Le procès des huit personnes arrêtées, dimanche 29 août, dans un local en plein centre d'Ighzer Amokrane, à 60 km de Béjaïa, inculpées pour non-observation du jeûne, a été reporté au 8 novembre prochain. C'est ce qu'a décidé, hier, la juge, au terme d'une brève audience qui s'est tenue au tribunal d'Akbou. A. C. 27 ans, principal accusé de «non-respect des préceptes de l'Islam», a été mis en liberté provisoire après 8 jours d'incarcération préventive. L'audience s'est ouverte à 9h20. Les huit accusés ont été cités à la barre. La juge a aussitôt prononcé le renvoi de l'audience au 8 novembre pour «besoin de complément d'enquête» et «absence de deux témoins». Les faits remontent au 29 août dernier. Il était 13h, quand la police a investi un fast-food fermé situé au 2e étage d'un immeuble commercial au centre d'Ighzer Amokrane. «Les policiers ouvrent le rideau et arrêtent les personnes se trouvant à l'intérieur. Dix jeunes ont été arrêtés avant que deux d'entre eux ne soient relâchés pour être cités comme témoins. Se basant sur l'article 144 bis du code pénal, le parquet a poursuivi huit prévenus pour «non-respect des préceptes de l'Islam.» Interrogé par nos soins, en marge de l'audience, maître Mouloud Benkadoum, avocat du propriétaire du local, principal prévenu, plaide la relaxe de son client. «Mon client nie les faits qui lui sont reprochés», soutient-il avant de préciser que «la police a investi un local dont le rideau était fermé. Mon client n'a servi aucune personne pour manger. Il était en train de nettoyer son local et le matériel pour se préparer à l'ouverture le soir». Et d'ajouter : «L'article 144 bis du code pénal ne s'applique pas aux faits. C'est une interprétation erronée de la loi. La loi n'interdit en aucun cas la non-observation du jeûne». «Les grands hôtels servent des alcools et des repas en plein jour pendant le Ramadhan», poursuit encore maître Benkadoum, contestant, du coup, la procédure «du flagrant délit». A la sortie du tribunal, les jeunes accusés ont été assaillis par les questions des journalistes. «Nous avons été menottés et embarqués comme des délinquants dans un fourgon par la police», dénonce un accusé. T. R. 32 ans, un autre prévenu, affirme «avoir été interpellé et embarqué par la police alors qu'il se trouvait dans la rue, à proximité du local en question». Un autre inculpé Y. B. 29 ans, témoigne «avoir été embarqué alors qu'il se trouvait dans la cage d'escalier». Cette affaire a provoqué de vives réactions d'indignation de militants d'associations présents dans la salle d'audience hier. Joint par téléphone, maître Zehouane, président de la Ligue algérienne de la défense des droits de l'homme, s'est dit «étonné» de la programmation d'un tel procès qu'il qualifie d'«aberrant», considérant qu'«il n'y a pas matière à procès». «La qualification des faits incriminés n'a pas de base juridique. La police a investi, sans aucun mandat de perquisition, un lieu privé dont le rideau était de surcroît baissé. C'est le retour à l'intolérance. La Constitution garantit la liberté de la foi», soutient encore maître Zehouane.