L'initiative est venue d'un groupe de députés d'El Islah. Elle est faite sous forme d'une loi qui incrimine la colonisation française (1830-1962). Son contenu a été livré à la presse nationale, hier, à l'APN par son principal concepteur : Abdessalem Kessel, député d'El Islah (parti minoritaire au sein de la Chambre basse). Elle contient 27 articles. Elle est répertoriée en sept chapitres : la classification de la colonisation, la définition des crimes, la reconnaissance, le pardon, l'indemnisation et enfin l'hommage à la mémoire. Dans l'exposé des motifs, les initiateurs de cette loi ont insisté sur l'atrocité de « la présence française » en Algérie, traduite par les massacres, les génocides et la torture pratiquée à grande échelle par l'armée coloniale. Après ce bref rappel historique du visage hideux de la colonisation française, les initiateurs de cette loi ont évoqué les « nouveaux » dépassements de l'ancien colonisateur qui « est encouragé par le silence de l'Algérie colonisée et de ses ayants droit ». Cette loi, qui sera soumise ces jours-ci aux autres députés pour débat et enrichissement, a classifié les crimes coloniaux en cinq catégories : crimes contre l'humanité, crimes contre les droits humains, crimes contre les libertés, crimes contre les acquis, crimes contre la pensée, la civilisation et la société. Les auteurs de cette loi ont énuméré onze crimes contre l'humanité commis par le colonisateur français, notamment les massacres collectifs, les exécutions extrajudiciaires, les essais nucléaires, la torture sous toutes ses formes... Les parlementaires auront à intervenir pour l'enrichir. M. Kessel a expliqué que ce n'est là qu'« une ébauche » qui subirait toutes « les chirurgies » possibles et nécessaires pour arriver à une « formule complète » qui contiendra la réponse définitive à l'ancien colonisateur et à l'Etat français actuel, appelé, plus que jamais, à faire son acte de repentance. M. Kessel estime que le Parlement algérien doit prendre ses responsabilités et répondre de « la meilleure manière » au Parlement français qui a voté une loi aussi « indécente » que celle du 23 février 2005. Mais les autres députés vont-ils suivre et aller jusqu'à adopter cette loi ? M. Kessel semble convaincu que l'ensemble des députés partage « l'idée » d'une loi de ce genre. Il estime ainsi que cette initiative a toutes les chances d'être concrétisée en « une loi bien mûrie ». Il est à rappeler que l'APN avait déjà condamné, à deux reprises, la loi française du 23 février qui glorifie l'œuvre coloniale en outre-mer, notamment en Afrique du Nord. Le bureau de l'APN a pondu une résolution, le 3 décembre, dans laquelle il s'est élevé contre les dispositions de cette loi. Il a soutenu : « Le système colonial en Algérie, qui a porté l'aliénation des populations algériennes à ses limites extrêmes, ne peut s'enorgueillir d'aucun « rôle positif », son « œuvre accomplie » étant d'abord celle d'un génocide identitaire (...). » Le bureau de l'APN a jugé que « cette loi va à contresens des valeurs de justice et des principes universels dont la nation française s'est pourtant fait le défenseur et le porte-étendard ». Aussi, il trouve que cette loi est « hautement dommageable au processus en cours de préparation d'un traité qui devait sceller l'amitié retrouvée des peuples algérien et français ». C'est à cet effet qu'il se considère plus que jamais « mobilisé » pour contrecarrer les objectifs tant avoués qu'inavoués de cette loi. C'est dire aussi que l'initiative des députés d'El Islah pourrait avoir un écho favorable au sein des autres groupes parlementaires. Surtout que tous les partis algériens ont dénoncé cette loi.