Un imam a été condamné. Mais plus important que la condamnation : ce jugement prouve que des hommes se disant de religion peuvent agir sans scrupule pour induire les fidèles en erreur afin de protéger leurs intérêts égoïstes et leur démarche délictueuse. Le tribunal d'El Khroub vient de trancher dans l'affaire qui opposait l'imam de la mosquée Okba Ibn Nafaâ à un journaliste, ancien correspondant du quotidien l'Est républicain. L'imam a été condamné pour diffamation. Il est sommé de payer une amende de 5000 DA comme réparation du tort causé au journaliste. La plainte remonte à juillet 2004 quand, à l'occasion d'un prêche du vendredi, l'imam n'a pas trouvé mieux que de vouer aux gémonies le journaliste en réponse à des écrits révélant de sombres pratiques au sein de la mosquée. Il s'agit de quatre articles qui avaient pour objet de graves dissensions qui déchiraient le comité de gestion de la mosquée, une histoire de détournement du fonds de la zakat ainsi que la destination des recettes du parking appartenant à la mosquée. Ces révélations avaient créé la panique et conduit à l'éviction d'un employé de l'établissement qui devait endosser l'accusation de détournement. Par ailleurs, le journal avait publié deux mises au point au profit de la mosquée comme le stipule la loi. Non content de cela, et du haut de sa tribune du vendredi, l'imam déclamant sa harangue devant les centaines de fidèles fréquentant la plus grande mosquée d'El Khroub est revenu à la charge pour citer nommément le journaliste Mohamed Daoui en le qualifiant « d'impie, communiste, athée, chrétien et pacsiste » comme en témoigne ce dernier. Un acharnement qui avait choqué plus d'un et provoqué la sympathie autour de la victime désignée au lynchage public mais qui a créé aussi une pression du fait des gestes de certains bigots manipulables à souhait. Ce prêche n'est pas sans nous rappeler les arguments de l'ancien ministre des Affaires religieuses Sassi Laâmouri qui, en pleine folie terroriste, dispensait les communistes algériens du droit à ne pas être égorgés. Le forfait de l'imam d'El Khroub n'avait suscité aucune réaction officielle de la part de la direction des affaires religieuses de Constantine. Mais la plainte de la victime a fini par apporter ses fruits une année et demie après, grâce au témoignage d'un fidèle.