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Un système de plus en plus contesté
Où en est l'activité bancaire en Algérie ?
Publié dans El Watan le 10 - 10 - 2005

Le système bancaire algérien est il réellement malade et s'il l'est, qu'est ce qu'on attend pour lui administrer les remèdes appropriés ? Cette question n'est sans doute pas la bonne question à poser en cette période d'intenses travaux de modernisation du système bancaire.
Il reste et c'est le moins que l'on puisse dire que même modernisé, le problème ne sera pas pour autant résolu pour la bonne et simple raison que l'effort à faire pour enregistrer des progrès est surtout à mener par la sphère réelle. Les pouvoirs publics ayant clairement manifesté leur volonté de conduire la modernisation à terme. Une brève présentation du système bancaire algérien nous éclairera davantage sur les conditions de son efficacité.
1- L'évolution du système bancaire algérien
Ce système qui a connu une rénovation profonde de ses structures à partir de 1990, est engagé depuis cette date dans une phase de mutations qui affectent aussi bien son organisation que l'activité des banques. La libéralisation de la sphère financière depuis 1995 a conduit à une ouverture réelle du système bancaire au privé national et étranger . La profession bancaire est ainsi entrée dans un processus de rationalisation de ses structures et de ses systèmes d'information. Les chantiers qui sont ouverts actuellement ( système de paiement de gros montant dit RTGS, système de paiement de masse pour les petits montants, monétique, etc.... ) en sont la preuve de ce remodelage du système bancaire. La masse critique en termes d'implantation des agences bancaires sur tout le territoire national n'est peut être pas encore atteinte pour parler d'une véritable bancarisation de la population. Le ratio reste faible, une agence pour 25000 habitants. Sur ce plan, il convient de souligner que le réseau des banques ne cesse de s'étendre et il faut compter avec l'ouverture de nouvelles banques pour voir peut être le nombre de guichets se multiplier pour pouvoir couvrir même les sites les plus reculés du pays. Deux traits principaux caractérisent l'organisation actuelle du système bancaire algérien : son développement et sa diversification. Le développement s'apprécie par le nombre total des banques et établissements financiers en activité, soit une trentaine d'établissements au total alors qu'en 1990, leur nombre ne dépassait pas cinq. A ces établissements, il faut ajouter les fonds et caisses de garantie qui sont en dehors de la loi bancaire mais qui concourent indirectement ou directement à l'activité en se portant garants des crédits accordés par les banques. Quant à la diversification du système bancaire, d'un point de vue fonctionnel, d'abord , on observe qu'il existe en Algérie à la fois des établissements à vocation universelle, telles que les grandes banques à réseau et des établissements à vocation particulière, spécialisés dans un certain type de produits et donc de clientèle (établissement de leasing, crédit hypothécaire, capital risque, crédit à la consommation...). Sur un plan économique, cette diversification à conduit le système bancaire à comprendre aussi bien des établissements de grande taille que des établissements de taille moyenne ou carrément de petite dimension. D'un point de vue juridique, le système bancaire algérien se caractérise par l'uniformité d'établissements dotés, tous du statut de Spa (société par actions), à l'exception de la CNMA, société à caractère mutuelle.
2- Les conditions d'efficacité du système bancaire algérien
Pour rentabiliser au mieux les chantiers de modernisation du système bancaire ouverts depuis deux années, il devient impératif de remodeler totalement la vision en cours actuellement qui consiste à donner les moyens sans exiger l'efficacité. Il est certain que pour se hisser au niveau souhaité et par les pouvoirs publics et les opérateurs, il convient de travailler dans les directions suivantes sans perdre de vue l'amélioration de la relation banque - entreprise .
1-La désintermédiation signifie qu'une plus grande partie de l'intermédiation bancaire s'effectuera par le biais du marché financier et non plus uniquement par le marché du crédit. Les processus d'ouverture et de libéralisation financière conduisent les banques à transférer les risques de crédit de leurs bilans vers le marché financier. Les banques algériennes seront confrontées si elles ne le sont pas déjà à cette situation. Cette nouvelle donne nécessite un cadrage législatif qui doit préparer le décloisonnement du marché des capitaux (titres de créances négociables à créer tels que l'émission par les banques de certificats de dépôts ou des billets de trésorerie par les entreprises) ainsi que la mise en œuvre rapide de l'instrumentation en cours d 'élaboration qui permettra aux banques d'effectuer les opérations de titrisation (sorties des créances du bilan pour alléger les fonds propres).
