Le journal espagnol El Pais, qui rapporte le câble en question, indique que «les forces armées marocaines sont toujours éclaboussées par la corruption, l'inefficience bureaucratique, leur bas niveau d'éducation, certains de leurs soldats courent le risque de tomber dans le radicalisme, elles sont politiquement marginalisées et le gros de leurs effectifs est déployé au Sahara occidental». WikiLeaks continue de faire tanguer les relations internationales à travers ses câbles dévoilant des documents secrets de la diplomatie américaine. Le Maroc a eu droit lui aussi à sa douche froide. A travers 29 câbles rendus publics par le très controversé site «d'information» WikiLeaks, l'armée marocaine, la lutte antiterroriste, le conflit du Sahara occidental et le dossier du nucléaire algérien ont figuré sur les comptes rendus des diplomates américains à Rabat entre 2005 et 2009. Dans une correspondance classée «secrète» datée du 26 novembre 2006, l'ambassadeur américain en poste à Rabat a mis en évidence que les responsables marocains affichent leur entière adhésion à l'interdiction aux Iraniens d'avoir l'arme nucléaire. Le secrétaire général du ministère marocain des Affaires étrangères, Omar Hilal, soulignait à son interlocuteur américain qu'«un Iran doté de l'arme nucléaire serait un désastre pour la région et spécialement pour le Maroc. Cela donnera court à une course à l'armement dans la région et accélérera la poursuite d'un programme nucléaire militaire algérien similaire». Le secrétaire général des Affaires étrangères marocain poursuivra ses «commentaires» en soulignant à ses interlocuteurs américains que le Maroc est inquiet du «manque de transparence entourant le programme de recherche nucléaire chez ses voisins, et notamment en Algérie». Et de préciser que «si l'Iran réussit son programme dans les dix ans, d'autres pays du Moyen-Orient auront la bombe et les Algériens suivront peu après». Et à Omar Hilal de continuer en invitant la communauté internationale à empêcher le projet iranien en usant de «tous les moyens». Dans un câble daté de l'année 2009, il est souligné le rôle joué par l'Arabie Saoudite afin d'amener le Maroc à couper ses relations avec l'Iran en contrepartie d'un bon approvisionnement en pétrole. Dans des discussions entre diplomates américains et responsables marocains, la coopération de l'Algérie dans la lutte antiterroriste est aussi évoquée. «La coopération avec les Algériens est irrégulière», indique Abdellatif Hamouchi, directeur général pour la surveillance du territoire marocain à l'adresse de l'assistante du président américain pour la sécurité intérieure et l'antiterrorisme, Frances Fragos Townsend. Et à Yassine Mansouri, chef de la direction générale des études et de la documentation (service de contre-espionnage) d'ajouter : «Parfois ils nous fournissent de très bonnes informations et parfois c'est l'impasse. Ce sont des partenaires difficiles», est-il souligné dans une note datée de juillet 2007. Plus encore, dans une autre note, le directeur général des affaires étrangères Youssef Amrani a «suggéré que l'émergence d'AQMI était principalement due aux échecs du gouvernement algérien». Ce à quoi un diplomate américain aurait répondu que «le GSPC a été forcé de s'associer avec AQMI parce que le gouvernement algérien a réussi à le marginaliser». Les plans d'urgence de l'armée marocaine Les responsables marocains rejettent en outre la responsabilité sur leurs homologues algériens de faire barrière à toute tentative de rapprochement entre les deux pays. Dans la note du 31 juillet 2007, Fouad Ali Himma, adjoint du ministre de l'Intérieur, souligne, après un voyage effectué à Alger, que «les efforts marocains répétés pour réduire le fossé diplomatique ont été rejetés. Nous avons dit aux Algériens que le Maroc était prêt à rouvrir sa frontière et à prendre d'autres mesures pour rétablir la confiance, mais les Algériens ne nous ont jamais dit ce qu'ils voulaient». Ceci en mettant cette réponse sur le compte de la différence de générations et de mentalité entre les dirigeants des deux pays. Les câbles WikiLeaks se sont intéressés aussi à l'armée marocaine, dépeinte comme une institution en proie à la corruption et dont les hauts gradés ayant dépassé l'âge de la retraite refusent de céder leur place à la jeune génération. Le journal espagnol El Pais, qui rapporte le câble en question, indique que «les forces armées marocaines sont toujours éclaboussées par la corruption, l'inefficience bureaucratique, leur bas niveau d'éducation, certains de leurs soldats courent le risque de tomber dans le radicalisme, elles sont politiquement marginalisées et le gros de leurs effectifs est déployé au Sahara occidental». C'est un rapport de neuf feuillets que l'ambassadeur américain Thomas Riley élabore en août 2008 sur l'armée marocaine. Comptant 218 000 hommes, dont 70% déployés dans les territoires occupés du Sahara occidental, l'armée marocaine est principalement préoccupée de «contrecarrer toute menace de guerre venant d'Algérie». Le document «secret» précise que cette armée possède des plans d'urgence et s'entraîne en faisant des simulations pour contrer toute attaque algérienne. Le rapport américain indique que nonobstant cette crainte, l'armée marocaine n'a pas déployé de troupes le long de la frontière avec l'Algérie. Les militaires seraient stationnés à des centaines de kilomètres de cette même frontière. Les Américains estiment quant à eux que malgré le froid qui caractérise les relations entre le Maroc et l'Algérie, la crainte de voir une attaque imminente de la part de l'Algérie n'est pas justifiée. Et de noter que dans le cas où une velléité d'attaque se faisait sentir, elle se fera à travers le Front Polisario. Le document, qui fait office de radiographie de l'armée marocaine, fait par ailleurs état d'une méfiance existant entre le palais royal et l'institution militaire. Une méfiance héritée des deux coups d'Etat avortés ayant eu lieu dans les années 1970. Les documents de WikiLeaks rendent aussi public un télégramme émis par le consulat américain de Casablanca dénonçant les «pressions exercées par l'entourage du roi du Maroc pour solliciter des pots-de-vin dans le domaine de l'immobilier».