Il y a le mot «noble» dans l'adjectif «nobelisé». Mais, comme la plupart des prix, le Nobel n'est pas l'indice d'un surpassement du lauréat par rapport aux autres. Depuis sa création, le prix a oublié, sinon méprisé, d'immenses écrivains à qui les lecteurs du monde ont accordé la gloire d'être lu et reconnu. Certes, on ne peut reprocher à l'Académie suédoise de ne pas être parfaitement juste, la subjectivité de l'écriture échappant à l'exactitude, et le choix étant difficile à l'échelle planétaire. Il reste qu'on ignore quelle est son étanchéité aux divers lobbies, politiques en partie et économiques puisque le monde de l'édition est désormais dominé par des multinationales. Le manque de transparence sur son fonctionnement nourrit doutes et soupçons. Le problème réside aussi dans le fait que le Nobel soit le seul prix littéraire mondial. Peut-être en faudrait-il d'autres, ou disons un autre, pour permettre d'éventuels équilibres ? Cela dit, le choix, cette année, de l'écrivain Vargas Llosa, atteste que les jurés invisibles du prix suprême ne sont pas réfractaires au talent. L'auteur péruvien, naturalisé espagnol après ses déconvenues politiques (candidature malheureuse à la présidence), a réussi à imposer, à travers ses romans, un style et un univers qui lui ont donné une aura et un lectorat à l'échelle mondiale. En Algérie, où ses œuvres sont disponibles en français, il compte aussi des admirateurs qui ont applaudi à son élection.