La mouvance islamiste, dont le MSP et El Islah, continue son forcing pour bloquer les amendements du code de la famille. Après ses différentes sorties sur le terrain par la tenue de mini-rassemblements pour dresser un sévère réquisitoire contre l'avant-projet de loi modifiant et complétant la loi n°84-11 portant code de la famille. Le groupe d'El Islah a organisé hier au siège de l'APN une journée parlementaire dans le but, selon M. Bounechrah, chef du groupe parlementaire de ce parti, de « sensibiliser les députés et dire qu'on veut toucher une citadelle de la charia islamique à la veille du mois de Ramadhan ainsi que celle de la célébration du 50e anniversaire du déclenchement de la Révolution ». Mais également, selon notre interlocuteur, « pour répondre aux laïcs qui saluent ces amendements ». Dans son intervention lors de cette rencontre, à laquelle sont invités en plus des députés, certains oulémas comme Abderahmane Chibane, ex-président de l'Association des oulémas musulmans, des avocats et des théologiens, le premier vice-président du parti de Djaballah, Abdelghafour Saïdi, a soutenu que le gouvernement est déterminé à faire passer les amendements du code. Il n'a pas lésiné sur les mots pour fustiger vigoureusement le projet de loi qualifié de « contraire à l'islam, à la famille et à la société algérienne ». Pour M. Saïdi, les concepteurs de ces amendements « prétendent réparer une injustice sur la femme alors qu'en réalité ils ne font que la consacrer ». Il s'interroge si ce n'est pas au contraire pour « déshonorer » la femme qu'on veut la suppression du tutorat. « Ces amendements sont l'apanage d'une minorité occidentale et vont dans le même sens que les accords de Pékin en 1995 », regrettera encore M. Saïdi qui a estimé que faire dépendre la polygamie du juge aggraverait plus le célibat. Lui succédant, Abderahmane Chibane, en se référant à l'exégète El Sabouni selon lequel la polygamie « est une nécessité dictée par la vie humaine », il dira que « celle-ci est même l'une des fiertés de l'islam ». L'interdiction de la polygamie, selon l'orateur, favoriserait le divorce. Les invités d'El Islah ont voulu justifier par tous les arguments « les dangers » que pourrait constituer le code amendé s'il venait à passer à l'APN. Déterminé, le mouvement de Djaballah promet son blocage avant même qu'il atterrisse en Conseil des ministres. « Nous sommes prêts à faire une révolution pour le faire bloquer », dira un représentant d'El Islah. Le député du MSP, Fateh Guerd, autre opposant farouche à la nouvelle mouture du code, considère quant à lui qu'ils (les opposants à ce code, ndlr) ont réussi à bloquer le code tel qu'il est amendé. M. Guerd argumente ses propos par « l'écartement du code de l'ordre du jour du Conseil des ministres » qui devrait se tenir aujourd'hui. Autre indice confortant le « recul » sur ces amendements, selon M. Guerd, « les déclarations du Haut Conseil islamique et le communiqué des zaouïas et des ibadites qui affirment leur opposition aux amendements ». A une question sur l'éventualité d'un recours à un référendum pour faire passer ce code, notre interlocuteur dira qu'« on ne parlera de cette possibilité qu'en cas de doute de la majorité au sein du peuple ». M. Guerd estime que le ministre de la Justice a été « dupé » par le courant laïque, tout en regrettant que les conclusions de la commission qui a travaillé pour l'élaboration du nouveau code n'émanent pas d'elle. Le député du MSP considère que le président de la Cour suprême « n'est pas habilité à statuer sur la conformité et l'authenticité des amendements des lois avec la charia et, dans ce cas, on ne peut pas proposer des amendements quand on ne connaît pas les fondements légaux ». Afin de signifier, semble-t-il, qu'il y a bien une adhésion autour du rejet des amendements en question, M. Guerd révèle qu'en plus d'El Islah, « le FLN aussi rejettera les amendements ». Pour lui, la seule différence entre les deux partis est que « le FLN fait pression sur les centres de décision pour bloquer ce code, alors que le MSP le fait par la base ».