«Nous sommes pour le changement du gouvernement. Ce changement est nécessaire», a déclaré Abdelaziz Belkhadem, secrétaire général du FLN, invité, mercredi soir, de l'émission «Hiwar Essaâ» (Débat de l'heure), diffusée par l'ENTV et présentée par Thouria Zerfaoui. Cela ressemble à une déclaration de guerre du FLN à Ahmed Ouyahia, actuel Premier ministre et successeur de Abdelaziz Belkhadem à ce poste depuis plus de trois ans. Le SG du FLN, qui est membre du gouvernement en tant que «représentant personnel du Président», a reconnu que certains ministres ont failli à leur mission. Se tire-t-il une balle dans le pied ? Ou s'agit-il d'une tentative de s'adapter à l'évolution du temps ? D'après lui, chaque responsable doit être soumis à un contrôle. «On doit demander des comptes aux responsables, l'élu est comptable devant celui qui l'a élu. C'est un principe de la bonne gouvernance», a-t-il estimé. Mais le représentant personnel du président de la République a rejoint Ahmed Ouyahia en disant qu'il n'existe pas de crise politique en Algérie. Sauf que la persistance des contestations sociales actuelles risquent, d'après lui, d'avoir des retombées politiques. A ses dires, les logements que l'Etat construits et les postes d'emploi créés par les pouvoirs publics ne profitent pas à ceux qui sont dans le besoin. Il s'est contenté de dresser le constat. Sans plus. «Nous ne trouvons pas justifiée la demande de dissolution du Parlement. Il n'y a pas d'affrontement entre l'Exécutif et le pouvoir législatif. Nous avons une majorité et nous tenons à la garder», a-t-il dit. «Il est prématuré de parler du départ du président Bouteflika. Le Président a encore trois ans à accomplir de son mandat», a-t-il déclaré. A ses yeux, il existe sur la scène politique «une fièvre» pour la présidentielle anticipée. Belkhadem, qui, il y a quatre mois, affirmait que Bouteflika serait le candidat du FLN en 2014, n'a pas dit si le chef de l'Etat sera en course après la fin de son troisième mandat ou non. Le premier responsable de l'ex-parti unique s'est dit favorable à des réformes politiques. Quel est le contenu de ces réformes ? «Révision de la Constitution, de la loi électorale, de la loi sur les partis, de la loi sur les associations et de la loi sur l'information. Cela nécessite la participation de tout le monde», a-t-il répondu. Aucune trace d'un quelconque appel à un changement du régime. «Revoir la constitution» Les réformes politiques doivent, selon lui, être menées par le chef de l'Etat «à l'intérieur des institutions». Sans consultation de la population ? Belkhadem ne l'a pas dit. Il a rappelé que le FLN a commencé à évoquer la nécessité de réviser la Constitution depuis 2006. «Bien avant les troubles de janvier 2011 et bien avant ce qui est appelé les révolutions arabes. Nous ne sommes plus dans la situation des années 1990. D'où la nécessité de revoir la Constitution», a-t-il dit. Selon lui, l'actuelle loi fondamentale, votée en 1996 et amendée en 2008, n'est ni parlementaire ni présidentielle. «Il y a un problème avec le système semi-présidentiel. Car le pouvoir ne se partage pas. Il faut sortir de cette ambiguïté. Mon opinion est que le système parlementaire est le plus proche de la justesse en ce sens que les électeurs restent fidèles, dans leurs convictions, à leurs partis et pas à leurs régions», a-t-il expliqué. «Avant d'avoir cette culture, on doit adopter le système présidentiel comme celui qui existe aux Etats-Unis et au Brésil», a-t-il préconisé en plaidant pour un véritable contre-pouvoir parlementaire. Pour Belkhadem, le ministre de l'Intérieur, Daho Ould Kablia, doit avoir ses propres arguments pour ne pas donner des agréments à de nouveaux partis depuis 1999. Il ne trouve pas que cet interdit est contraire à la loi et à la Constitution. Trouble ou révolution ? «Pour le principe, nous sommes pour l'ouverture de l'espace politique à tout le monde», a-t-il soutenu. La libération des ondes se fera, selon lui, tôt au tard. «Mais les conditions actuelles ne sont pas favorables à l'ouverture du champ audiovisuel. La relation dialectique existant entre le pouvoir, les milieux financiers et ceux des médias peut entraîner le pays dans la tourmente», a-t-il affirmé. Il s'est, par contre, livré à une attaque de ce qu'il a appelé «les temples de la démocratie» en critiquant le licenciement par la chaîne américaine CNN de deux journalistes, dont Octavia Nasr qui a, sur Twitter, regretté le décès de Hussein Fadlallah, l'un des chefs du Hezbollah libanais. Le FLN veut maintenir l'Alliance présidentielle telle qu'elle est. «Nous avons dit au MSP que nous n'étions pas favorables à la création d'un partenariat. La mission de l'Alliance présidentielle est d'appliquer le programme du président de la République et d'assurer la stabilité politique. Et chaque parti garde son autonomie», a-t-il dit en réponse à Bouguerra Soltani, responsable du parti islamiste, qui a relancé, dernièrement, l'idée de promouvoir l'Alliance en «partenariat politique». Il n'y a pas, selon Belkhadem, une crise au sein du FLN. Il a évoqué la volonté de certaines personnes d'avoir des positions de direction. Revenant sur les révoltes populaires qui secouent plusieurs pays arabes, Abdelaziz Belkhadem, ancien ministre des Affaires étrangères, a tenté de minimiser l'ampleur des événements. «En Algérie, nous avons une haute idée de la révolution. La révolution doit avoir une orientation, des objectifs et une direction», a-t-il assuré. «Personne ne dit que les troubles d'Octobre 1988 en Algérie étaient une révolution. Pourtant la population avait manifesté dans la rue», a-t-il ajouté. Les propos de Belkhadem ne sont pas loin de ceux d'Ahmed Ouyahia qui, lors du conseil national du RND, le 7 avril, a déclaré que «l'Algérie a vécu, 20 ans avant ce jour, son printemps démocratique». Ces déclarations expliquent, au moins, pourquoi la position officielle de l'Algérie sur les révoltes populaires arabes contre les dictatures est floue, ambiguë et molle.