Les Palestiniens ont toujours su identifier leurs ennemis. Il y a ceux qui les ont obligés à prendre les armes pour leur avoir imposé une guerre. Ce sont ensuite ces notions pour le moins abstraites, mais fondamentalement importantes car elles font partie de l'adversité et là il s'agit principalement de l'oubli. Le combattre, constate-t-on, pour ne pas disparaître. C'est d'ailleurs ce qui leur a permis de préserver leur existence en tant que peuple, alors même que le monde a cessé d'en parler dès 1949 et même avant, n'évoquant, quand il était pressé de le faire, que les Arabes de Palestine et les réfugiés au lendemain de la guerre de juin 1967. Une notion indéfinissable sans pour autant être neutre. Elle ne l'a jamais été et encore moins de nos jours, puisqu'Israël cherche toujours à effacer toute trace des Palestiniens. C'est le but recherché à travers le processus de spoliation et, pour ceux des Palestiniens vivant en Israël, des sanctions si jamais ils joignaient leurs voix à celles de tous les autres Palestiniens pour commémorer la Nakba, en d'autres termes la catastrophe provoquée par l'occupation de leurs terres à la suite de la création d'Israël en 1948. Les Palestiniens entretiennent un riche calendrier pour sauvegarder la mémoire. Plus de 760 000 Palestiniens ont été chassés de leurs terres, il y a 63 ans. Ce sont des réfugiés installés principalement dans les pays de la région et leur retour, un des points majeurs de toute négociation israélo-palestinienne, se heurte au refus israélien. Aujourd'hui, l'ONU les estime à quelque 4,7 millions avec leurs descendants. Ils ont même fait l'objet d'une résolution, la 194, que l'ONU a prise dès le début du conflit au Proche-Orient. Elle a été adoptée le 11 décembre 1948 et renouvelée chaque année. Elle reconnaît leur droit au retour puisqu'elle dispose que «les réfugiés qui désirent rentrer dans leurs foyers et vivre en paix avec leurs voisins devraient y être autorisés le plus vite possible». Tous les gouvernements israéliens se sont opposés à l'application du droit au retour. Plus grave que cela est ce que l'on pourrait appeler l'exil par décret. Israël a en effet révoqué, jusqu'en 1994, le droit de résidence de 140 000 Palestiniens de Cisjordanie ayant séjourné à l'étranger au moyen d'une procédure confidentielle, mais tout aussi arbitraire. Ce qui représente pas moins de 14% de la population de Cisjordanie. Du début de l'occupation de la Cisjordanie après la guerre de 1967 jusqu'au début de l'application des accords d'autonomie palestinienne en 1994, les Palestiniens qui souhaitaient se rendre à l'étranger via la Jordanie devaient laisser leur carte d'identité au poste-frontière situé sur le pont Allenby. En échange, ils obtenaient une carte les autorisant à passer. Mais la validité de ce document était limitée à trois ans et ne pouvait être renouvelée que trois fois. Les habitants qui ne revenaient pas en Cisjordanie dans les délais impartis entraient dans la catégorie de ceux qui «ne sont plus résidents», une clause non écrite que les Palestiniens n'étaient pas supposés connaître, comme l'a reconnu un général israélien. Quelque 130 000 Palestiniens habitant le secteur oriental d'El Qods et un nombre tout aussi important d'habitants de la bande de Ghaza sont également menacés d'exil. C'est la déportation de masse et Israël, ne manque-t-on pas de relever, pense probablement régler la question palestinienne en faisant le vide. Grossière erreur.