Introduction : A cause de la multiplicité et de la diversité de ses éléments constitutifs, l'environnement est un concept difficile à définir. On est même tenté de dire qu'il existe autant de définitions qu'il y a de personnes s'intéressant à cette notion extraordinaire. L'environnement, avec tout ce que recouvre cette notion exceptionnelle, fait partie des prérogatives de l'administration des douanes. En effet, cette dernière a pour mission, notamment, de veiller à la protection de la faune, de la flore et du patrimoine culturel et artistique (Cf. art. 3 du code des douanes). Aux termes de l'article 4 de la loi n° 03-10 du 19 juillet 2003 relative à la protection de l'environnement dans le cadre du développement durable, on entend par environnement, «les ressources naturelles abiotiques et biotiques telles que l'air, l'atmosphère, l'eau, le sol et le sous-sol, la faune et la flore, y compris le patrimoine génétique, les interactions entre lesdites ressources, ainsi que les sites, les paysages et les monuments naturels». Il s'ensuit que l'environnement est constitué par deux types de ressources naturelles : les ressources naturelles biotiques que sont la faune et la flore et les ressources naturelles abiotiques que sont l'air, l'atmosphère, l'eau, le sol et le sous-sol. La législation douanière assure à ces ressources une protection appropriée au moyen d'une institution propre au droit douanier : les prohibitions (Cf. art. 21 du code des douanes). On entend par «prohibition», l'interdiction légale d'importer ou d'exporter une marchandise dont les caractéristiques sont fixées dans le texte législatif ou réglementaire prohibitif. L'interdiction peut être «absolue», auquel cas la marchandise concernée ne peut faire l'objet sur le territoire douanier d'aucune opération douanière : importation, exportation, déclaration, détention, circulation, colportage, transaction, vente aux enchères publiques, cession de gré à gré, etc. L'interdiction peut être «relative» auquel cas la marchandise à laquelle elle se rapporte peut faire l'objet sur le territoire douanier des opérations douanières visées à l'alinéa précédent (importation, exportation, déclaration, détention, circulation, etc.), sous réserve toutefois de respecter certaines conditions fixées simultanément par le code des douanes et le texte législatif ou réglementaire prohibitif. 1-Bases légales de la protection de l'environnement Ils sont nombreux les textes législatifs et réglementaires constituant les bases légales de la protection de l'environnement, ce qui prouve l'importance que les pouvoirs publics accordent à la prise en charge de cette question fondamentale. Les principaux textes sont : • Ordonnance n° 79-07 du 21 juillet 1979, modifiée et complétée, portant code des douanes ; • Loi n° 01-10 du 3 juillet 2001 portant loi minière ; • loi n° 01-11 du 3 juillet 2001 relative à la pêche et à l'aquaculture ; • loi n° 01-19 du 12 décembre 2001 relative à la gestion, au contrôle et à l'élimination des déchets ; • loi n° 02-02 du 5 février 2002 relative à la protection et à la valorisation du littoral ; • loi n° 03-10 du 19 juillet 2003 relative à la protection de l'environnement dans le cadre du développement durable ; • loi n° 04-07 du 14 août 2004 relative à la chasse ; • ordonnance n° 06-05 du 15 juillet 2006 relative à la protection et à la préservation de certaines espèces animales menacées de disparition.Les textes visés ci-dessus instituant entre autres des prohibitions douanières environnementales méritent par voie de conséquence d'être examinés attentivement. 2-Caractères des prohibitions douanières environnementales Tout dépend de la composante concernée de l'environnement et de son cadre juridique spécifique. A) Loi n° 01-10 du 3 juillet 2001 portant loi minière, notamment ses articles 94, 102, 173, 209 et 222. Cette loi prévoit, outre des exemptions fiscales concernant l'importation de certains biens d'équipement destinés aux activités de prospection, d'exploration et d'exploitation minière, un certain nombre de prohibitions dont des prohibitions douanières relatives. Parmi ces prohibitions, on peut en citer une à titre d'exemple, celle édictée par l'article 102 de cette loi. Cet article dispose : «Nul ne peut entreprendre des travaux d'exploration minière s'il n'est titulaire d'un permis d'exploration». Aux termes des articles 209 et 222 de la loi