2- Quant à la concurrence, déjà présente timidement, elle va se renforcer avec l'accord d'association européen et l'adhésion imminente à l 'OMC. Le problème est de savoir quel chemin elle va emprunter , est ce que les banques étrangères qui s'implantent en Algérie vont favoriser le financement des entreprises étrangères ou exportatrices uniquement ou elles vont financer sans discrimination toutes les entreprises ? On sait que les opérations du commerce extérieur constituent pour l'instant l'essentiel des activités des banques installées. Est ce seulement pour le pactole des importations générées par les revenus tirés des exportations des hydrocarbures que les banques étrangères s'implantent chez nous ou pour accompagner réellement l'effort de développement du pays. Certaines parmi ces banques ont donné une première réponse positive puisqu'elles affirment accompagner les entreprises locales pour leurs besoins de financement. Cette donne permettrait si elle est généralisée de stimuler la concurrence pour arriver à une qualité de service dans tous les domaines de l'activité bancaire.
3- L'extension du champ d'action traditionnel signifie que les banques algériennes ne doivent plus se suffire uniquement des activités de crédit. Elles gagneraient à s'engager dans les opérations de placement, la gestion d'actifs, ce qui leur permettra de diversifier leurs sources de revenus et leurs risques. Plus encore et c'est là un des griefs parmi tant d'autres portés à l'encontre des banques, celui de l'absence de l'activité conseil. Un dossier d'investissement ou de financement mal présenté doit conduire la banque a conseiller son client ou l'investisseur à mieux reformuler sa demande au lieu de lui opposer une fin de non recevoir, ce qui arrive fréquemment.
4- La montée des risques (dégradation de la situation des entreprises, ...) étant un phénomène tout à fait normal dans une économie qui s'ouvre et qui se diversifie. Il devient urgent pour le système bancaire de baliser cette montée des risques par un renforcement du contrôle interne adossé à des méthodes d'évaluation de la rentabilité des opérations. Une bonne qualité d'appréciation des risques annihilera les risques de défaillance. Et c'est tout le problème de l'efficience de la réglementation et de la supervision bancaire. La valeur et le réalisation des collatéraux (garanties de crédit) , si elle est bien restituée par la réglementation prudentielle et gérée correctement par les banques de manière non laxiste allégerait certainement l'ardoise des fonds propres. Ces défis ainsi que éventuellement d'autres qui ne manqueront pas d'être lancés en fonction de la configuration ultérieure du système bancaire en termes de stratégie ne peuvent prendre la mesure que si la logistique bancaire se modernise. Principalement, cette modernisation doit viser les systèmes de paiements, les systèmes de gestion, le management et les innovations.
5- la modernisation des systèmes de paiements : Le problème de la réhabilitation des moyens de paiements (chèque, virement) et des instruments de crédits ( lettre de change, warrant ...) se pose avec acuité et conditionne la bancarisation de l'économie qui enregistre un déficit croissant dans les circuits de règlements. Il n y a point de bancarisation sans l'assurance d'être payé dans les délais les plus court et la manière la plus sécurisée. Le simple bon sens commande qu'avant de parler de système de paiement, il faudrait disposer de moyens de paiements. Il ne suffit pas d'avoir des textes qui traitent du chèque, du virement, de la carte bancaire, de la lettre de change ou encore du warrant pour dire que les transactions marchandes vont s'effectuer par l'entremise de ces instruments si l'organisation générale de l'économie ne favorise pas l'utilisation de ces moyens de paiements et de crédit. Il n'échappe à personne que là ou c'est possible et les possibilités dans ce domaine sont nombreuses, les règlements des transactions de quelque montant et nature que ce soient se font en liquides, c'est à dire en espèce et aucun opérateur ne s'en cache. Les causes sont connues et même si elles restent empiriques en raison de l'absence d'études sérieuses et fournies sur le sujet, il n'en demeure pas moins que la prolifération des chèques falsifiés, les longs délais de paiements, la hantise des contentieux en cas de défaut de provisions, la tombée en désuétude du virement, l'ignorance de la lettre de change et l'inutilité du warrant pour ne citer que ces instruments, constituent des arguments suffisants pour faire l'impasse sur ces modes de règlements. Et pourtant, on ne peut pas dire que les textes qui régissent l'utilisation de ces moyens de règlements, malgré quelques imperfections sont inapplicables. Ce sont à quelques nuances prés les mêmes règles qui sont en vigueur dans les économies développées. Que faire pour réhabiliter ces moyens de paiements et généraliser leur utilisation par tous les agents économiques ? La réponse est à la fois simple et complexe . Elle est simple dans la solution et complexe dans sa réalisation. Et c'est tout l'enjeu de ce défi, c'est de pouvoir offrir aux agents économiques un système de paiement moderne qui écourte les délais de traitement et sécurise l'utilisation des moyens de paiements. Les chantiers qui sont ouverts apporteront certainement une solution définitive à ce problème si la vision est globale, c'est à dire qu'elle va au delà des équipements et des logiciels à mettre en place pour le fonctionnement de ces systèmes et s'attaque aux problèmes de la bancarisation de la population et partant de l'économie dans son ensemble. Il ne sert à rien de disposer d'un système sophistiqué si la banque n'est pas présente partout. En Algérie, la densité est très faible : Un guichet pour 25000 habitants avec des inégalités dans les implantations d'une wilaya à une autre, à moins que les services financiers de la poste suppléent à ce vide en inversant la vapeur, mais la poste n'est pas encore la banque.
