L'agriculture dans les régions du Sud connaît un essor singulier depuis quelques années. Outre le palmier dattier dont le Sahara est la terre de prédilection, une multitude de cultures se développent de plus en plus dans des régions comme Biskra, El Oued ou Ghardaïa. A côté des cultures maraîchères ou céréalières, l'exploitation agricole dans le Sud vient de s'étendre même à l'oléiculture et à l'arboriculture fruitière. Même s'il n'existe pas de statistiques précises sur la portée de l'agriculture saharienne en Algérie, il y a lieu de relever que plus de 50% des produits agricoles frais, comme les légumes et les fruits, proviennent des régions du Grand Sud. Au-delà de son aspect quantitatif, en permettant de consolider l'approvisionnement du marché et son équilibre, l'agriculture saharienne joue un rôle important également en facilitant l'accès aux produits agricoles en hors saison. Des produits maraîchers, comme la tomate, l'oignon ou le poivron y sont produits en effet toute l'année. Pour ce faire, la plasticulture est fortement développée dans ces régions. Pour la seule wilaya de Biskra, les données établies par les services agricoles font état de quelque 70 000 serres qui y ont été recensées, sans compter le nombre aussi important de serres non déclarées que développent des agriculteurs travaillant en dehors du circuit réglementaire. En effet, eu égard aux conditions climatiques qui caractérisent le Grand Sud, l'agriculture saharienne ne peut être développée, pour la majorité des cultures que sous serres. En outre, il est utile de retenir que Biskra, à elle seule, englobe 98 478 hectares de périmètres irrigués, soit près de 54% de la SAU (surface agricole utile) totale de la wilaya qui est de 185 473 hectares et plus de 15% de l'ensemble des périmètres irrigués à l'échelle nationale estimés à 640 000 ha en 2009. Par type de cultures, la phoéniciculture occupe plus de 40 000 ha pour plus de 4,171 palmiers et une production ayant dépassé 2,614 millions de quintaux en 2010. Les cultures maraïchères dans cette wilaya occupent 15 598 ha pour une production ayant dépassé les 4 millions de quintaux et la céréaliculture occupe 31 607 ha dont la production a atteint 666 900 quintaux. L'arboriculture, dont l'olivier, occupe 1 400 ha pour une production de 171 000 quintaux. Cependant, l'enjeu de l'agriculture dans le Sud réside dans l'exploitation des ressources, notamment hydrique. Freiner la surexploitation des réserves Il faut dire qu'en l'absence presque totale de pluviosité, les périmètres agricoles dans des régions, à l'instar de Biskra ou El Oued sont exclusivement irrigués. En revanche, la problématique de l'irrigation dans ces régions requiert une maîtrise rigoureuse à plusieurs niveaux. D'un côté, il y a nécessité d'instaurer une politique d'exploitation rationnelle de ces ressources hydriques souterraines qui, faut-il le préciser, ne sont pas facilement renouvelables, et, de l'autre côté, il faut adapter des techniques d'irrigation permettant d'éviter une forte remontée des sels et contrôler, par la même, le taux de salinisation des sols qui a un impact négatif sur le rendement des terres. A cet égard, les spécialistes en agronomie divergent sur l'opportunité de l'intensification de l'agriculture saharienne. Des travaux universitaires ont été menés à cet égard et ont relevé des incohérences dans la conduite de l'investissement agricole dans le sud de l'Algérie. Tout en évaluant les ressources hydriques souterraines dans le sud de l'Algérie à 5 milliards de m3, le professeur M. T. Halilat de l'université de Ouargla relèvera à ce sujet dans son étude «Situation de l'irrigation/fertigation en Algérie», «les phénomènes d'érosion, de désertification et de pollution, de l'absence ou l'insuffisance de drainage, de la salinisation des sols», alors que, pour les ressources en eau, il relèvera que «les nappes étaient surexploitées avec un prélèvement de 3 m3/s». Ces conclusions, en tout cas, viennent d'être battues en brèche par le professeur Fouad Chehat, directeur de l'INRA d'Alger, qui, dans l'entretien ci-après, recommande l'intensification de l'investissement agricole dans le sud algérien à la seule condition de faire asseoir une politique de gestion rationnelle des ressources hydriques.