Un auteur de littérature enfantine est né à Témouchent, aux côtés des quelques écrivains locaux, en majorité des essayistes. Il s'agit de Djamal Bensaâd qui, avec Ennousour Essita (Editions Dar Hamdane) fait montre d'un réel talent de conteur et d'une fertile imagination. Il y est question de Jouhane, une jeteuse de sorts aux pouvoirs démoniaques. Elle tient dans la crainte de ses redoutables maléfices les populations du voisinage ainsi que le ramassis de malfaisants diables à ses ordres. Le mage Kheir Eddine qui lui tenait tête et qui protégeait ceux qui n'avaient pas déserté les environs, décéda. Pis, le pouvoir de Jouhane décuplerait si elle arrivait à mettre la main sur la dépouille de Kheir Eddine afin d'en dévorer le cœur. Le corps du défunt a mystérieusement disparu. Jouhane part à sa recherche. L'ouvrage en deux tomes, chacun d'une quinzaine de pages bien tassées, raconte ce qui adviendra au fil d'une palpitante aventure. A lire Bensaâd, on oublie qu'il est un modeste agent subalterne affecté à l'accueil du public à l'ANSEJ, un homme dont le niveau d'études ne dépasse pas la 4e année moyenne. C'est qu'il fait étalage d'une habileté d'écrivain moderne en matière de littérature enfantine, une habileté où prime un mode de narration par lequel l'action prévaut sur le reste. Cela est si évident que son texte peut être avantageusement publié sous forme de bandes dessinées ou donner lieu à un dessin animé à la façon des mangas. Ce qui est en outre remarquable dans cet ouvrage, c'est que c'est du texte authentique, du texte d'auteur, comme disent les pédagogues, contrairement au texte fabriqué dont usent nombre d'auteurs de littérature enfantine en Algérie parce qu'ils veulent «faire simple» à la façon de l'école fondamentale. Bensaâd, lui, l'autodidacte, explique avoir été à l'école des bons auteurs pour être devenu un boulimique lecteur, une «manie» qui l'a pris alors qu'il exerçait dans un petit commerce. C'était dans les années 1980, une période où le négoce chômait à cause des pénuries en tous genres, ce qui l'incitait à se plonger dans la lecture pour meubler son temps.