Le programme présidentiel de construction de 13 centres de cure et de désintoxication ainsi que 53 structures légères peine à avancer. La loi au bénéfice du toxicomane», tel était le thème choisi pour une journée d'information sur la toxicomanie en Algérie, organisée samedi, par la direction du centre hospitalo-universitaire, Nedir Mohammed de Tizi Ouzou. Une problématique qui a créé des divergences entre praticiens et différents intervenants dans la lutte contre la toxicomanie. Considérer le toxicomane comme étant un malade implique la mise en place d'une législation qui définit clairement le profil des toxicomanes et le renforcement des capacités médicales en matière d'infrastructure et de personnel. Pour ce faire, le législateur algérien a mis en place un dispositif juridique, la loi numéro 04-18 du 25/12/2004 relative à la prévention et à la répression de l'usage et le trafic de stupéfiants et de substances psychotropes pour permettre la prise en charge médicale du patient. Néanmoins, ce dispositif se heurt à deux difficultés. Il s'agit, notamment, du manque d'infrastructure d'accueil pour les toxicomanes et un besoin pressant des intervenants, dans le domaine, de disposer d'une meilleure compréhension des textes de loi pour la mise en application des prédispositions du procédé de lutte contre la drogue qui est basée sur le triptyque : prévention, soins et répression. Commentant la loi 04-18, Pr Ziri, docent en psychiatrie et néanmoins directeur général du CHU Mohamed-Nedir, dit : «Nous, praticiens, pensons qu'il y a eu une amélioration par rapport à l'ancien texte. La loi 04-18 est positive, si on l'analyse en fonction de la réalité du terrain socioculturel algérien. D'autant plus, elle a évolué de la répression à la médicalisation de la prise en charge. Ça, c'est l'aspect positif sur le plan juridique». Mais à la question de connaître les limites de cette loi et les contraintes qui l'opposent sur le terrain, notre interlocuteur, qui est également expert agrée auprès des tribunaux regrette : «Le problème qui se pose maintenant est l'application de cette loi dans certaines zones du pays». Il affirme «qu'il y a des régions qui ne disposent que d'hôpitaux généraux. Et parfois ces structures n'inexistantes, comme c'est le cas dans le sud algérien» C'est là, toute la difficulté que retrouvent les praticiens et les magistrats dans l'application de cette loi sur le terrain. «Aujourd'hui, il n'y a que deux grands centres de désintoxication notamment ceux de Sidi Chami et celui de Blida», ajoute notre vis-à-vis. Evaluant la situation de la toxicomanie en Algérie, le psychiatre se retient d'avancer un chiffre, mais estime : «Le phénomène de la toxicomanie existe en Algérie, mais il n'est pas aussi alarmant qu'on le dit. Certes, il n'y a pas de chiffres exacts qui reflètent la réalité du phénomène sur le terrain, exceptés les chiffres qui émanent des services de sécurité et des centres de désintoxications de Blida ou de Sidi Chami.» Ceci étant dit, le praticien ne cache pas son inquiétude quant à la recrudescence du phénomène ces dernières années. En outre, les intervenants dans cette journée d'étude ont insisté sur la nécessité pour la justice de distinguer entre différentes catégories de toxicomanes. «La justice doit porter un regard subtil sur ce phénomène pour distinguer entre un dealer, un récidiviste et un individu nécessitant un traitement thérapeutique», de l'avis d'un intervenant. Par ailleurs, le programme présidentiel qui consiste en la construction de 13 centres de cures et de désintoxication et 53 structures légères, peine à avancer. Pourtant, ajoute le Pr Ziri, ce ne sont pas les financements qui manquent, mais on évoque le problème de rareté du foncier, mais aussi, conclut-il, un manque de volonté.En plus des ces infrastructures d'accueil qui doivent venir en appoint au dispositif juridique mis en place, Pr Ziri, plaide pour le travail d'information et de sensibilisation dans la lutte contre la toxicomanie. Il dira à ce propos : «La véritable prise en charge doit résider en amont comme le travail d'information et de sensibilisation dans les écoles, au sein de la famille pour empêcher la rencontre du sujet avec la drogue». A noter que la rencontre qui a connu la présence d'imminents praticiens, dont des étrangers, a été boudée par les magistrats et les représentants des services de sécurité dont la présence ne pouvait qu'enrichir les débats.