Comparativement à ceux enregistrés par les pays voisins, y compris la Mauritanie, les chiffres de production avancés par les gens de la mer et les aquaculteurs participant au séminaire sur la pêche et l'aquaculture, organisé mardi dernier à Annaba par la société Algeria Fish Service & Consultancy, montrent que l'Algérie est tout à fait au bas du tableau en matière de pêche et d'aquaculture. Certains participants ont qualifié ces 2 activités comme étant marginales malgré des eaux très poissonneuses en mer et des tentatives de développement de l'aquaculture. Des technocrates du ministère et des directions, les animateurs de la Chambre algérienne et celles locales, les experts et les scientifiques nationaux et étrangers, les armateurs ainsi que les patrons de pêche ont participé à cette rencontre. Tous ou presque ont affirmé que le secteur de la pêche dans notre pays est « une bouillabaisse propre à mécontenter tout le monde, y compris les animateurs de la réparation navale, conserveurs, exportateurs et les consommateurs ». Les représentants des différentes régions côtières d'Algérie ont souligné la gravité de la situation. Même si, a-t-on précisé, les premières assises nationales sur le secteur de la pêche tenues à Sidi Fredj (Alger) les 6 et 7 février 2005 sont porteuses d'espoir. Dans les coulisses de ce séminaire, l'on a parlé de bateaux, sardiniers, petits métiers à l'arrêt pour moult problèmes techniques et financiers, de l'absence presque totale de thoniers, de conservation et d'exportation. D'une côte algérienne à une autre, certains ont soulevé l'indisponibilité des équipements d'accastillage, de communication et les difficultés d'avitaillement, notamment les carburants. Selon eux, l'armement va mal par tous les bords et les chalutiers qui, il y a quelques années paraissaient être l'avenir pour ceux qui y ont investi, accusent eux aussi d'énormes déficits. Reste le thon. Ils ne sont que 2 thoniers à travers tout le littoral national à activer dans cette filière du secteur de la pêche. Annuellement, ils produisent 800 tonnes sur les 1700 autorisées pour les Algériens par l'organisme international Iccat chargé d'arrêter les quotas par pays. En Algérie, elle semble être toujours à l'état embryonnaire. Les 800 tonnes de thon produits par les Algériens sont le résultat d'un partenariat avec une firme japonaise. Cette situation est confirmée par M. Djeffal, le représentant du ministère de la Pêche : « En 2004, l'Algérie a eu recours à 2 opérateurs japonais pour capturer 800 tonnes sur les 1700 qui lui sont imparties par l'Iccat. » Dans ce marasme quelque peu perturbé par les aides financières accordées dans un cadre ou un autre de l'Etat au profit de ceux intéressés par la pêche ou l'aquaculture, des participants ont affirmé qu'il existe des lueurs d'espoir. Les premières assises nationales sur le secteur de la pêche en ont livré quelques-unes. A l'exemple de la mise en place de, outre de la Chambre nationale de la pêche et de l'aquaculture, d'une institution financière destinée au financement des projets en pêche et aquaculture, du conseil national consultatif, du comité sectoriel permanent de la recherche scientifique et du développement technologique et la mise en place de la Société des ports de pêche. Bien que les décideurs aient été absents à ce séminaire de Annaba, la volonté de rechercher de nouveaux types de relation entre l'administration, les gens de la mer et les aquaculteurs était perceptible. Quatre conférenciers dont 3 étrangers ont été sollicités pour expliquer l'expérience de leur pays en matière de : expérience maltaise de l'engraissement du thon rouge et la mise en place de ferme de thon en Algérie. Faisabilités et rentabilités des projets en aquaculture. Mise aux normes des ports, des bateaux de pêche, ateliers de conditionnement et d'export. Il s'agit de respectivement MM. Fatt Etienne de la société Ajd Tuna Farm de l'île de Malte, premier producteur et exportateur mondial de thon rouge, son compatriote Shane A. Hunter de la société algéro-maltaise Aquabiotech./Malte Algeria, aux côtés de son associé algérien Mounir Chiheb et du Tunisien Slim Tritar de la Bic Tunisie. expériences vécues Leurs interventions ont été principalement axées sur l'étude et le suivi des projets en aquaculture marine et en aquaculture d'eau douce, études des sites et leurs potentialités, audits de gestion des systèmes aquacoles, du développement de l'aquaculture en mer ouverte, élevage des crevettes, des systèmes aquacoles à circuit fermé et d'impact sur l'environnement. Comme ils ont également abordé différentes expériences vécues dans le domaine de la mise aux normes européenne des chalutiers et des thoniers, l'aquaculture marine (poissons et coquillages bivalves), la purification et le traitement des coquillages (palourdes, moules et huîtres), le traitement et le conditionnement des produits de la mer et de l'aquaculture, le programme d'autocontrôle HACCP et manuel de procédures des établissements agroalimentaires. L'engraissement du thon et les complexes frigorifiques, les chalutiers, la pêche en haute mer et dans des fermes d'élevage de loup et de daurade ont complété le programme des interventions. Du côté algérien, l'on s'est longuement attardé sur les dernières actions déjà réalisées par le ministère de la Pêche et des Ressources halieutiques tels la campagne d'évaluation de la ressource halieutique et les études des sites aquacoles potentiels comme celui de Guelma, l'évaluation du stock corallifère de la côte algérienne et du projet hauturier algéro-mauritanien, la modernisation de la halle à marée d'Alger et la création de 2 fermes pilotes aux CNPDA par des Espagnols. En aparté, des participants au séminaire ont soulevé la question de la saturation et l'insécurité des ports de pêche en Algérie, les concessions marines et terrestres pour l'aquaculture et le blocage des banques quant aux financements des projets destinés au développement des activités de la pêche et de l'aquaculture. Ce dernier aspect a été quelque peu clarifié par le représentant du ministère de la Pêche qui a indiqué : « L'investissement dans les thoniers est considéré comme lourd. Néanmoins, nous avons décidé de recourir à l'investissement soutenu. C'est-à-dire soutenir financièrement les privés à hauteur de 60% pour l'acquisition de thoniers. En effet, avec cette formule, nous avons pu acquérir 2 thoniers. Trois autres sont en cours de réalisation. » A également participé à cette rencontre où un hommage lui a été rendu pour les efforts qu'il a consentis pour une meilleure maîtrise en Algérie des activités marines, M. Abdelhamid Aberkane, ancien ministre et ancien recteur de l'université Badji Mokhtar, à l'origine de la création en 1983 du département de la biologie marine à Annaba.