6- La modernisation des systèmes de gestion pour analyser, évaluer et réagir rapidement aux demandes des autorités et du public, Un progrès par rapport à la situation antérieure est enregistré mais il reste limité dans la mesure ou il ne procède pas d'une vision globale et unanimement partagée. Hormis la percée réussie dans les transferts transfrontaliers (réseau swift), il reste que le fonctionnement des banques n'est pas performant et c'est la qualité de service qui en pâtit. Les systèmes de gestion qui prennent en charge toute les activités de la banque et qui englobent le traitement des informations, les prestations de services, les obligations des banques en matière d'information et notamment la publication des informations financières les concernant ne sont pas suffisamment développés et orientés vers une meilleure transparence. La spécificité des banques a conduit les autorités monétaires à promulguer un plan de comptes bancaire moderne rendu obligatoire pour l'ensemble des établissements. Cette normalisation comptable offre aux banquiers un cadre adéquat pour analyser, évaluer et mesurer leurs performances. Comme il offre aux autorités et au public intéressé un instrument pour apprécier l'effort des banques en termes de résultats. Sur cette base, la logique voudrait que les banques adoptent sans délai ce cadre comptable qui s'inscrit parfaitement dans l'évolution internationale en matière d'informations financières, ce qui est loin d'être le cas.
7- La maîtrise des risques
Le risque de crédit, c'est à dire le risque de non remboursement constitue le principal aléa auquel sont exposés les banques en Algérie. Ce risque génère un état d'insolvabilité pour chaque établissement qui se traduit par une détérioration des fonds propres. La réglementation prudentielle tente de contenir ce risque en imposant un certain nombre de règles que les établissements doivent respecter. Mais elle reste insuffisante pour circonscrire toutes les situations auxquelles ils doivent faire face dans l'exercice de leur métier, d'ou la nécessité pour ces établissements d'introduire plus de rigueur dans l'évaluation et l'appréciation des concours qu'ils accordent aux opérateurs. Ceci doit naturellement se faire par la mise en œuvre de nouvelles méthodes d'approche et d'analyse et qui font appel à des compétences particulières, inexistantes pour l'instant sur le marché.
8- l'innovation par l'élargissement de la gamme des produits offerts aux fins de collecter plus d'épargne tout en améliorant les rendements et mobiliser ainsi plus de ressources pour les réinjecter dans l'économie. Une modernisation des techniques de crédit conforterait la clientèle des banques et permettrait de proposer de nouveaux produits pour répandre la culture de l'épargne et répondre ainsi à l'attente du public en créant de nouveaux moyens de collecte. L'étau actuel dans lequel les banques sont insérés fait que tous l'activité est orientée sur les opérations du commerce extérieur parce que moins risquées en raison de la solvabilité immédiate des opérateurs et juteux en raison de la masse des capitaux investis et des rémunérations procurées. Les incitations à l'épargne doivent s'accompagner de mesures fiscales suffisamment attractives pour permettre aux banques de vendre leurs produits dans les meilleures conditions. Il est certain que si l'effort est orienté vers les produits du banking islamique dont la gamme s'étend pratiquement à toute l'activité bancaire en partant du dépôt au project financing, l'activité bancaire prospérerait et permettrait de satisfaire les besoins de toute la clientèle, quant on sait qu'un grande banque comme la Citibank s'est incrusté dans ce créneau porteur pour sa clientèle du moyen orient en créant en 1996 sa propre filiale islamique à Bahreïn, on mesure tout le travail qui reste à accomplir pour hisser nos banques au niveau requis. 9 - Le management
Dans ce nouvel environnement marqué par le développement des marchés de capitaux, la modification des structures des bilans des banques et la montée des risques, le banquier doit connaître les mécanismes financiers de la banque, maîtriser les coûts générés par l'activité et gérer les risques par la mise en place et le suivi d'une politique appropriée de prévention.Il doit aussi connaître les marchés et produits actuels et futurs de la banque, déterminer la rentabilité des opérations et être capable de définir une stratégie globale de développement.


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