressources nationales ont servi à bâtir la prospérité dans laquelle baignent aujourd'hui les pays européens. Au nom du douteux concept de préférence nationale au contenu franchement raciste, on se refuse aujourd'hui à « accueillir toute la misère du monde ». Et ce n'est certainement pas avec les fausses solutions de l'aide au retour à coups de quelques misérables dizaines d'euros ou de chimériques aides au développement que les pays nantis arriveront à juguler le phénomène de l'immigration clandestine.