Alors que l'issue de la guerre en Libye reste encore indécise, l'Occident poursuit ses enquêtes pour tenter d'identifier où se trouve véritablement la fortune du clan El Gueddafi et à combien elle se monte réellement. La semaine dernière, la presse française a rapporté l'information selon laquelle les banques et institutions financières libyennes détenaient 8,233 milliards de dollars de dépôts et de créances auprès des banques françaises au 31 septembre 2010, d'après des statistiques de la Banque de France. Les banques françaises détenaient aussi 298 millions de dollars (210,7 millions d'euros) placés par des clients libyens particuliers. Toutefois, selon Le Figaro, il est impossible de savoir quelle partie des 8,233 milliards est contrôlée directement ou indirectement par le régime de Kadhafi tant il s'agit de données anonymes transmises par les banques françaises à la BdF. Selon des spécialistes cités par le journal, si la Banque centrale de Libye a effectué des placements en France, ceux-ci devraient être compris dans l'enveloppe des 8,2 milliards, mais il est difficile de déterminer si l'argent du fonds souverain libyen LIA (Libyan investment authority) y figure. D'autre part, la forme de ces fonds d'origine libyenne reste inconnue et les spécialistes estiment qu'ils regroupent habituellement des dépôts de liquidités, des fonds en actions, des prêts interbancaires, ou encore des financements obligataires. L'ensemble de cette enveloppe ne représenterait que «0,23% de tous les engagements des banques françaises vis-à-vis de l'étranger, soit 1767 milliards de dollars», selon des experts français. La Libye figurerait ainsi au 23e rang des encours d'origine étrangère des banques françaises, derrière le Portugal et devant le Danemark. LIA, le «bras politico-financier» d'el Gueddafi Les chiffres de la BdF ne recouvrent toutefois pas tous les investissements en provenance de Libye. Ils ne prennent pas en compte par exemple les prises de participations dans des groupes cotés ou les investissements immobiliers. Dans ce cadre, le fonds souverain national se trouve sous le feu des sanctions internationales et certains se demandent même si ses fonds sont toujours en France. Le Figaro cite des sources selon lesquelles les fonds libyens ont été l'objet d'une «réorganisation de périmètre» en 2010 et qu'elles «n'étaient pas achevées lors de la fermeture de l'ambassade de France en Libye, le 26 février dernier». Entre mars et septembre 2010, «la Banque de France a enregistré des retraits de fonds libyens à hauteur de presque 800 millions de dollars», précise-t-on. Le fonds souverain libyen, alimenté par les revenus du pétrole, détiendrait plus de 75 milliards de dollars, placés sur tous les continents dont 7 milliards en Europe. Additionné aux réserves de la banque centrale de Libye, «le pactole s'élèverait à 150 milliards de dollars», d'après le journal français. Selon Ubifrance, la LIA fait d'abord office de «bras politico-financier du gouvernement sur le plan national, régional et international». Certains de ses investissements sont stratégiques, comme ses 5% dans la banque italienne Unicredit. Le Fonds a pour objectif de «contribuer à la diversification des revenus de la Nation et réaliser les meilleurs retours sur investissement possibles tout en minimisant les fluctuations de revenus», d'après un document de présentation officiel. En 2009, la filiale purement financière du Fonds, le Long-Term Investment Portfolio, à savoir le portefeuille d'investissements à long terme, aurait investi près de 7 milliards d'euros en Europe, dont 5 milliards en France, selon un document publié en avril 2009 par Ubifrance. Il se serait agi notamment de prises de participations dans de grands groupes du Cac 40 comme Alstom, EDF, Total, ou encore France Télécom, d'après la même source. Notons qu'au niveau européen, les établissements britanniques hébergent, d'après les chiffres de la Banque d'Angleterre, 13,587 milliards de dollars d'origine libyenne et en Allemagne, les banques gèrent 6,175 milliards d'euros originaires de banques libyennes, d'après la Bundesbank. Les Etats-Unis ont bloqué dès le 1er mars près de 30 milliards de dollars appartenant indistinctement au clan El Gueddafi, au LIA et à la Banque centrale libyenne.