« Intifadha », « guérilla », « guerre civile » des banlieues, autant de qualificatifs appropriés ou non pour traduire une situation qui, elle, est bien réelle : la profonde fracture socioéconomique des banlieues défavorisées, le mal-être et la marginalisation de leurs habitants, notamment des jeunes. L'embrasement de plusieurs villes de la Seine-saint-Denis et de départements voisins a été rapide, tant le ras-le-bol des populations de ces villes-ghettos, victimes de discriminations, a atteint son paroxysme. L'étincelle a pris à Clichy-sous-Bois, mais cela aurait pu se produire ailleurs. Qui ne se souvient de Vaulx-en-Velin, des Minguettes et d'autres cités défavorisées de France ? Autant de signes d'alarme d'une politique de la ville insuffisante, d'actions inopérantes. Tant de la part de la gauche que de la droite depuis 30 ans. Les villes-ghettos et la marginalisation de leurs habitants sont un problème fondamental de la société française. En conséquence de quoi, les replis identitaires sur le territoire, la religion et l'origine ethnique s'approfondissent. Aujourd'hui, le Premier ministre Dominique de Villepin se transforme en pompier. Une fois le feu éteint, et après ? Une politique courageuse, généreuse, hardie s'impose. Il serait temps que de véritables mesures d'égalité des chances et de promotion sociale des habitants des quartiers défavorisés soient mises en œuvre. Les déclarations ne suffisent plus, tout le monde attend - à commencer par les concernés eux-mêmes - des actes. Les jeunes des cités sont en droit de vouloir une véritable insertion professionnelle en lieu et place de contrats précaires et de petits boulots mal payés, de vivre dans des territoires et dans un environnement propices à leur épanouissement de citoyens d'un pays qui est le leur, de ne plus être traités « à la marge » et considérés comme des « parias » ou des « cas d'espèces ». L'unité de façade affichée par le gouvernement Villepin masque mal les dissonances et les désaccords entre ses membres, notamment entre le ministre de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy, et son collègue de la Promotion de l'égalité des chances, Azouz Begag dans l'approche du problème et les solutions préconisées. « Je conteste cette méthode de se laisser déborder par une sémantique guerrière, imprécise. Quand on évoque des situations délicates, il faut le faire dans le sens de l'apaisement... Certains sont morts à cause d'insultes. » « Il faut certes tenir un langage de la fermeté, pour le rétablissement de l'ordre. Mais c'est en luttant contre les discriminations dont sont victimes les jeunes qu'on rétablira l'ordre, l'ordre de l'égalité. Pas en amenant plus de CRS. »