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Un site historique à l'abandon
Aït El Kaid (Ouadhias)
Publié dans El Watan le 17 - 12 - 2005

D'importants sites historiques, d'une valeur archéologique inestimable, éparpillés dans différentes régions de la Kabylie sont livrés à la destruction des hommes et aux aléas de la nature.
Lieux de mémoire et d'histoire depuis plusieurs siècles, Aït El'Kaïd (situé à 50 km à l'extrême sud de la wilaya de Tizi Ouzou, dans la commune d'Agouni Gueghrane à Ouadhias) figure parmi les nombreux sites qui risquent de sombrer définitivement dans l'oubli. De ce hameau perché sur un rocher, dominant à la fois le majestueux mont du Djurdjura et la vaste plaine des Iwadhiyen, il ne reste en effet, aujourd'hui, que des ruines. Construit par des hommes qui se sont révoltés contre l'impôt imposé par les occupants ottomans, le nom de ce village perdu en montagne évoque « l'assassinat d'un caïd, que la population a adopté au départ, mais qu'elle a éliminé à cause des dépassements provoqués à leur encontre par les hommes qui l'accompagnaient », raconte l'histoire populaire. Cette tradition de la résistance contre l'ennemi est restée intacte durant les 130 années de la colonisation française, dont les dépassements contre la population locale sont connus par tous. Mais Aït El'Kaïd offre aujourd'hui l'image d'un village fantôme. Il a été déserté par ses habitants, au lendemain de l'indépendance de l'Algérie en 1962. Depuis, la plupart des maisons n'ont pas résisté à la colère de la nature qui les rasait les unes après les autres. Les rares demeures qui tiennent encore debout sont celles qui sont toujours occupées par des familles qui affirment ne pas avoir d'autres choix. « Après 1962, la majorité des familles est partie s'installer ailleurs, dans les grandes villes où les conditions de vie sont meilleures. Les familles pauvres pataugent encore dans la misère au sein d'un village qui meurt en silence », explique M. Bachouche, responsable et animateur à la maison de jeunes du centre-ville de Ouadhias. Ce dernier nous indique toutefois que l'un des derniers témoins de l'histoire d'un village, qui a marqué des générations d'hommes et de femmes, habite toujours une petite et authentique maison kabyle, construite en pierres, d'argile et de bois. C'est Tassaâdit et elle est âgée de 65 ans. Elle a l'allure d'une jeune femme et elle a la mémoire encore vive. Les traces d'un passé tumultueux et d'un présent plus douloureux sont visibles sur son visage ridé. Comme la plupart des vieilles femmes kabyles, elle a refusé d'aller vivre dans une maison construite en béton. Une virée, en sa compagnie, dans les ruelles étroites du village d'Aït El'Kaïd s'avère riche en histoire. Entre une anecdote et une autre, elle récite un poème, en signe d'hommage aux héros de la guerre de Libération nationale. « Ces poèmes, je les ai de ma défunte mère. C'est elle qui m'a raconté aussi beaucoup de choses sur le quotidien des villageois avant la déclenchement de la guerre en 1954 », déclare Tassaâdit, en précisant que « les femmes ont joué un rôle important durant la guerre. C'étaient elles qui cuisinaient, soignaient les blessés et prévenaient les moudjahidine de la présence des soldats français dans le village. Comme les hommes, elles ont subi toutes sortes d'humiliations et ont été soumises à la torture. » Tassaâdit regrette amèrement que les nouvelles générations n'éprouvent pas d'intérêt pour la sauvegarde de la mémoire collective, la base de la construction d'une identité forte de l'individu.« L'intérêt de la plupart des gens est orienté vers l'enrichissement matériel. Les liens de solidarité entre les citoyens sont brisés au fil du temps. Sinon, personne n'aurait laissé sa maison à la merci des voleurs et des destructeurs qui pillent et saccagent tout ce qu'ils trouvent devant eux », se plaint-elle, le regard rivé sur une bâtisse dont il ne reste qu'un mur qui menace ruine. « Cette demeure a servi pendant la révolution d'abri pour les moudjahidine avant que l'armée française ne les découvre, suite aux renseignements fournis par certaines personnes », raconte-t-elle. « Il ne sert à rien aujourd'hui de réveiller les vieux démons. Le mieux c'est de voir comment construire un meilleur avenir pour nos enfants », ajoute-t-elle, avant de se diriger vers une autre maison qui donne l'impression de tenir encore pour longtemps. A l'intérieur, il règne un silence religieux. Les motifs et dessins inscrits sur les murs ont tous disparu. « Cette maison a été occupée par un lieutenant français et quelques-uns de ses soldats, parce qu'elle offre une meilleure vue sur la rivière où passent les moudjahidine pour rejoindre leurs camarades en montagne », dit-elle, en laissant couler quelques larmes, signes forts de sa nostalgie pour un endroit qui a marqué son enfance tourmentée par l'atrocité de la guerre.
