Histoire ambiguë d'un « mastodonte » mort-né Considérée, durant les premières années suivant sa création, comme le fleuron de l'industrie papetière en Algérie, Tonic Emballage a connu une histoire similaire à celle du bateau Titanic. La société prend eau de toute part. Lancé en 1998, le groupe Tonic (il est composé de 11 sociétés à responsabilité limitée) n'a fonctionné en réalité que huit ans, avant de sombrer dans des problèmes de surendettement et d'incapacité de remboursement. Aujourd'hui, il périclite. Son sort est, semble-t-il, définitivement scellé après la décision de sa mise en faillite prononcée, en juin dernier, par le tribunal commercial de Blida. Résumé de la courte vie d'un géant de l'industrie de l'emballage algérien… L'idée de doter le pays d'un plus grand complexe papetier est à mettre à l'actif d'un jeune entrepreneur algérien, Abdelghani Djerrar. Le projet vise la récupération et le recyclage des déchets industriels et ménagers. La Banque de l'agriculture et du développement rural (BADR) accepte le projet, en accordant à Tonic plus de 65,5 milliards de dinars. Et la réalisation du projet démarre. L'investissement est colossal. Les entreprises ont été réalisées dans deux sites industriels (Bou Ismaïl et Chaïba). En 2005, le groupe emploie 4000 salariés et affiche une capacité de production de 300 000 tonnes par an de produits finis. Durant la même année, le géant montre des signes d'affaiblissement. Il connaîtra alors un cumul de déconvenues : anomalies dans la gestion, incapacité à rembourser les emprunts contractés auprès de la BADR, amoncellement des dettes. Cette situation pousse la banque en question à entreprendre un certain nombre de mesures qui, selon les observateurs, ont freiné l'élan du groupe. L'incarcération, en mai 2005, du PDG du groupe aggrave la situation. Les signes d'un impossible redressement du groupe sont déjà visibles. Même la nomination de deux séquestres judiciaires en 2007 n'a pas favorisé le sauvetage de cet important outil de production. Selon un audit réalisé au début de l'année 2008 par le cabinet français (KBMG), la société Tonic Emballage doit 74,5 milliards de dinars à la BADR, dont 9,1 milliards en guise d'intérêts. Cette situation attise les appétits de certains opérateurs nationaux et étrangers qui songent déjà à racheter l'entreprise. En 2008, selon des informations rapportées par la presse, deux concurrents suivaient le dossier avec beaucoup d'intérêt. Le groupe Cevital et le fonds d'investissement américain Carlyle ont été cités. Ce dernier aurait même envoyé une délégation pour visiter et s'enquérir de la situation sur le site industriel de Tonic Emballage à Bou Ismaïl. Depuis, aucune autre information n'a été donnée sur le sujet. C'est plutôt l'Etat algérien qui s'intéresse à l'usine. Le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, et le ministre des Finances, Karim Djoudi, ont évoqué, à deux reprises, la possibilité de sauver Tonic Emballage. Cependant, aucune action n'est engagée dans ce sens. Au mois d'août dernier, la presse nationale rapporte une information concernant une éventuelle reprise de la société par la BADR. Cette dernière n'a ni confirmé ni infirmé la nouvelle. Du coup, le sort de Tonic Emballage est plus que jamais incertain.