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De Shanghai à La Casbah, la route de la soie industrielle
L'immigration chinoise à Alger
Publié dans El Watan le 05 - 12 - 2005

Elle sait dire bonjour, merci et compter les dizaines jusqu'à cent en arabe. Li ne croit donc pas au bonheur, mais à la « vie tranquille et mieux ». Elle et ses collègues font partie désormais du tissu urbain algérien au point de faire dire à M. Wang Lei, vice-directeur du département d'outre-mer relevant de la Société générale de construction de Chine, qu'« en Algérie, le visage d'un Chinois peut même être considéré comme un permis spécial.
Nous pouvons fréquenter des endroits spéciaux sans autorisation spéciale ». Assertions largement diffusées par le site web de l'ambassade chinoise à Alger.Ils sont partout », comme dit un tenant de taxiphone mitoyen du magasin, laissant transparaître une légère, mais tenace appréhension de l'autre, de celui qui vient de loin et qui nous est étranger dans les coutumes, le paraître, la langue, etc. Pourtant, leur voisin algérien trouve que « les Chinois sont corrects. Ils ouvrent et ferment leur boutique aux mêmes heures, ils disent bonjour en arabe. Et durant le Ramadhan, bien qu'ils ne le jeûnent pas, ils ont respecté les Algériens en s'abstenant de manger des sandwichs dans leur magasin... ». Li est arrivée à Alger depuis presque une année, avec trois de ses proches, des amis avec lesquels elles vivaient dans la banlieue nord de Pékin. Là-bas aussi elle travaillait, comme ses voisins âgés de 30, 28 et 25 ans, comme vendeuse dans un magasin de vêtements, tenu par un gérant proche de son père. Le textile chinois a envahi le monde entier. A Liberté, l'ancien ministre, Réda Hamiani, patron de la marque de chemise Redman, dira : « La couverture des besoins du marché en matière de vêtements va passer de 29 à 50% rien qu'aux Etats-Unis. » En Europe comme en Afrique du Nord, notamment en Tunisie, l'industrie du textile est entrée en pleine récession. Li ne culpabilise pas. Elle est venu chercher son « vivre tranquille et mieux », comme les millions d'êtres humains qui enfourchent l'aventure de l'immigration. « Notre monde est de plus en plus peuplé d'étrangers », disait un commentateur de presse européen.
Gazouz et dragons
Difficile de la faire parler de sa vie dans la banlieue de la capitale de l'Empire du Milieu. « Ici, ça va. Le commerce marche bien, des fois on gagne le double », dit-elle après deux tours entre les articles (nappes, rideaux, robes d'intérieur, robes chinoises avec dragons séculaires brodées...) aidée d'une femme âgée que Li appelle de temps en temps « hadja ». « ça se passe bien avec les Algériens, surtout les vieilles femmes », commente Li. « Ils sont éduqués, ne parlent pas beaucoup et on ne sent pas qu'ils vont vous arnaquer, contrairement à certains de nos frères », renseigne la dame âgée occupée à comparer des nappes. Pourquoi avoir choisi l'Algérie ? « On ne choisit pas. On connaît des gens qui sont venus, alors on vient pour gagner notre vie, c'est tout », dit-elle. Depuis une année, Li a appris beaucoup de choses sur le pays d'accueil. D'abord, il fallait s'adapter aux modes culinaires : « En Chine, on aime la limonade au point de la mélanger au vin, mais ici vous consommez beaucoup, beaucoup de ‘‘gazouz'', c'est bizarre... ». La cuisine chinoise s'articule autour de mets peu fréquents en Méditerranée que les Algériens peuvent découvrir dans les restaurants chinois, tenus par des Algériens. Mais le restaurant reste cher. « On cuisine en improvisant, on fait des mélanges des deux cuisines parfois avec ce qu'on peut trouver. On se réserve les plats bien chinois pour les fêtes », explique Li. Dans le F4 loué dans la rue Hassiba Ben Bouali, à quelques centaines de mètres du magasin, Li s'est aménagée son espace. L'appartement est occupé par les six employés, plus le gérant, plus âgé, qui se contente de demander à Li de traduire en souriant : « ça va bien ici et on a tous les papiers. » Li attend la venue de son mari, qui vit toujours dans la banlieue pékinoise et travaille dans la même boutique qu'elle a quittée voilà un an. L'appartement traduit un souci d'ergonomie de gestion de l'espace : lits superposés, cuisine bien rangée, affaires ordonnées en cartons couverts d'idéogrammes chinois. Elle garde précisément dans sa chambre des photos de famille. « Des fois, on sort en groupe pour faire un tour. Je ne connais pas très bien la ville, elle est désorganisée et à part les taxis, on ne trouve pas d'autres transports », raconte la jeune femme. Quelles loisirs avait-elle en Chine ? « Se promener dans les jardins et manger avec des amis », répond-elle. Pendant ces balades algéroises, elle dit rencontrer parfois d'autres compatriotes, dont des travailleurs du bâtiment qui, selon elle, « vivent plus durement » et arrondissent, pour certains, leurs fins de mois en travaillant au noir le soir dans des chantiers chez des particuliers. Les grands chantiers algériens de travaux publics et de logements sont tenus par une vingtaine de groupes chinois. Une insertion dans le champ du travail national qui ne s'est pas déroulé sans couac. D'abord des syndicats algériens, dont l'UGTA, se sont étonné d'une telle sollicitation de main-d'œuvre étrangère avec un chômage national plafonnant les 30%. Les pouvoirs publics ont avancé l'argument de la compétitivité et de l'ouverture des marchés. Par ailleurs, l'on a connu en Algérie des soulèvements d'ouvriers chinois : retard dans le paiement des salaires, retard dans le transfert de sommes vers leurs familles en Chine, mauvaises conditions de vie. Officiellement, la Chine a présenté ses excuses et a parlé d'« actes d'anarchie ». Les ouvriers coléreux ont été rapatriés et tout semble être rentré dans l'ordre. Pour l'instant.
