Le gouvernement israélien refuse de relâcher son contrôle (sur les Palestiniens) et se comporte comme s'il n'y avait pas eu de retrait de cette bande, relève l'émissaire du Quartette. Rien n'a changé pour les Palestiniens des territoires occupés, particulièrement de la bande de Ghaza où le retrait israélien de septembre dernier n'est en fin de compte qu'un repli. Israël entend demeurer le maître du jeu, un jeu plutôt cynique et terriblement dangereux. Et pourtant, à l'heure où la communauté internationale pointe du doigt la Syrie à la suite de l'assassinat de l'ancien Premier ministre libanais, d'autres sont commis, et plus que cela, de telles opérations procèdent d'une politique d'Etat. C'est ce qui explique cette nouvelle nuit d'horreur vécue hier par les Palestiniens soumis à un déluge de feu après avoir riposté à l'assassinat d'un des dirigeants du Jihad islamique. L'armée israélienne a bombardé à l'artillerie et l'aviation des objectifs, lundi et dans la nuit, dans la bande de Ghaza officiellement à la suite de tirs de roquettes sur le territoire israélien qui n'ont pas fait de victimes. Des combattants du Jihad islamique ont annoncé auparavant qu'ils ne respecteraient plus la trêve après la mort d'un chef de la branche armée du groupe tué la veille en Cisjordanie par l'armée israélienne. Des hélicoptères d'assaut israéliens ont effectué deux raids dans la nuit de lundi à mardi contre des objectifs dans la bande de Ghaza, après des tirs d'artillerie et de missiles contre des zones inhabitées. Un raid a visé un bâtiment du Fatah, le mouvement du leader palestinien Mahmoud Abbas, à Beit Hanoun, dans le nord de la bande de Ghaza, selon des sources. Le bâtiment, atteint par des tirs de roquettes, a été endommagé. Un second raid a visé une bâtisse d'une association islamique liée au mouvement Jihad islamique, à Rafah, dans le sud de la bande de Ghaza. Le raid a fait cinq blessés, dont deux femmes, selon des sources médicales. Le bâtiment a été sérieusement endommagé. Des témoins palestiniens ont confirmé des explosions d'obus sans faire état de victime. Des avions de combat israéliens ont également tiré trois missiles air-sol dans le secteur, selon le ministère palestinien de l'Intérieur. Des hélicoptères d'assaut israéliens ont ensuite opéré durant la nuit à Beit Hanoun et Rafah. Un porte-parole des Brigades Al Qods, bras armé du Jihad, a revendiqué les tirs de lundi, affirmant que « cette opération héroïque est la première de celles destinées à venger l'assassinat » de son chef en Cisjordanie, Louaï Saâdi, 32 ans, tué par l'armée israélienne. Lors de cette opération israélienne, à Tulkarem dans le nord de la Cisjordanie, un autre militant de 28 ans, Majed Al Achkar, a été tué par les tirs israéliens. Le négociateur en chef palestinien Sakb Erakat a condamné l'opération israélienne. « Nous condamnons cette escalade israélienne à Tulkarem de même que cette politique d'assassinats qui menace l'accalmie », a-t-il dit. Par ailleurs, l'envoyé spécial du Quartette pour le Proche-Orient, James Wolfensohn, a reproché à Israël de se comporter comme s'il ne s'était jamais retiré de la bande de Ghaza, ce qui a de lourdes conséquences pour l'économie palestinienne. « Du fait de ses grandes préoccupations sur le plan de la sécurité, le gouvernement israélien refuse de relâcher son contrôle (sur les Palestiniens) et se comporte comme s'il n'y avait pas eu de retrait », écrit M. Wolfensohn dans une lettre adressée aux membres du Quartette (Etats-Unis, Russie, Union européenne et ONU). Il accuse les autorités israéliennes de « reporter les décisions importantes et préférer se décharger des questions difficiles sur des sous-commissions peu rapides » après le retrait israélien en septembre de la bande de Ghaza occupée depuis sa conquête durant la guerre de juin 1967. Il leur reproche notamment de faire traîner les choses concernant l'ouverture d'un passage frontalier entre Ghaza et l'Egypte, estimant que les Palestiniens étaient « très désireux de conclure ». Il estime qu'un règlement de cette question est absolument indispensable pour relancer l'économie dans le territoire surpeuplé où le taux de chômage s'approche des 50%. Il critique également l'Autorité palestinienne pour n'avoir pas su assurer un contrôle satisfaisant dans la bande de Ghaza. « Aussi longtemps que l'Autorité palestinienne n'aura pas instauré un contrôle civil satisfaisant (...), il sera très difficile de convaincre des gouvernements ou des investisseurs privés que quelque chose a changé et qu'il vaut la peine de faire des affaires dans cette région du monde », souligne l'ancien gouverneur de la Banque mondiale nommé par le Quartette pour favoriser la reconstruction de l'économie palestinienne. Il reste que cette dernière dispose de suffisamment d'arguments comme le manque de moyens, ou encore leur destruction systématique par l'occupant israélien en vue justement d'affaiblir l'Autorité palestinienne. C'est le cas avec les infrastructures, et aussi avec les institutions chargées d'encadrer la société palestinienne.