En Ardèche, un petit village de quelques centaines d'habitants se transforme chaque année en rendez-vous des amateurs de films documentaires. Peu à peu, les états généraux du documentaire deviennent l'un des lieux majeurs d'un genre qui se développe. Ardèche de notre envyé spécial Le cinéma documentaire a le vent en poupe. De plus en plus de films de ce genre sont à l'affiche des salles, avec parfois un succès retentissant. Le documentaire, à ne pas confondre avec le reportage qui est encore un autre genre de représentation du monde, plaît parce qu'il offre un regard plus authentique sur la réalité qui nous entoure. Pendant une semaine, le petit village de Lussas en Ardèche en devient la capitale incontestée. Là, à l'initiative d'une petite société dénommée Ardèche images productions, a été créé ce festival, en août 1989. Depuis, il ne cesse de grandir. Son intérêt, entre autres, est de nous proposer chaque année des visions sur l'actualité de pays variés. Sur l'actualité ou sur l'histoire. On peut ainsi voir ici des films qu'on verra hélas rarement ailleurs, sauf pour les créations qui ont reçu l'aide financière des chaînes de télévision, comme pour ce qui concerne la France, les chaînes publiques Arte, France Ô, France 2 ou France 3, et parfois des privées, comme Histoire, Planète ou Canal . Cette année, parmi une liste très longue qui nous donne le tournis du monde, deux films au moins attirent notre attention. Ils reflètent une histoire algérienne. Ils ont été projetés mardi 24 et mercredi 25 août. Le premier s'intitule Mon oncle de Kabylie, réalisé par Chloé Hunzinger. En 1948, venus de Kabylie, quatre cousins âgés de huit ans débarquent à Marseille pour mener leurs études en internat. Pendant quatorze ans, et durant toute la guerre d'Algérie, ils grandissent en métropole, séparés de leurs familles. Tout bascule lors de l'indépendance en 1962. Si trois d'entre eux retournent vivre dans l'Algérie nouvelle, le quatrième finit par choisir les valeurs de la République. Il deviendra Azdine le Français. Mais que se cache-t-il derrière une intégration «réussie» ? Quel est le prix de cette «assimilation» dans le pays d'accueil ? La réalisatrice propose à son oncle de revenir sur les lieux ayant favorisé son intégration en France et décide par ailleurs de partir seule en Algérie pour retrouver ses cousins. Derrière ce synopsis, le film fait la part belle à ces personnages qui racontent et tissent une histoire léguée à la postérité de l'histoire de l'émigration en France. Tout comme d'ailleurs le deuxième film, qui devait être projeté lors de la même séance, Le Chemin noir, de Abdallah Badis. Une plongée dans un passé douloureux : de la campagne paisible aux paysages sidérurgiques sinistrés de la Lorraine, Le Chemin noir traverse la France d'aujourd'hui et celle d'hier. L'intime d'un parcours individuel s'ouvre sur l'histoire collective des hommes. L'enfance enfouie du narrateur renaît, et avec elle un cortège de fantômes. Années soixante, guerre d'Algérie, la remontée dans le temps s'apparente à une descente aux enfers, elle exhume la vie des manœuvres algériens de la sidérurgie, le métal en fusion et l'usine disparue. A l'heure où la présence de l'immigration algérienne en France a pris d'autres chemins de traverse, ce type de film renvoie à une histoire qu'il faut nécessairement écrire.