Le gouvernement entend mettre Tonic Emballage sous la coupe du Fonds national de l'investissement (FNI), mis sur pied l'année dernière afin de gérer le financement de certains projets d'investissements publics relevant du secteur productif et accompagner notamment «la détermination des pouvoirs publics à restructurer le secteur économique». Selon certaines indiscrétions proches du FNI, la procédure est enclenchée pour que Tonic Emballage puisse sortir de l'ornière dans laquelle l'entreprise s'était embourbée des années durant. Il semblerait que le gouvernement ne veuille pas faire de remue-ménage. Une réflexion a été engagée «en catimini» sur l'avenir de Tonic Emballage, un investissement de plusieurs milliards de dollars dont l'avenir a été sérieusement lézardé par un scandale dans lequel étaient impliqués des responsables du groupe ainsi que des banquiers de la Banque de l'agriculture et du développement rural (BADR). Si la question du déclin de l'industrie algérienne se pose avec acuité pour l'équipe Ouyahia – 18,5% est la part de l'industrie dans le PIB en 2003 contre 5,3% en 2010 – l'avenir de Tonic Emballage était suspendu depuis plusieurs années à une option susceptible d'épargner à ce complexe d'autres crises qui lui seront éventuellement fatales. «Trois options étaient à l'étude au gouvernement : le rachat du complexe par des opérateurs privés algériens, libérer l'entreprise au profit d'un investisseur étranger, ou bien la nationaliser, mais en accordant la gestion des actifs et du patrimoine à une entité, autre que la BADR», dira notre source. Le choix a été arrêté sur la troisième option. Et c'est le FNI qui devrait racheter, voire gérer les actifs de Tonic Emballage, d'après les mêmes sources. Ce n'est pas la première entreprise publique à être mise sous l'autorité du Fonds national de l'investissement, lequel dispose d'un capital de 150 milliards de dinars appelé à être alimenté par d'autres ressources à l'avenir. L'autre entreprise publique devenue propriété du FNI est le groupe Cosider, qui a vu récemment le changement de son actionnariat au profit de cette structure. Pour le cas de Cosider, c'est la Banque extérieure d'Algérie qui a transformé les créances et les dettes de l'entreprise en prise de participations dans son capital social. Le gouvernement semble ainsi vouloir réussir la même opération avec Tonic Emballage, dont la BADR est le créancier principal. L'objectif premier étant de «restructurer le groupe et permettre de faire tourner à nouveau les machines grâce à un investissement public», dira notre source. Car il semblerait que la BADR, qui a déjà injecté dans le groupe Tonic environ 65 milliards de dinars (près d'un milliard de dollars) sous forme de prêts bancaires, n'est plus en mesure de financer le «redémarrage» de son activité. éviter un remake à la Khalifa Bank L'option de choisir le FNI permettrait d'éviter un remake d'une situation «à la Khalifa Bank» en autorisant la BADR à s'emparer de l'actionnariat de Tonic Emballage et créer une filiale ayant un statut d' EPE. Il est vrai que l'article 104 de la loi de finances complémentaire 2009 est venu lever l'interdiction faite aux banques d'entrer dans le capital des entreprises dans lesquelles elles détiennent des participations, mais les banques ne sont autorisées à les financer désormais qu'à la limite de 25%. Le sauvetage, par l'Etat, du fameux complexe Tonic Emballage ne peut être que salutaire. L'entreprise a connu une situation désastreuse ces dernières années sous l'autorité du liquidateur désigné pour administrer le groupe. Son chiffre d'affaires a connu une chute vertigineuse, passant de 12 milliards de dinars en 2004 à 2 milliards de dinars fin 2008. S'il est vrai que le FNI est appelé à racheter et gérer les créances de Tonic Emballage, estimées à plus de 80 milliards de dinars, la procédure risque d'être lourde. Faut-il appliquer d'abord la faillite prononcée le 22 décembre 2009 pour dix filiales sur les onze composant le groupe Tonic Emballage ? L'Etat s'est montré jusqu'ici réticent sur l'application de la faillite. Environ 820 entreprises publiques en état de faillite sont depuis plusieurs mois suspendues à la décision de l'Etat de mettre en marche la procédure de faillite. Pour Tonic Emballage, le rachat de ses actifs par le FNI pourrait constituer un nouveau départ. Celle-ci nécessite un véritable plan d'investissement pour faire tourner à nouveau ses machines. Une décision qui n'est ni du ressort de l'administrateur judiciaire, encore moins de la BADR qui subissait péniblement la lourdeur des créances.