- Quelles sont les différentes étapes qu'a connues l'histoire de l'urbanisme en Algérie ? L'histoire de l'urbanisme en Algérie a connu des étapes différentes et diversifiées. Au lendemain de l'indépendance, les pouvoirs publics se sont attelés à la reconstruction du pays. Il ne faut pas perdre de vue qu'à l'époque l'urbanisation d'un territoire était liée à la démographie de la population qui ne dépassait pas les 11 millions d'habitants, selon le recensement. A ce moment-là, l'Algérie a connu le phénomène de l'exode rural. Les populations qui vivaient dans les zones reculées et qui ont connu la misère et la guerre aspiraient à vivre dans des conditions prospères et de meilleure situation économique. Donc, il y a eu une forte demande sur le logement et une forte demande sur les activités économiques (logement et emploi). Le choix des pouvoirs publics a été l'aspect économique en construisant des grandes zones industrielles et d'activités. Donc, on a opté pour l'industrie industrialisante en implantant ces industries sur le littoral car les commodités et les ports étaient là. C'est pour cela que des décennies après, nous nous sommes rendu compte qu'il y a une occupation déséquilibrée du territoire. La politique d'aménagement du territoire, à travers le SNAT (Stratégie nationale d'aménagement du territoire), en parle. En fait, tout le problème de l'urbanisme en termes de qualité et de cohérence du tissu urbain se résume à une concentration un grand nombre de population sur une partie limitée qui représentait 4% du territoire. Le reste les Hauts Plateaux et le Sud sont occupés par une densité très faible de population. C'est ainsi qu'aujourd'hui, toute la partie nord du pays et littorale connaît des problèmes d'urbanisme. La première étape était liée à la croissance démographique. L'Algérie avait donc reconduit la réglementation héritée de l'époque coloniale en matière d'urbanisme et d'aménagement du territoire jusqu'en 1975 en l'abrogeant. Il y a eu les PUD (Plans d'urbanisme directeurs), les zones d'habitat urbaines nouvelles (ZHUN) et les PUP (Plans d'urbanisation provisoires). Ce n'est qu'à partir des années 90 qu'il y a eu promulgation de loi 90-29 relative à l'aménagement et à l'urbanisme en apportant des instruments avec un ancrage législatif pour la première fois : le plan directeur d'aménagement et d'urbanisme (PDAU) et le plan d'occupation de sol (POS). - Quels sont les rôles du PDAU et du POS dans l'urbanisation du territoire ? Le rôle du PDAU est de mener la planification de la gestion urbaine et définir l'usage du sol sur le territoire d'une commune. Lequel PDAU va donner le sens à des POS qui est en fait un PDAU découpé en plusieurs POS, soit des quartiers. C'est à travers ces POS que l'on concrétise les programmes des collectivités (locales) en termes de logement, d'équipement de santé, d'éducation, de loisirs, de transports et toutes autres activités. Le POS met aussi en œuvre l'aspect qualitatif d'aménagement d'un territoire, à savoir la composition urbaine. Il définit les espaces publics et verts, les routes et les rues. - Quels sont ces problèmes ? Le problème de qualité, de cohérence et d'esthétique, car il y a une très forte pression sur l'utilisation du foncier. La partie Nord est apte à l'urbanisation puisque les terrains sont plus ou moins plats, l'existence de quelques commodités et infrastructures. Dans l'urgence on a construit aussi des logements. Le rôle de l'urbanisme est de planifier et d'anticiper les besoins futurs de la population en termes de logement, d'activités, d'équipements et d'infrastructures. C'est une politique prospective. C'est à travers la planification urbaine que les pouvoirs publics mettent en place une politique d'habitat, de transport, d'équipement. - Existe-t-il des normes en matière d'urbanisme en Algérie ? La loi ne dicte pas les normes de manière quantitative. Elle donne les grandes orientations comment organiser le territoire d'une commune. La loi a mis en place les actes d'urbanisme qui règlementent. Le POS fixe les droits à construire, c'est-à-dire la manière d'occuper le sol, la densité, le nombre d'étages, le recul, l'espace public, le trottoir, la rue, la place et placette. Il