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"Quel retrait, pour quel Irak ?" Gérard Challiant. Spécialiste des relations internationales et de l'étude des conflits armés, auteur de Guérillas. Du Vietnam à l'Irak.
Les forces de combat américaines ont quitté l'Irak hier, en retirant leur dernière brigade de combat. De nombreux Irakiens accueillent ce retrait avec méfiance et se demandent si les forces irakiennes seront capables d'assurer la sécurité du pays où les violences persistent. Alors même que cinq mois après les élections législatives, il n'y a toujours pas d'accord en vue pour désigner un Premier ministre. -Le retrait des dernières troupes de combat en Irak était fixé avant le 31 août 2010, ce qui ramène la présence militaire américaine en sol irakien à 50 000 hommes. Qui sont ces derniers soldats à rester sur place ? Ces 50 000 soldats peuvent parfaitement devenir des troupes de combat. Les troupes de combat n'étaient déjà plus utilisées pour combattre depuis cinq mois, mais pour maintenir une paix précaire. Ces forces qui restent en Irak servent de forces d'interposition, dans certaines zones du Nord, notamment. Par exemple, entre les Kurdes du Nord et les Arabes sunnites. Le retrait de l'ensemble des troupes américaines est annoncé pour la fin de l'année prochaine. En Irak, toutes les conditions d'une guerre civile sont aujourd'hui réunies. On attend déjà la désignation d'un Premier ministre depuis 5 mois. Les sunnites sont frustrés et se sentent laissés dans la partition du pouvoir. Différentes factions, au nombre de trois chez les chiites, ne sont pas d'accord entre elles. De plus, la prospérité des Kurdes au Nord, qui semblent avoir trouvé un moyen de se gouverner, dérange les majorités arabes. -Barack Obama avait annoncé un retrait complet des forces américaines en Irak, au plus tard au 1er janvier 2012. Peut-on s'attendre à un respect de cet objectif ? C'est une échéance qui ne sera pas tenue. Selon moi, le Premier ministre irakien à venir demandera, en 2011, aux Américains, de laisser derrière eux une force résiduelle, car leur départ laisse se profiler des choses très incertaines. Cette force résiduelle servira à pousser plus loin la stabilité du pays. Comme l'avait demandé récemment un général de l'armée irakienne, les Américains resteront, semble-t-il, plus longtemps qu'avant la date annoncée par Barack Obama. Selon ce scénario, le président américain sera dédouané du manquement à ses objectifs en Irak, en disant qu'on lui demande de rester pour assurer la protection d'un Etat en construction. -Quel est donc l'intérêt stratégique supérieur américain qui mènerait à un retrait plus tardif ? Cet intérêt est celui de ne pas laisser un pays en état de guerre civile, qui serait alors l'expression du fiasco complet de l'invasion irakienne. Le tout, pour que les Américains arrivent à s'extirper de cette situation est de laisser un Etat boiteux, mais pas déchiré.