L'opposition yéménite a appelé hier à «arrêter le massacre» après la mort, en 24 heures, de dix-neuf manifestants hostiles au président Ali Abdallah Saleh. Hier, la situation était extrêmement tendue aux abords de la place du Changement, épicentre de la contestation contre le régime. Le général Ali Mohsen Al Ahmar, commandant de la région nord-est qui comprend Sanaa, rallié depuis mars aux contestataires, a déployé des renforts en armes et en véhicules blindés autour de la place, selon des témoins. Les forces du général Al Ahmar contrôlent ainsi le nord et l'ouest de la capitale, alors que les forces fidèles au président Saleh tiennent le reste de la ville. Par ailleurs, à Bayda (210 km au sud-est de Sanaa), 3 contestataires qui déchiraient des portraits du président Saleh ont été tués par des tireurs postés sur le toit du siège du Congrès populaire général (CPG, parti au pouvoir), selon des témoins et l'opposition. Les forces de sécurité ont également ouvert le feu pour disperser des manifestants hier à Taëz (250 km au sud de Sanaa), faisant des dizaines de blessés, selon des témoins et des sources médicales. Ces nouveaux décès portent à 19 le nombre de personnes tuées en 24 heures au Yémen. Le bilan le plus lourd a été enregistré à Sanaa, où les forces de sécurité ont dispersé, mercredi, des milliers de manifestants, en ouvrant le feu, tuant 12 d'entre eux et blessant près de 230, selon des sources médicales citées par les médias. La répression du mouvement de protestation réclamant le départ de M. Saleh, au pouvoir depuis près de 33 ans, a fait au moins 176 morts depuis fin janvier, selon un bilan établi à partir de sources médicales et de sécurité yéménites. Face à la violence du régime, l'opposition parlementaire a appelé hier «les pays du Golfe, la Ligue arabe et ‘‘nos'' amis en Europe et en Amérique à intervenir pour arrêter les massacres commis par les forces de Saleh contre les manifestants pacifiques à Sanaa, Taëz et Hodeida». Et d'ajouter : «Ce sang versé ne fera que renforcer la détermination des jeunes Yéménites à réaliser leur revendication première, qui est la chute du régime.» Condamnations internationales Le ministère français des Affaires étrangères a «déploré et condamné l'usage excessif de la force contre les manifestants», et appelé «les autorités yéménites à tenir les engagements maintes fois réitérés au plus haut niveau de protéger les manifestants». Les Etats-Unis ont, eux aussi, condamné hier la violence du régime yéménite et appelé à ce que s'engage «immédiatement» la transition dans le pays, a écrit Mark Toner, porte-parole du département d'Etat dans un communiqué. Les Etats-Unis «saluent les efforts du Conseil de coopération du Golfe pour parvenir à un accord bénéfique au peuple yéménite», poursuit le communiqué. Les dirigeants des monarchies du CCG avaient proposé un plan de sortie de crise pour le Yémen, prévoyant la formation par l'opposition d'un gouvernement de réconciliation et la démission, un mois plus tard, de M. Saleh, en échange de son immunité, puis une élection présidentielle dans les 60 jours. Un plan rejeté par M. Saleh qui s'apprête à masser aujourd'hui, comme chaque semaine depuis le début de la crise, ses partisans à Sanaa pour une «Journée de l'unité» alors que les contestataires ont appelé à une «Journée de la détermination».