est par essence l'organisateur de l'espace public. Il a mis en place les règles de construire. Il ne faut pas perdre de vue aussi que la Constitution de 1989, a consacré la propriété privée. - Comment peut-on coordonner entre l'aspect architectural, esthétique et urbanistique ? C'est très important, la question est très pertinente. La qualité du cadre bâti présente aujourd'hui des dysfonctionnements en raison des grandes pressions démographiques et de l'utilisation du foncier lié au développement économique. Cette pression existe toujours au niveau des villes car les activités sont concentrées en ville et les gens aspirent à améliorer leurs conditions de vie. Il y a eu un mauvais contrôle qui a mené à ces dysfonctionnements dans l'organisation et d'aménagement de nos villes. - Est-ce qu'il est encore possible de remédier à l'anarchie qui règne en termes d'urbanisation ? Le ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme, conscient de la problématique, a mis en place de nouvelles structures en 2009 pour encadrer ces problématiques liées à l'architecture, à l'urbanisme et à la planification urbaine. Avant 2009, l'architecture et l'urbanisme étaient concentrés dans une seule direction. En 2009, il a été mis en place la direction générale de l'urbanisme et de l'architecture (DGUA) qui comporte la direction centrale de l'urbanisme, la direction de l'architecture et la direction centrale de la planification urbaine. Par ailleurs, il a été créé l'Agence nationale de l'urbanisme (ANURB) qui est un instrument de l'Etat qui va accompagner les bureaux d'études publics et les collectivités locales en terme d'études et de planification en urbanisme. Il s'agit d'un pôle de compétences. Enfin, le contrôle est amélioré en créant une inspection générale de l'urbanisme et de la construction avec ses démembrements au niveau de 9 régions qui veilleront en amont, soit avant la réalisation de projets. - Pourquoi a-t-on attendu jusqu'à 2009 pour mettre en place ces structures ? Entre 1990 et les années 2000, l'Algérie a connu des conditions liées à la sécurité. Donc, il y a eu un ralentissement dans la construction mais à partir de 2000, il y a eu la volonté politique à travers les programmes quinquennaux du président de la République de construction. L'urbanisme ne pouvait pas rester en marge pour répondre aux nouvelles exigences de la société. L'idée a été lancée depuis longtemps et il fallait élaborer des textes. - C'est quoi en fait l'urbanisme ? L'urbanisme est une discipline et une science qui intègre plusieurs domaines : transports, les activités, le logement, l'environnement, les risques majeurs et naturels. C'est l'affaire de plusieurs intervenants. L'urbanisme ne s'occupe pas uniquement de la construction de logements mais il est là pour planifier et anticiper les besoins. Il crée un cadre de vie avec l'élément de base le logement avec toutes les viabilités en assainissement, en énergie, en eau, en télécommunications, de routes et les commodités nécessaires et des services (école, marché, commerces, hôpital, la poste…etc.) qui devraient être pris en charge dans les plans d'aménagements. Si ce n'est pas pris en charge nous produirons des cités dortoirs. Dans la réalité, ce n'est pas facile car il existe plusieurs maîtres d'ouvrages. Il faudra y aller vers une maîtrise d'ouvrage unique. Il faudra créer des organismes aménageurs, comme il a été recommandé à l'issue des trois rencontres régionales car avant d'implanter tout programme de logement il faut viabiliser. C'est la mission de ces aménageurs. Il faudra aussi une coordination entre les différents maîtres d'ouvrages. Le ministère de l'Aménagement du territoire donne les grandes orientations stratégiques de l'occupation du territoire et à travers ses orientations on doit définir la localisation des pôles urbains, les grandes infrastructures comme l'autoroute, les ports et les aéroports. C'est en amont pour le territoire national et la planification urbaine se fait à l'échelle communale. Les 1 541 communes sont couvertes par un PDAU qui prend en charge la planification sur une période donnée. Il y a aussi le SNAT en relation avec le développement économique, qui a été adopté récemment.