La protection des consommateurs, érigée en véritable religion dans les pays où la citoyenneté veut dire quelque chose, est devenue chez nous un plat virtuel, froid, sans saveur. Officiellement, il existe chez nous tout un arsenal juridique des plus sévères pour protéger les consommateurs contre les appétits voraces des commerçants mais aussi, en amont, au niveau de la sphère de production. Les produits non contrôlés empruntent les circuits insondables de l'économie informelle qui sont paradoxalement bien plus rodés et structurés que l'économie licite et officielle. Ce mal ronge à petit feu les économies des pays émergents, transformées en dépotoirs des usines de fabrication de bric et de broc du Nord, déstructurant les systèmes économiques en place et menaçant dangereusement la santé publique. Dans notre pays, les pouvoirs publics ne peuvent pas plaider l'ignorance devant un phénomène qui se déroule au nez et à la barbe des services du contrôle de la qualité et de la répression des fraudes, en ne craignant plus d'étaler ses quartiers parfois jusque devant les commissariats de police. Les commerçants à la sauvette, qui ont investi les trottoirs de nos rues et ruelles, proposent aux clients toutes sortes de produits qui font fi d'un principe de base en la matière : la traçabilité du produit. Il faut bien l'avouer, l'Algérien est protégé par la baraka. Car avec tous les produits douteux qui atterrissent dans son assiette, où même ceux censés être sains et contrôlés ne sont pas exempts de reproches, on a du mal à s'expliquer par quel miracle l'Algérie n'a pas été affectée par une catastrophe sanitaire liée à son « modèle » de consommation. Des chauffages électriques et autres chauffe-bains contrefaits qui se transforment en véritables engins de la mort, des pièces détachées pour véhicules non homologuées et présentant, par conséquent, un danger mortel pour leurs propriétaires et les usagers de la route, des cosmétiques qui peuvent réserver parfois bien des surprises à l'utilisateur... Il n'est pas un domaine ou un produit qui n'échappent pas aux lois implacables des contrefacteurs et autres fraudeurs de tous poils, qui se jouent impunément de la santé et de la sécurité des citoyens. L'éthique commerciale a totalement déserté le marché, livrant le consommateur pieds et poings liés aux marchands de la mort qui opèrent en toute quiétude et impunité. La question se pose de savoir d'où les tenants de l'économie informelle tiennent-ils donc leur toute-puissance. Pour être efficaces, les actions de protection et de défense du consommateur doivent être menées d'abord en amont en luttant contre les barons de l'économie informelle, grands et petits, qui nourrissent et alimentent le marché parallèle.