À quand Chinatown ?
Comme en Europe ou aux Etats-Unis, l'immigration chinoise autonomise son peuplement en quartiers spécifiques : naissent alors les China town's. Même perspective à Alger ? Apparemment, pas pour le moment. La dynamique en cercles concentriques d'expansion de l'Empire du Milieu suit des trajectoires linéaires à Alger, investissant les rues marchandes. On n'assiste pas encore à une concentration ethnico-urbaine. « Alger n'est pas déterminée par strates sociales ou ethniques bien définies, c'est une ville complètement improvisée au lendemain de l'Indépendance en 1962 », explique Habib, étudiant architecte à l'EPAU. Pour un collègue de Li, qui a accepté qu'elle nous traduise ses dires, « l'important est de vivre sans problème avec les autres (les Algériens) ». Ces derniers se montrent effectivement suspicieux à l'égard de cette immigration qu'on qualifie de « massive ». Mais une frange des nationaux se montre plus ouvert : les tenants de l'informel. Que ce soit sur les trottoirs de Belouizdad, au marché de Boumaâti à El Harrach ou à Djamaâ Lihoud dans La Basse-Casbah, les Algériens rencontrent des dizaines de Chinois et Chinoises, étalant vêtements, accessoires de cuisines, jouets, tissus... aux côtés des marchands informels nationaux. Et pas seulement à côté. Avec plutôt.
L'Empire des milieux d'affaires
Les réseaux de commerce informel algériens, spécifiquement la branche textile, se sont développés autant en Algérie qu'à l'étranger, notamment au Moyen-Orient (Syrie) et en Asie (Chine). Un expatrié algérien, étudiant en musique à Shanghai en visite chez sa famille en Algérie, explique que plusieurs sociétés d'import-export gérées par des Algériens en association avec des Chinois ont pignon sur rue depuis le début des années 1990 dans ce port, l'un des plus grands points de convergence et de passages des échanges mondiaux. Le made in China reste donc assez habituel de la sphère commerciale algérienne. A Djamaâ Lihoud, des Chinoises travaillent avec des Algériens autour des étals de tissus (nappes, rideaux, étoffes, etc.). Souvent, l'informel vient également en réponse aux insuffisances des performances des produits de l'institutionnalisation des échanges mondiaux. « Tout est en règle chez nous. Regardez les papiers, voilà le registre du commerce, les papiers des impôts, les factures... », s'empresse de nous dire un gérant chinois d'un magasin d'articles de textile sur la rue Didouche Mourad. « Nous ne sommes pas des contrôleurs », nous répondons avant d'éclaircir nos échanges verbaux grâce au secours d'un dictionnaire français-chinois posé devant la caisse. « Nous on est bien ici, sauf que... », commence le plus jeune des cinq vendeurs, en jean et marcel. « Vous les Algériens, vous n'êtes pas organisés, quand on a un rendez-vous avec un client important ou dans un bureau, les gens viennent en retard », poursuit-il. Comptent-ils s'installer en Algérie ? « Pourquoi pas, le commerce marche et l'argent circule bien », dit le gérant avec un large sourire en rangeant ses documents administratifs plastifiés qu'il garde comme de précieux sésames. Dans le magasin, il rencontre d'autres Chinois qui prospectent pour louer un appartement au centre-ville. Ils rigolent. « Ils sont tombés sur un restaurant chinois qui fait de la bonne bouffe et tenu par un... Kabyle, ça fait bizarre », explique le gérant. Le soir tombe sur la ville, et la rue Hassiba Ben Bouali est quasi déserte. Li et ses camarades baissent le rideau du magasin et s'apprêtent à rentrer chez eux. Nuit. Même avec le décalage horaire, 19 h, il fait aussi nuit au nord de Pékin.


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