Des milliers de personnes s'entassent à la frontière tuniso-libyenne en attendant d'être rapatriées. Egyptiens, Bangladeshis et Africains, avec femmes et enfants, sont livrés au froid et à la faim. Le PAM réclame un plan d'aide mondial et met en garde contre «un désastre humanitaire». El Gueddafi promet des milliers de morts si les Occidentaux déclenchaient une attaque contre lui. L'entêtement du colonel El Gueddafi à rester au pouvoir risque de provoquer une catastrophe humanitaire sans précédent. La frontière tuniso-libyenne est devenue au fil des jours le point de chute de milliers de personnes fuyant les balles des sbires d'un guide en folie. Egyptiens, Bangladeshis, Africains et bien sûr des Libyens craignant pour leur vie s'y sont réfugiés en attendant qu'un hypothétique moyen de rapatriement vers chez eux puisse être trouvé. Les images et les photos en provenance de cette frontière font craindre le pire, tant les besoins alimentaires sont sans commune mesure avec ces foules qui y affluent chaque jour. Le Programme alimentaire mondial (PAM) a déjà tiré la sonnette d'alarme contre un «désastre humanitaire». Les baluchons de la peur Pour cause, les opérations de rapatriement de ces personnes de différentes nationalités se font au pas de charge, alors que les capacités d'accueil saturées sur place s'avèrent limitées par rapport au nombre sans cesse grandissant des réfugiés. Valises, cartons et baluchons sur la tête, des milliers de personnes, dont des femmes et des enfants, s'impatientent à quitter l'enfer d'El Gueddafi pour rejoindre la Tunisie, plus ou moins convalescente. Un réflexe de survie qui ne semble pas inquiéter le guide en déclin, qui dans un discours teinté d'arrogance et dénué d'humanité, a promis de provoquer un massacre de milliers de personnes si les Occidentaux menaient une attaque contre ce qui reste de son régime. Une telle menace de la part d'un mégalomane semble être bien prise au sérieux. Hier, la directrice du PAM, Josette Sheeran, a annoncé un plan d'aide alimentaire d'urgence de 38,7 millions de dollars (28 millions d'euros) visant 2,7 millions de personnes en Libye, en Egypte et en Tunisie. «En réponse à la crise régionale (...), nous planifions une opération d'urgence de trois mois qui aidera à assurer la sécurité alimentaire égyptienne et tunisienne et nous achèterons aussi de la nourriture dans la région pour nous assurer que la situation se rétablisse immédiatement», a-t-elle déclaré. Mme Sheeran s'est rendue mardi à la frontière entre la Tunisie et la Libye : «J'étais entourée par des dizaines de milliers de personnes fuyant la violence. Il est clair que le monde doit accroître l'action humanitaire pour empêcher un désastre à l'intérieur de la Libye», estime-t-elle. Le SOS du PAM et du HCR «Nous demandons un accès humanitaire immédiat et sécurisé, particulièrement dans l'ouest de la Libye. La suppression de l'approvisionnement en nourriture ne doit pas être utilisée comme une arme», a-t-elle mis en garde. «Il y a deux crises immédiates sur lesquelles le PAM agit : le besoin urgent en nourriture de ceux qui fuient la Libye et traversent les frontières vers la Tunisie et l'Egypte, et la menace posée aux systèmes de distribution de nourriture, particulièrement en Libye, où les stocks sont épuisés et les chaînes d'approvisionnement sont perturbées», a expliqué Mme Sheeran. «Je me suis engagée à apporter le soutien du PAM au Croissant-Rouge et à d'autres organisations pour fournir une aide alimentaire à ceux qui fuient la violence et à préparer ce qui pourrait être nécessaire dans les jours et les semaines qui suivent en Libye», a-t-elle insisté. «Nous appelons le monde entier à apporter son soutien immédiat à cet appel», a-t-elle conclu. Cet appel pressant du PAM se conjugue à ceux des autres organisations humanitaires internationales qui mettent en garde contre un drame humain sur la frontière tuniso-libyenne. Le HCR a renouvelé l'appel urgent lancé la veille pour que «des moyens financiers et logistiques massifs dont des avions, des bateaux et du personnel spécialisé» participent à l'effort d'évacuation. Les autorités tunisiennes non encore remises des conséquences de la Révolution du jasmin font face à des foules de réfugiés largement au-dessus des moyens disponibles au poste frontière de Ras Jedir. Et entre le souci d'aider les persécutés d'El Gueddafi et l'impossibilité de prendre en charge tout le monde, la catastrophe humanitaire n'est pas loin.