Tout porte à le croire après l'exigence d'Israël de garder le contrôle de ses frontières. Les craintes des Palestiniens, après le retrait d'Israël de Ghaza, risquent de se justifier et l'évacuation des colons juifs devenir un leurre après les déclarations des principaux responsables israéliens quant à la conservation par l'Etat hébreu du contrôle des frontières de la bande de Ghaza. Autant dire que pour les Palestiniens rien ne devra changer, le territoire de Ghaza, certes vidé de ses colons juifs, demeurant soumis à l'autorité de l'ancien occupant israélien et à son armée. Jeudi, une commission inter-ministérielle israélienne a demandé qu'Israël garde le contrôle sécuritaire à la frontière entre la bande de Ghaza et l'Egypte, après le retrait prévu, à une date non encore fixée -qui reste du ressort du seul gouvernement israélien- des troupes israéliennes stationnées dans la ville frontalière de Rafah. L'Autorité palestinienne a certes rejeté cette prétention mais cette protestation est du domaine du symbolique au vu de l'impuissance du cabinet palestinien à dire son mot dans le processus de retrait de Ghaza engagé unilatéralement par le chef du gouvernement israélien Ariel Sharon. Dans sa réaction, le principal négociateur palestinien, Saëb Erakat, a déclaré l'opposition de l'Autorité palestinienne à tout contrôle de la bande de Ghaza, car, selon lui, cela signifierait la «perpétuation de l'occupation» israélienne. «Nous rejetons catégoriquement la position (israélienne). Il est inadmissible qu'Israël garde le contrôle de la frontière de Rafah et nous avons pris contact avec l'administration américaine et des représentants du quartette (USA, Russie, UE, ONU) pour qu'une tierce partie soit présente au passage de Rafah», a déclaré M.Erakat. Un responsable de la présidence du Conseil israélien a déclaré en effet, sous le couvert de l'anonymat: «Nous voulons bien que la bande de Ghaza soit ouverte vers l'extérieur, mais nous n'accepterons pas pour autant qu'elle se transforme en un arsenal pour terroristes», ajoutant «le problème n'est pas tant sur le passage de personnes que sur celui des biens, compte tenu de la possibilité d'introduire des armes si Israël renonçait à tout contrôle». Autant dire que même si Israël n'est plus présent physiquement -par ses colons et ses contingents militaires à Ghaza- il entend toutefois garder la haute main sur le territoire palestinien, interdisant de fait à ses habitants de vivre normalement. De fait, la paranoïa sécuritaire israélienne est telle, que même le nombre de pistolets et de munitions que les soldats égyptiens -qui devront prendre prochainement position aux frontières entre l'Egypte et la bande de Ghaza- doivent avoir est scrupuleusement consigné. Ainsi, selon la presse israélienne, les gardes-frontières égyptiens seront légèrement armés et n'auront droit, en tout et pour tout, qu'à quatre vedettes de surveillance, huit hélicoptères et une trentaine de blindés légers. D'autre part, Israël veut que l'actuel terminal de Rafah, -porte entre l'Egypte et Ghaza-, soit transféré plus au sud, près du village israélien de Kerem Shalom aux frontières entre l'Egypte, la bande de Ghaza et Israël de façon à ce que ce dernier garde le contrôle sécuritaire des entrées dans la bande de Ghaza. En corollaire, les problèmes concernant la réouverture du port de Ghaza et de l'aéroport de Rafah restent en suspens de même que la question des passages sûrs entre la bande de Ghaza et la Cisjordanie demeure sans solution. De fait, à terme, la bande de Ghaza va devenir le ghetto qu'Ariel Sharon appelait de ses voeux au lendemain même de son accession au pouvoir en mars 2001. Aussi, la tournure que prend le désengagement de Ghaza s'éloigne-t-elle dangereusement du processus de la ‘'Feuille de route ‘' plan de paix international dont la communauté internationale espère la réactivation dans le sillage du désengagement israélien de Ghaza. Or, les intentions de Sharon sont de toute évidence autres, lui qui vient d'autoriser la confiscation de 120 hectares appartenant à des Palestiniens en Cisjordanie pour permettre l'expansion de la colonie juive de Maalé Doumim, allant ainsi à l'encontre de l'esprit même du plan de paix international dont l'une des exigences est justement le gel de la colonisation que le chef du gouvernement israélien tend, a contrario, à réactiver et à renforcer en Cisjordanie. Une sorte de compensation du lâchage de la bande de Ghaza. Dès lors, l'espoir de M. Abbas de voir Israël entamer d'autres retraits en Cisjordanie risque fort de demeurer un voeu pieux. En effet, dans une déclaration aux quotidiens espagnol ABC, et français Libération le président palestinien qui estimait que «le retrait n'est une victoire ni palestinienne ni israélienne. C'est une victoire de la paix pour tous, Israéliens comme Palestiniens», appelait Israël à d'autres désengagements en Cisjordanie. Mahmoud Abbas indiqua à ce propos: «Ce retrait n'est qu'un début», affirmant « les colonies sont illégales en Cisjordanie, comme elles le sont à Jérusalem et à Ghaza» et souligne «si l'on dit vouloir mettre fin à l'occupation, cela implique de poursuivre le retrait. Quand la communauté internationale parle d'un Etat palestinien indépendant, elle y inclut la Cisjordanie. Cela veut dire que les Israéliens doivent en retirer leurs colonies». Certes, mais cela reste conditionné par la volonté des dirigeants israéliens à oeuvrer réellement pour la paix.