Le tournant de l'Algérie vers l'économie de marché et son ouverture au marché mondial , notamment au marché européen, après l'accord d'association avec l'UE, a mis le législateur algérien dans l'obligation de légiférer abondamment sur tout ce qui a trait à l'activité commerciale et à la protection du consommateur afin de faire face à un flux important de marchandises, contrecarrer la contrefaçon et surtout protéger le consommateur. La protection du consommateur revêt d'une importance stratégique en Europe et en Amérique, cette importance trouve son fondement dans le concept de citoyenneté. Le citoyen est la machine du progrès : en consommant plus, il fait marcher l'économie, mais en consommant mieux, il fait marcher l'économie tout en lui donnant cette pérennité qui rassure toute la chaîne du système économique. Des associations fortes de défense des intérêts du consommateur exercent dans les pays développés et jouent un grand rôle dans la vie économique, elles s'apparentent même à un cinquième pouvoir. Elles donnent des avis sur la fiabilité de certains produits et analysent les rapports qualité/prix, puis n'hésitent pas à critiquer sévèrement des sociétés de production ou de service et même des administrations qui piétinent sur les droits des consommateurs. Il y a quelques années, les trois puissants opérateurs de téléphonie mobile en France ont étés épinglés par les associations de défense des consommateurs à cause de leur entente tacite sur le prix du SMS en France. Ces associations en Europe bénéficient d'un temps d'antenne dans les médias publics et privés, expliquant aux consommateurs leurs droits et la meilleure manière de les défendre. Le consommateur algérien est un consommateur fragile, il est confronté ces dernières années à l'arrivée massive de différents produits du monde entier, avec un pourcentage écrasant en contrefaçon. Il fait face à un pouvoir d'achat en continuelle érosion qui lui permet à peine de s'offrir les produits de première nécessité. Le mois de Ramadhan montre à chaque fois le degré de fragilité d'un consommateur décapité entre un maigre pouvoir d'achat, une spéculation forcenée qui fait doubler les prix des produits à la consommation et une qualité qui laisse à désirer et qu'il ne peut contester. Les nouvelles technologies qui pleuvent sur l'Algérie posent différents problèmes, d'un côté une large contrefaçon, et de l'autre, un problème de sécurité nationale comme on l'a vu récemment avec le black-berry. Les règles qui protégent le consommateur se déclinent en plusieurs lois : il y a les règles applicables aux pratiques commerciales et celles de la concurrence qui constituent les premiers noyaux de protection du consommateur. Car on ne peut protéger un consommateur sans avoir auparavant organisé les différentes relations entre les intervenants économiques et fixé toute une panoplie de règles à respecter et des pratiques à éviter qui constituent des délits punis par de fortes amendes. Les règles applicables aux pratiques commerciales et les règles de la concurrence Les règles édictées par la loi 04/02 concernant les pratiques commerciales prévoient l'obligation pour tout opérateur économique d'afficher le prix, et que le prix affiché soit réellement le prix à payer à la consommation et afficher aussi les caractéristiques du produit à vendre. La loi énumère aussi les pratiques illégales qui sont sévèrement punies au maximum de deux ans de prison ferme et d'amende allant jusqu'à cinq millions de dinars. Cette loi prévoit aussi de fortes amendes en cas de pratiques déloyales, comme par exemple la contrefaçon sur les enseignes ou le produit d'un concurrent, sans oublier la publicité illégale et mensongère et diverses pratiques abusives. Toutes ces règles sur les pratiques commerciales constituent le premier noyau de la protection du consommateur, car elles régissent les relations entre les agents économiques de façon à ce que le consommateur les retrouve saines. Pour ce qui est de la concurrence qui s'applique aux activités de production, de distribution et de services, la loi énonce clairement la liberté des prix à l'exception des biens et services stratégiques où l'Etat régule les prix des produits stratégiques et de première nécessité, comme le lait et la semoule qui sont subventionnés par l'Etat et considérés comme intouchables par rapport à la stabilité de leur prix. Elle donne aussi à l'Etat exceptionnellement le droit de fixer lui-même les prix en cas de hausses excessives des ces derniers, provoqués par de graves perturbations du marché, de calamité ou des difficultés durables d'approvisionnement, protégeant ainsi le consommateur dans sa quête quotidienne de produits de première nécessité et aussi dans des conditions de crise où la spéculation triomphe envers et contre tous. L'ordonnance 03/03 relative à la concurrence a été modifiée et complétée par la loi 08/12 du 25 juin 2008. Cette dernière indique que l'Etat peut carrément fixer les prix en cas de grave perturbation, par voie règlementaire pour une durée de 6 mois renouvelables après avis du conseil de la