L'administration aux abonnés absents
A quelques mètres de là, Tassaâdit désigne une maison complètement affaissée. « C'est à l'intérieur que les soldats français torturaient les prisonniers de guerre », indique-t-elle en montrant, au coin, les débris d'un générateur du courant électrique, moyen utilisé pour faire parler les moudjahidine lors des interrogatoires. « Mais comment peut-on raconter toutes ses histoires à nos enfants si l'on ne restaure pas toutes ses maisons qui ont vu passer de grands hommes ? », s'interroge-t-elle, non sans omettre de rappeler le passage des célèbres personnalités comme Kateb Yacine, accompagné de quelques jeunes venus prendre des photos, et Lounis Aït Menguellet qui a tourné certains de ses clips à Aït El'Kaïd. Au milieu de ce dédale de ruelles étroites et de maisons qui résistent encore aux vicissitudes du temps, Tassaâdit a tenu à nous montrer la mosquée du village qui avait été transformée en bureaux par l'administration coloniale. Arrivée sur les lieux, la vieille observe un moment de silence avant de s'indigner contre le mépris affiché par les responsables de l'Algérie indépendante envers ce qu'elle considère comme un repère pour l'avenir. « L'Etat a de tout temps oublié notre village. La preuve, ce n'est qu'en 1990 que nous avons été branchés au réseau électrique, alors que l'eau arrive rarement dans nos robinets même en hiver. Ce qui ne m'étonne pas de voir les maisons se vider de leurs occupants les unes après les autres », déclare son fils, travailleur journalier et père de deux enfants scolarisés. Tassaâdit qui a hérité de la sagesse de ses ancêtres, estime qu' « il est encore possible de sortir ce site de l'oubli et lui reconnaître la valeur historique ,et le rôle qu'il a assumé durant 7 ans de guerre ». A ce propos, une demande a été formulée au wali de Tizi Ouzou, lors de sa visite au printemps dernier dans la daïra de Ouadhias, demandant la restauration du village d'Aït El'Kaïd et son inscription en tant que patrimoine national historique et archéologique, auprès des autorités gouvernementales. Une commission d'archéologues, envoyée par la wilaya s'est déplacée, après la visite du wali, pour une enquête approfondie et dresser un état des lieux. Tassaâdit affirme les avoir reçus pendant une semaine. A Aït El'Kaïd, les habitants affirment que leurs doléances se font toujours attendre. Contactés pour d'amples informations sur ce sujet, les responsables de la direction de la culture de la wilaya de Tizi Ouzou ont manqué au rendez-vous. « Les archéologues qui peuvent vous recevoir sont sortis en mission ! », nous dit-on au téléphone. En attendant une réelle prise en charge du site d'Aït El'Kaïd, Tassaâdit regarde, impuissante, ces maisons qui l'entourent s'affaisser les unes après les autres, déclare aâmi Rabah, un sexagénaire qui garde en lui les séquelles de la guerre de libération et qui se désole aujourd'hui du mépris affiché à l'encontre de la sauvegarde de l'histoire de notre pays.


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