sus-visée, les agents des douanes peuvent, à tout moment, visiter les installations et dispositifs, ainsi que les moyens de transport concourant à l'exploitation du plateau continental et à l'exploration de ses ressources naturelles à l'intérieur des zones de sécurité prévues à l'article 201 de ladite loi et dans l'espace maritime ; ils sont habilités à constater les infractions prévues aux articles 211 à 219 de la même loi. Il convient de préciser que le droit de visite visé à l'alinéa précédent n'est pas reconnu aux agents des douanes par leur propre code, le code des douanes. Ce dernier reconnaît ce droit uniquement aux agents du service national des gardes-côtes, ce qui est à la fois étonnant et illogique en même temps (Cf. art. 46 du code des douanes). Il est regrettable de constater que deux lois internes, œuvre du pouvoir législatif, se contredisent à propos d'un droit universel des agents des douanes ! Comme petite conclusion aux prohibitions visant les activités industrielles en off shore, c'est-à-dire les activités se situant sur la mer, loin du rivage, nous pouvons dire que, pour que la douane puisse exercer véritablement et correctement ses prérogatives en la matière, il est nécessaire de la doter en moyens légaux et matériels ad hoc en rappelant que cette administration avait dans les années 1970 un parc naval composé d'un certain nombre de vedettes que les agents des douanes de la brigade maritime utilisaient et géraient le plus normalement du monde. B) Loi n° 01-11 du 3 juillet 2001 relative à la pêche et à l'aquaculture, notamment ses articles 46, 51, 53, 58, 62, 75 et 77. Comme la loi précédente, celle-ci prévoit aussi de nombreuses prohibitions dont des prohibitions douanières relatives et absolues. Concernant les prohibitions douanières relatives, nous pouvons en citer une à titre d'exemple, celle édictée par l'article 46 de cette loi. Cet article dispose : «Toute acquisition ou importation de navires de pêche par des personnes physiques ou morales fait l'objet d'une autorisation préalable de l'administration de la pêche». S'agissant des prohibitions douanières absolues, il est possible d'en retenir une à titre d'exemple, celle prévue par l'article 51 de la même loi. Cet article stipule : «La nomenclature des engins dont l'importation, la fabrication, la détention et la vente sont interdits est fixée par voie réglementaire». Bien que cette loi n'habilite pas les agents des douanes à rechercher et à constater les infractions à ces dispositions, ce qui est étonnant, il n'en demeure pas moins cependant que ces agents peuvent, en application des dispositions combinées des articles 3 et 111, respectivement du code des douanes et de la loi n° 03-10 du 19 juillet 2003 relative à la protection de l'environnement dans le cadre du développement durable, constater et relever toutes les infractions y afférentes et ce, sans violer les règles de compétence ratione personae, ratione materiae et ratione loci. Ils peuvent le faire selon les règles et procédures prévues par le code des douanes, en précisant que les procès-verbaux de douane rédigés par les agents des douanes font foi jusqu'à inscription en faux des constatations matérielles y relatées (Cf. art. 254 du code des douanes). En guise de petite conclusion à ces prohibitions douanières tenant à la pêche et à l'aquaculture, il convient de dire avec insistance qu'il est temps de choisir, de deux choses l'une : soit de doter l'administration des douanes en moyens humains, matériels, financiers et légaux lui permettant d'exercer correctement sa noble mission polyvalente, soit de la rattacher à une autre institution où elle pourra avoir ces moyens, le ministère de la Défense nationale ou la Présidence de la République, par exemple ! C- Loi n° 01-19 du 12 décembre 2001 relative à la gestion, au contrôle et à l'élimination des déchets, notamment ses articles 25, 26 et 53. A l'exemple des lois visées au II. A) et B) ci-dessus, cette loi prévoit elle aussi de nombreuses prohibitions dont des prohibitions douanières relatives et absolues. Concernant les prohibitions douanières relatives, on peut en citer une à titre d'exemple, celle édictée par l'article 26 de cette loi. Cet article dispose : «L'importation et le transit des déchets spéciaux dangereux sont prohibés vers les pays qui en interdisent l'importation en l'absence de leurs accords spécifiques». S'agissant