Pauvres. Des strates sociales vivent en Algérie au-dessous du seuil de pauvreté, complètement oubliées. Si la misère sociale n'a jamais quitté les foyers, elle dévoile son visage hideux et devient plus apparente pendant le mois sacré. Le fait est établi et ne constitue guère une nouveauté. Mais les chiffres restent problématiques en l'absence d'organismes indépendants capables de fournir des données fiables, loin des enjeux politiques. Le gouvernement dispose de ses propres chiffres qui sont loin des statistiques délivrées par certains organismes étrangers de recherche. Le ministre de la Solidarité nationale a parlé, récemment, de 72 302 personnes qui sont « en état de précarité ». Djamel Ould Abbas estime que les chiffres délivrés par le CNES sont les plus proches de la réalité, car ils soulignent une évolution conséquente depuis le début du premier quinquennat du Président Bouteflika. Pour lui, la pauvreté a été éradiquée en Algérie. Seulement, la réalité est tout autre. Djamel Ould Abbas a insisté sur le fait qu'il n'y a pas de pauvres en Algérie, mais plutôt des nécessiteux. Comme s'il y a une « différence sociale » entre les deux qualificatifs. Le ministre chargé de l'aide et de l'assistance sociale a ainsi décidé de rayer de mon dictionnaire le terme pauvre. « Il n'y en a pas en Algérie. Ce sont plutôt des nécessiteux ». Cette déclaration de M. Ould Abbas est une remise en cause des rapports des organismes internationaux, notamment celui de la Banque mondiale (BM), donnant l'Algérie parmi les pays où la pauvreté connaît une extension en largeur et en profondeur. Selon le ministre, sur les quelque 595 060 personnes démunies inscrites au niveau des directions de l'action sociale en 2004, il y avait seulement « 72 302 véritables démunis ». Pour recenser ces « démunis », le ministère se base sur quatre critères : l'absence de revenu et de logement, et le non accès aux services de la santé et à l'éducation. « C'est à partir de ces quatre critères réunis qu'on identifie un pauvre et non pas sur la base du PIB », a déclaré M. Ould Abbas, le 5 octobre, à la chaîne. Pour lui, la pauvreté est un mensonge. N'empêche que les actions de solidarité se poursuivent. Ainsi, durant ce mois sacré, le ministère en question a consacré une enveloppe de 105 millions de dinars au profit des familles nécessiteuses. Un couffin d'une valeur de 6000 DA a été distribué à des démunis. Le ministre n'a pas donné le nombre de couffins distribués. Quel est le nombre de personnes qui sont toujours dans le besoin auxquelles les aides étatiques ne parviennent pas ? Selon les chiffres officiels, 620 000 personnes ont bénéficié d'une pension mensuelle de 1 000 DA. Une autre somme volumineuse de 26 000 milliards de dinars a été débloquée par le ministère pour la prise en charge des victimes du terrorisme. M. Ould Abbas a aussi indiqué qu'il y a seulement 85 969 citoyens qui vivent au-dessous du seuil de pauvreté et quelque 120 000 SDF tout en réfutant le standard établi par la Banque mondiale (BM), de un dollar jour. Car pour lui, il est dépassé par le temps. La BM a donné dans un rapport datant de 2004 que le nombre d'Algériens vivant au-dessous du seuil de la pauvreté est de près de 7 millions. La question est de savoir combien de pauvres il y en a en Algérie. Dans un rapport datant de 2004, le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), 20% d'Algériens sont pauvres. De son côté, l'Association maghrébine pour l'étude de la population (AMEP) a donné un pourcentage de 7% de pauvres en Algérie durant l'année 2004. L'Office national des statistiques, organisme étatique, n'a donné aucun chiffre à ce sujet depuis 1995. A l'époque, à travers une étude réalisée en collaboration avec la BM, l'ONS avait parlé de 3,5 millions d'Algériens vivant dans la pauvreté.