Considéré comme un sujet tabou, le système d'héritage contenu dans le code de la famille comporte des inégalités flagrantes. D'abord entre les enfants, puisque le fils hérite du double par rapport à la fille, mais également entre les époux. En effet, les parents qui veulent établir une égalité entre leurs enfants ne peuvent utiliser le testament compensatoire au profit des filles faisant partie des héritiers à part fixe incompressible. Si le conjoint survivant est le mari, il hérite de la moitié de ce que l'épouse a laissé en l'absence d'enfant, et au cas où ce dernier existe, il n'en disposera que du quart. La veuve hérite, quant à elle, du quart des biens de son défunt et du huitième au cas où elle n'a pas d'enfant. Les conjoints non musulmans n'héritent pas de leur époux musulman, alors que l'inverse est admis. Des inégalités sont également constatées dans le partage des legs entre les enfants d'un fils ou d'une fille prédécédée. Si une personne meurt en laissant des descendants d'un fils décédé avant ou en même temps qu'elle, ces derniers prennent les lieu et place de leur auteur dans la vocation à la succession du «de cujus». La part revenant aux petits-fils et petites-filles du «de cujus» équivaut à celle qui aurait échu à leur auteur s'il était resté en vie sans qu'elle dépasse toutefois le tiers de la succession. L'héritier mâle reçoit une succession double de celle de l'héritière. Par contre, les enfants de la fille prédécédée ne reçoivent rien de la succession de leur grand-père. Ainsi, ce qui vaut pour les descendants d'un fils prédécédé ne vaut pas pour les petits-enfants de la fille prédécédée : le legs obligatoire institué, en dérogation du droit musulman, pour les petits-enfants par les fils n'a pas été élargi aux petits-enfants par les filles. Les enfants adoptés dans le cadre de la kafala n'ont pas droit à l'héritage. Il en est de même pour les enfants nés hors du mariage, même s'ils sont reconnus par leur père. Selon toujours le code de la famille, les apostats et les anathèmes n'héritent pas. Ce sont là les principales inégalités qui appellent aujourd'hui à une réflexion plus respectueuse des droits. Les bouleversements socioéconomiques qu'a connus le pays laissent apparaître aujourd'hui une tendance de plus en plus forte pour un droit égalitaire entre les hommes et les femmes. Une évolution largement confirmée par les résultats d'une enquête menée en 2008 auprès des adultes et des adolescents. Ainsi, 6 adolescents sur 10 et près de 5 adultes sur 10 sont pour un héritage égalitaire. Dressé par le Ciddef, ce constat sert de matière pour les travaux d'une journée d'études prévue dimanche prochain à Alger, et à laquelle de nombreux juristes ont été conviés. Il est question de préparer un plaidoyer pour une refonte du système de partage de l'héritage, pour le rendre plus harmonieux avec la Constitution et les conventions internationales relatives à la lutte contre les discriminations à l'égard des femmes et celles relatives aux droits politiques de celles-ci.