De nombreux jeunes employés perçoivent les payes que leur octroie l'Etat tout en restant chez eux ou en travaillant ailleurs, au noir bien entendu. A la direction de l'Emploi, l'on ne semble pas ignorer ces machinations. Plusieurs contrats du dispositif d'aide à l'insertion professionnelle (DAIP), mis en application en juin 2008, sont utilisés frauduleusement par les demandeurs d'emploi. En effet, ils sont des dizaines, peut-être des centaines, à bénéficier d'un contrat DAIP sans pour autant se présenter à leur lieu de travail. Ceci se fait avec la complicité des employeurs qui, malgré l'absence des recrutés, remettent une fiche de présence signée aux agences locales de l'emploi (ALEM). Ainsi, de nombreux jeunes employés perçoivent les payes que leur octroie l'Etat tout en restant chez eux ou en travaillant ailleurs, au noir bien entendu, souvent dans les commerces informels ou encore dans des chantiers. De leurs côtés, les patrons profitent des avantages liés aux réductions fiscales et parafiscales. «Un diplômé de ma promotion est orienté dans une agence de communication, mais il n'y va pas parce qu'ils sont déjà assez nombreux à y travailler» témoigne un jeune citoyen. «Mon ami ne se présente pas à son travail, car il n'aime pas le poste qu'on lui a attribué. Il s'est inscrit au dispositif juste pour avoir la sécurité sociale» raconte un autre. L'objectif étant le salaire, l'assurance ou l'enrichissement du curriculum vitae, des cas similaires sont aussi nombreux que différents. Ce genre de fraude est plus fréquent chez les entreprises privées. Cependant, les établissements publics et les entreprises étatiques ne sont pas tout à fait épargnés. Pour les demandeurs d'emploi, l'astuce est simple : il suffit de solliciter un gérant d'une entreprise ou alors d'avoir une sympathie avec un responsable dans une société nationale afin de se mettre d'accord avec lui. «Un tas de jeunes gens viennent me demander de les inscrire dans le cadre du DAIP mais ils n'ont pas l'intention d'oeuvrer» nous dit un libraire. «Chaque jour, il y a une personne qui veut que je le fasse profiter du dispositif» ajoute un propriétaire d'une pharmacie. La wilaya de Béjaïa a connu ces pratiques lors surtout des recrutements de la main-d'œuvre, effectués par les APC, pour une période de six mois. A la direction de l'Emploi de Béjaïa, l'on ne semble pas ignorer ces machinations, mais il n'est pas facile de vérifier la véracité d'un contrat. «Nous ne disposons pas de moyens nécessaires pour contrôler tous les employés» nous déclare M. Mouhoub, directeur de l'Emploi. Bien que le DAIP ne figure pas dans la loi 90/011 régissant le monde du travail, le recrutement fictif n'en est pas moins illégal. Pour contrer ce dernier, les employeurs ne doivent pas choisir les chômeurs nommément. C'est à l'ALEM de leur affecter un demandeur d'emploi ayant un CV qui répond aux exigences du recruteur potentiel. Mais il y a un manque d'osmose entre la direction de la wilaya et les agences locales d'emploi. Celles-ci tolèrent des dépassements. D'après nos sources, le fichier des demandeurs d'emploi est rarement respecté. Certains chômeurs ont passé plus d'entretien que d'autres, alors qu'ils ont les mêmes qualifications. Nous avons appris, dans un autre volet, que les salaires sont revalorisés depuis le mois de mars dernier. Les mensualités sont passées de 12 300 à 15 000 dinars pour les contrats d'insertion des diplômés (CID), de 8 000 à 10 000 dinars pour les contrats d'insertion professionnelle (CIP) et de 6 000 à 8 000 dinars pour les contrats de formation/insertion (CFI). La durée d'un contrat CID passera d'une année renouvelable à trois ans et celui des secteurs économiques sera désormais renouvelable. Ses réformes risquent tout de même d'accentuer le phénomène de l'emploi fictif si l'on fait rien pour le contrecarrer.