concurrence, contrairement à l'ancien texte qui englobe les activités de production, de distribution et de services seulement. Cette nouvelle loi s'applique aussi à l'activité d'importation, mais aussi aux marchés publics, de la publication de l'avis d'appel d'offres jusqu'à l'attribution définitive du marché. De la protection du consommateur et de la répression des fraudes La loi 09/03 concernant la protection du consommateur et la répression des fraudes a remplacé l'ancienne loi 89/02. Elle donne au concept de consommateur une plus large signification.Le consommateur est une personne physique et même morale qui acquiert un bien ou un service gratuitement où à titre onéreux pour lui-même ou une autre personne ou même à un animal. La protection du consommateur peut s'exercer par le consommateur lui-même ou par des associations légalement constituées dans le but d'assurer la protection du consommateur par son information, sa sensibilisation et son orientation. Ces associations du consommateur peuvent se présenter devant la justice et se porter partie civile, lorsqu'un ou plusieurs consommateurs ont subi des préjudices par le fait d'un intervenant. L'innocuité des produits doit être garantie. Le processus de fabrication des produits alimentaires doit respecter les conditions de salubrité et d 'hygiène du personnel et des lieux de fabrication, de traitement et de stockage. Les produits doivent répondre à l'attente légitime du consommateur en ce qui concerne ses qualités substantielles, la teneur en principes utiles et doivent même indiquer les risques inhérents à son utilisation. Le consommateur doit benificier d'une garantie soit pour un produit ou un service, et tout défaut peut entraîner le remplacement ou le remboursement sans oublier le droit à l'essai du produit qui est un principe important. La loi donne une grande importance au contrôle des produits et services et donne de larges prérogatives aux agents de la répression des fraudes qui peuvent effectuer des contrôles de jour comme de nuit, dans tous les lieux de fabrication, de stockage ou de vente des produits. Il ont le pouvoir d'auditionner les intervenants et contrôler leurs documents, de faire des constats visuels ou avec des appareils de mesure, mais aussi des prélèvements d'échantillons aux fins d'analyses et d'essais. Dans ce cas, des laboratoires sont prévus, utilisant des méthodes reconnues sur le plan international. Toujours en cas de prélèvements d'échantillons, la loi garantit le droit de l'intervenant en prévoyant pour chaque prélèvement trois échantillons dont un est laissé aux soins de l'intervenant qui a le droit de demander une expertise. Mais le plus important des prérogatives des agents de contrôle et de répression des fraudes, c'est sans doute les mesures conservatoires que la loi leur confère. Ils peuvent procéder aux refus temporaires d'admission aux frontières en cas de suspicion de non-conformité du produit ou du refus définitif en cas de confirmation de la non-conformité du produit, pouvant aussi procéder à la destruction de ces produits, ou leur envoi à des organismes d'intérêt collectif. Le décret exécutif 07-390, fixant les conditions et les modalités d'exercice de l'activité de commercialisation de véhicules automobiles neufs, est venu à point nommé pour faire de l'ordre dans un nouveau secteur et déjà en plein désordre. En passant commande, le consommateur payera un acompte qui ne peut dépasser 10 % sur un prix total férme qui ne peut faire l'objet de révision ni d'actualisation et un délai de livraison ne dépassant pas les 45 jours. Le consommateur bénéficiera d'une livraison gratuite et d'une garantie d'au moins 2 ans ou de 50 000 km. Le service après-vente est aussi assuré, et se traduit par une révision périodique couvrant la période de garantie et la vente de pièces et d'accessoires d'origine. Tels sont les principes consacrés dans le domaine de la commercialisation des voitures neuves qui sont encore et malheureusement souvent piétinés par les concessionnaires au détriment d'un consommateur qui a du mal à connaître ses droits et ne connaît pas forcément la direction à prendre pour réparer ces abus. Enfin, des textes de loi existent et sont théoriquement très fiables pour favoriser une culture de la protection du consommateur et mettre de l'ordre dans l'activité commerciale et surtout protéger le consommateur algérien des produits et services qui inondent le marché. Il reste à donner à ces lois plus de moyens financiers et humains qui passent nécessairement par une meilleure formation des agents du contrôle et de la répression des fraudes, et leur mise à niveau. L'Etat doit favoriser la création d'associations de consommateur, leur donner les moyens nécessaires et aussi un temps d'antenne dans les médias à l'effet de vulgariser et de populariser ce concept de protection du consommateur. Il est aussi utile de rappeler que le consommateur doit recourir systématiquement à la justice pour recouvrer les droits que la loi lui confère et par la même occasion donner à cette institution l'occasion de jouer son rôle.