des prohibitions douanières absolues, il est possible d'en retenir une à titre d'exemple, celle prévue par l'article 25 de cette loi. Cet article dispose : «L'importation des déchets spéciaux dangereux est strictement interdite». Conformément aux dispositions combinées de cette loi, du code des douanes et de la loi relative à la protection de l'environnement dans le cadre du développement durable, les agents des douanes sont habilités à rechercher et à constater les infractions relatives aux déchets spéciaux dangereux. En guise de petite conclusion à ces prohibitions visant en particulier le contrôle par la douane des déchets spéciaux dangereux, il n'est pas inutile de préciser que, à travers l'institution de telles interdictions, c'est la préservation et la protection à la fois de la santé humaine, de la santé animale et de la santé végétale qui est visée, ce qui n'est pas une mince affaire et ce qui constitue pour la douane une lourde responsabilité mais aussi une preuve de la reconnaissance par les pouvoirs publics de son rôle d'actrice incontournable en matière de lutte contre la dégradation de la nature. D- Loi n° 03-10 du 19 juillet 2003 relative à la protection de l'environnement dans le cadre du développement durable, notamment ses articles 10, 11, 52, 55 et 111. A l'instar des lois visées au II. A), B) et C) ci-dessus, cette loi prévoit elle aussi de nombreuses prohibitions dont des prohibitions douanières relatives et absolues. En ce qui concerne les prohibitions douanières relatives, on peut en nommer une à titre d'exemple, celle prévue par l'article 55 de cette loi. Cet article dispose : «L'embarquement ou le chargement de tous matériaux, substances ou déchets destinés à être immergés en mer est subordonné à l'obtention d'une autorisation délivrée par le ministère chargé de l'Environnement. Les autorisations d'immersion délivrées valent autorisation d'embarquement ou de chargement». Pour ce qui est des prohibitions douanières absolues, il est possible d'en retenir une à titre d'exemple, celle édictée par l'article 52 de cette loi. Cet article stipule : «Nonobstant les dispositions législatives en vigueur relatives à la protection de l'environnement marin, sont interdits le déversement, l'immersion et l'incinération dans les eaux maritimes sous juridiction algérienne, de substances et matières susceptibles de porter atteinte à la santé publique et aux écosystèmes marins, de nuire aux activités maritimes, y compris la navigation, l'aquaculture et la pêche, d'altérer la qualité des eaux maritimes du point de vue de leur utilisation et de dégrader les valeurs d'agrément de la mer et des zones côtières et de porter atteinte à leur potentiel touristique». Aux termes de l'article 111 de la loi visée au II. D) ci-dessus, les agents des douanes sont habilités à rechercher et à constater les infractions aux dispositions de cette loi.En guise de petite conclusion aux prohibitions douanières visant cette composante de l'environnement qu'est la mer et ce qu'elle recèle comme richesses, nous pouvons redire ce que nous avons déjà dit précédemment, à savoir que pour que la douane puisse faire respecter par ses usagers ces prohibitions, il est impératif et urgent de la doter en moyens modernes de surveillance que sont les vedettes et les hélicoptères et ce, à l'instar de ce qui se passe à l'étranger. E-Loi n° 04-07 du 14 août 2004 relative à la chasse, notamment ses articles 51, 55, 60, 63, 82, 83 et 93. Comme pour les lois citées au II. A), B), C) et D) ci-dessus, cette loi prévoit aussi des prohibitions dont des prohibitions douanières relatives et absolues. Pour les prohibitions douanières relatives, nous pouvons en citer une à titre d'exemple, celle prévue par l'article 60 de cette loi. Cet article dispose : «La mise en vente, la vente, l'achat, le transport, le colportage et l'exportation du gibier mort ou vif… sont interdits pendant la fermeture de la chasse, sauf autorisation spéciale». Pour les prohibitions douanières absolues, il est possible d'en nommer une à titre d'exemple, celle édictée par l'article 56 de cette loi. Cet article stipule : «Il est interdit de chasser, de détenir, de vendre, de transporter, d'utiliser, de colporter les espèces protégées». Il convient de préciser que les services des douanes, les services chargés du contrôle sanitaire et vétérinaire, ainsi que ceux de la police des frontières