Journaliste et romancier, H'mida Ayachi renoue, à partir de ce mois de février, avec le 4e art en proposant d'adapter sur les planches du théâtre de Sidi Bel Abbès un texte consacré à Hassan Ibn Sabbah, La forteresse d'Alamùt (*). La générale est prévue le 10 avril dans le cadre de «Tlemcen, capitale de la culture islamique» . -Après la pièce Noun, un huis clos entre morts-vivants, que proposez-vous, cette fois-ci, à travers La forteresse d'Alamùt ? C'est d'abord l'histoire de trois figures emblématiques du monde musulman. Celle d'un poète mathématicien, Omar El Khayam, d'un homme politique qui finira assassiné, Nizam El Mulk, et du créateur et chef absolu, Hassan Ibn Sabbah. Celle d'une secte qui fera bien des émules, plusieurs siècles après et encore de nos jours. Et enfin, celle de leur pacte légendaire : «Celui d'entre nous qui atteindra la gloire ou la fortune devra partager à égalité avec les deux autres.» En arrière-plan, c'est l'idéologie ismaélite qui est explorée dans le sens d'une meilleure compréhension de tous les schismes qui ont marqué le monde musulman. Dans le texte, la dimension historique du personnage central, Hassan Ibn Sabbah, est reléguée au second plan. Il s'agit surtout de mettre en avant une problématique, toujours actuelle : comment le pouvoir spirituel a-t-il été utilisé pour des besoins de prise de pouvoir ? -Vous proposez une lecture de votre texte, début février, à Sidi Bel Abbès où sera mise en chantier votre pièce… En fait, le texte n'est pas encore finalisé. C'est un long cheminement, et l'idée de monter sur scène La forteresse d'Alamùt ne date pas d'aujourd'hui. J'ai commencé à travailler sur ce sujet, comme ont tenté de le faire beaucoup d'autres avant moi, depuis une bonne quinzaine d'années. Aujourd'hui, le projet est arrivé à maturité et sera mis en scène par Azzedine Abbar avec qui j'ai eu à travailler dans Habil et Habil (1997) et Noun (2009). Comme dans la plupart des pièces montées par le théâtre de Sidi Bel Abbès, ces dernières années, la démarche choisie consiste à favoriser une mise en perspective scénique collective à même d'explorer un maximum de pistes susceptibles d'engendrer l'œuvre finale. Pour les comédiens qui interprèteront la dizaine de personnages que compte l'histoire, le choix s'est porté, à quelques exceptions près, sur la même équipe qui a joué dans Chadaya, meilleur spectacle lors du dernier Festival national du théâtre qui s'est tenu à Alger. -Un intérêt grandissant est accordé à l'ismaïlisme et à son dérivé polico-spirituel, la secte des Assassins, en Occident, notamment après les attaques contre les deux tours du World Trade Center. Ne cherchez-vous pas à en donner une explication différente de celle des Occidentaux ? Ce serait plutôt orgueilleux, de ma part, de résumer le pourquoi et le comment d'un mouvement qui a, a priori, contribué à renforcer une idéologie aujourd'hui dominante dans le monde et à largement justifier ce qu'on appelle «la lutte contre le terrorisme». Ma démarche demeure purement artistique. Alamùt, la secte des Assassins, Ibn Sabbah sont souvent associés à la violence, l'intrigue, mais tout en dégageant un sulfureux parfum de romantisme exotique. Le reste, tout le reste, ne sert qu'à justifier ou à rejeter les idées et les méthodes d'acteurs principaux dans l'évolution du monde musulman. -Dans l'ébauche du texte à partir duquel se dessine la pièce, vous évoquez le rôle des Fatimides dans la conquête de l'Egypte. Quelle relation avec l'Algérie d'aujourd'hui ? L'histoire de la secte des Assassins est liée à celle de l'ismaélisme, mouvement réformateur de l'Islam issu du chiisme. Le califat fatimide d'Egypte en assura durant deux siècles l'expression politique. Oui, il s'agit d'une pièce avec en toile de fond l'Algérie.