Dans les quartiers dits sensibles, ou difficiles, là où vit une part de plus en plus grande d'habitants issus de l'immigration, se concentrent aussi des problèmes sociaux majeurs. Un rapport publié jeudi l'indique. Lyon De notre correspondant Pour la première fois, le rapport 2010 de l'Observatoire national des zones urbaines sensibles (Onzus) jette un regard rétrospectif sur les dynamiques de long terme des quartiers des plus grandes agglomérations françaises, en utilisant les données de trois études et recensements successifs : 1990, 1999 et 2006.Il vient d'être présenté au ministre de la Ville, Maurice Leroy. Ce rapport arrive au terme d'une première décennie du XXIe siècle troublée dans les quartiers.Bien sûr, le ministre a mis l'accent sur les chantiers entrepris ces dernières années et les actions positives en cours, mais, d'un long dossier de 3121 pages, on peut tirer quelques enseignements moins rassurants. En 2006, en France métropolitaine, la politique de la ville, née au début des années 1980, concerne 717 Zones urbaines sensibles (ZUS) regroupant 4,15 millions d'habitants (recensement de 2006). A ces habitants, s'ajoutent ceux des quartiers inscrits dans les Contrats urbains de cohésion sociale (Cucs) qui ne sont pas en ZUS.Ces derniers quartiers regroupent environ 3,80 millions d'habitants. Au total, la politique de la ville concernait, en 2006, près d'un habitant sur huit. La part des personnes immigrées est variable et aucune étude sérieuse n'en donne les éléments réels, cependant, l'étude indique «une spécialisation relative des communes à ZUS dans l'accueil de ces populations». Une façon élégante de ne pas prononcer le mot «ghettoïsation». A ce titre, les données de l'Onzus peuvent être un baromètre de la situation générale du vécu de l'immigration dont la composante algérienne est l'une des plus importantes, même si ces dernières décennies de nombreuses origines sont venues créer le melting-pot français. Ainsi, «le chômage touche encore fortement les jeunes en 2009 : 43% des jeunes hommes actifs et 37% des jeunes femmes actives sont au chômage en ZUS. Pour la première fois depuis 2003, les jeunes diplômés sont aussi touchés par le chômage en 2009, alors que jusque-là, le diplôme les protégeait». On touche là à l'un des éléments moteurs de la République, la réussite par le mérite. Cela confirme que l'ascenseur social est vraiment en panne, comme l'avait écrit un écrivain il y a quelques années. Cette étude le démontre… Autre élément troublant, «la situation vis-à-vis du marché du travail des femmes d'origine étrangère est particulièrement difficile. Si on ne tient pas compte de ses caractéristiques d'âge, de diplôme et de nombre d'enfants, une femme d'origine étrangère (fille de parents nés étrangers à l'étranger) a quatre fois moins de chances d'être en emploi lorsqu'elle habite dans une ZUS que lorsqu'elle habite ailleurs». Ces caractéristiques prises en compte, le rapport de chances est ramené à 1,6. Plus alarmant encore, la question des revenus. Tous les indicateurs utilisés pour juger de la situation des habitants des quartiers de la politique de ville confirment la précarité de leur situation. En 2007, le revenu fiscal moyen par unité de consommation des habitants des ZUS métropolitaines s'élève à 56% de celui des habitants de leurs unités urbaines. On a bien lu, moins de la moitié ! Au niveau des caisses d'allocations familiales (CAF), plus d'un allocataire sur quatre de ces quartiers appartient à une famille monoparentale, et 18% des allocataires y perçoivent le Revenu minimum d'insertion (RMI), soit deux fois plus que la moyenne métropolitaine. Le taux d'allocataires à bas revenus est, en outre, plus de deux fois supérieur à celui observé globalement en France, non compris les départements et territoires d'outre-mer. En 2008 également, la part des personnes vivant en-dessous du seuil de pauvreté à 60% est 2,4 fois plus élevée en ZUS qu'ailleurs. Pourtant, là aussi a contrario des effets médiatiques, en 2009 le taux de délinquance globale en ZUS, avec 52,9 faits constatés pour 1000 habitants reste inférieur à celui de leur circonscription de sécurité publique (CSP) où il s'établit à 55,5 faits constatés pour 1000 habitants. Il a, en outre, diminué de 11% entre 2005 et 2009, alors que cette baisse était de 15% sur l'ensemble des CSP. La catégorie des délits les plus en baisse est l'atteinte aux biens. En 2009, dans les ZUS, le taux est inférieur de 8% à celui de leur CSP. Les atteintes aux biens ont, en outre, baissé de près de 15% depuis 2005. Par contre, le taux d'atteinte aux personnes est supérieur de 11% et il a augmenté dans ces quartiers de 7% depuis 2005. Un sondage de l'Onzus révèle, par ailleurs, qu'en ZUS, pour 25% des ménages interrogés en 2010, le principal problème du quartier est la délinquance, puis viennent la mauvaise image du quartier et les dangers de la circulation. Comme quoi, personne n'est dupe !