sont chargés du contrôle aux frontières du transport, de l'introduction ou de la sortie des spécimens d'animaux sauvages conformément à la présente loi (Cf. art. 63). En vertu de l'ordonnance n° 06-05 du 15 juillet 2006 relative à la protection et à la préservation des espèces animales menacées de disparition, celles-ci sont : • Au titre de la classe des mammifères : mouflon à manchettes, ornyx, cerf de Barbarie, hyène rayée, gazelle rouge, gazelle d'Atlas, gazelle dama, gazelle dorcas, gazelle du Sahara, fennec, guépard, chat des sables et addax. • Au titre de la classe des oiseaux : ibis chauve, erismature à tête blanche, faucon crecerellette, faucon pèlerin, outarde houbara, grande outarde et outarde canepetière. • Au titre de la classe des reptiles : tortue grecque, fouette-queue, varan du désert. En guise de petite conclusion à ces prohibitions visant la chasse et ce que cette activité peut engendrer comme dommages pour le patrimoine cynégétique et les espèces animales menacées de disparition, nous pouvons dire qu'il est temps d'éradiquer les endroits où l'on pratique à des fins lucratives l'élevage et la vente de toutes les espèces animales en voie d'extinction !
3-Peines sancionnant les infractions aus prohibitions douanières environnementales Nonobstant les sanctions prévues par d'autres textes, notamment le code des douanes et le code maritime, toutes les lois citées ci-dessus ont édicté des peines sanctionnant les infractions à leurs dispositions. Ces peines, qui varient d'une infraction à une autre, d'une composante de l'environnement à une autre et du degré de protection que le législateur veut assurer à chacune des composantes de l'environnement, consistent en des amendes et en des peines privatives de liberté. Dans certains cas, il est prévu également la saisie du corps du délit. Certaines peines sont d'une sévérité exemplaire ce qui est de nature à dissuader les gens de porter atteinte à l'environnement.Pour de plus amples informations concernant toutes ces peines, il convient de se référer au texte visé ci-dessus. Conclusion : Bien que les agents des douanes soient en vertu du code des douanes et de la loi n° 03-10 du 19 juillet 2003 relative à la protection de l'environnement dans le cadre du développement durable compétents pour rechercher et constater les infractions à leurs dispositions, certaines lois environnementales n'habilitent pas expressément ces agents à agir dans ce sens. C'est le cas notamment de la loi n° 01-11 du 3 juillet 2001 relative à la pêche et à l'aquaculture et de la loi n° 02-02 du 5 février 2002 relative à la protection et à la valorisation du littoral. Il serait souhaitable que les départements ministériels concernés pallient ces lacunes en initiant des textes modificatifs. Par ailleurs, l'exercice par la douane de ses nombreuses et diverses missions concernant notamment l'économie, la fiscalité, l'environnement, la propriété intellectuelle, la sécurité, la santé, le tourisme, le patrimoine culturel et artistique, la chasse, la pêche, les règles d'origine, la métrologie, les télécommunications, l'information, la normalisation, la colombophilie civile, etc., implique de doter cette administration, rempart de l'économie nationale et partenaire des entreprises, en moyens légaux, financiers, matériels et humains suffisants. En effet, sans ces moyens tout à fait légitimes et avec de surcroît 1200 kilomètres de côtes, un territoire faisant 2 381 741 km⊃2;, des frontières longues de 7000 kilomètres environ et sept pays voisins (Maroc, Sahara occidental, Mauritanie, Mali, Niger, Libye et Tunisie) dont certains sont permissifs en ce qui concerne l'exercice par leurs sujets de certaines activités dangereuses, l'archaïsme, la dépendance, le favoritisme, l'incompétence, les fraudes de toutes sortes et la corruption dans lesquels se sentent merveilleusement bien les médiocres, les trabendistes et les véreux auront encore de beaux jours dans notre beau pays et, partant, dans cette administration merveilleuse, la douane ! Enfin, dans une optique didactique, il serait souhaitable que cet article soit - dans le cas où il serait publié par El Watan et avec son accord express - reproduit et distribué à nos jeunes douaniers pour qu'ils sachent que leur champ d'intervention, contrairement aux idées répandues, ne se limite pas uniquement au contrôle des voyageurs, leurs bagages et véhicules !