Les ministres de l'Intérieur et de la Communication se sont entendus visiblement pour ouvrir le feu, hier sur les ondes de la radio d'Etat, sur les premières recommandations du rapporteur spécial de l'ONU sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'expression et d'opinion, Frank La Rue, présentées dimanche 17 avril, lors d'une conférence de presse à Alger. «Des déclarations inopportunes», a dit Daho Ould Kablia. «Le rapporteur de l'ONU a été victime de l'intox», a enchaîné Nacer Mehal. Le ministre de la Communication n'a pas précisé «l'origine» ou «la nature» de ce qu'il a appelé «l'intox». «Nous n'avons pas encore reçu les recommandations du rapporteur», a-t-il ajouté. Pourtant, Frank La Rue a rendu publiques ses premières conclusions devant les journalistes et des représentants du ministère des Affaires étrangères. La communication est-elle à ce point en panne au sein du gouvernement ? Nacer Mehal, qui «n'a pas reçu les recommandations», a, tout de même, pris soin de répondre à Frank La Rue sur les demandes de visas et les accréditations pour les journalistes étrangers. «Toutes les demandes de visas et d'accréditations ont été satisfaites», a dit Nacer Mehal. Des responsables de chaînes étrangères telles que BBC Arabic ou ABC peuvent dire au ministre de vérifier avec ses services si ce qu'il affirme est de la pure vérité. Frank La Rue a annoncé que le rapport final sera rendu public en 2012 à Genève. Il a, dans son premier rapport, critiqué les conditions restrictives imposées par les autorités aux manifestations publiques, à l'agrément des partis, des syndicats et des associations ainsi qu'à l'accès aux médias dit publics. Des médias qui ont passé sous silence ces critiques. N'empêche, Daho Ould Kablia ne résiste pas à la tentation de faire dans l'humour. «La Constitution algérienne accorde le maximum de libertés qui peuvent ne pas exister dans d'autres pays. Des pays qui nous donnent la leçon aujourd'hui. Il s'agit de la liberté de conscience, la liberté syndicale, la liberté d'expression, la liberté de réunion, la liberté d'association. Il y avait eu peut-être une petite restriction avec l'application de l'état d'urgence. Maintenant que cet état d'urgence a été levé, toutes ces libertés vont être restaurées et l'accès aux médias également autorisé et encouragé», a-t-il dit sur les ondes de la Chaîne III. Les syndicats, partis, associations attendent que ces «libertés» soient «restaurées», après avoir été mises entre parenthèses (l'aveu de Daho Ould Kablia est de taille), pour marcher librement et pacifiquement dans les rues des villes algériennes, s'exprimer à la radio et à la télévision que financent le contribuable…