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«Une loi ne changera pas l'histoire»
ZOHRA DRIF-BITAT À PROPOS DES RAPATRIES FRANÇAIS
Publié dans L'Expression le 21 - 06 - 2005

Mme Zohra Drif Bitat, vice-présidente du Sénat en sa qualité de parlementaire mais également de moudjahida et épouse du défunt Rabah Bitat, l'une des figures de proue de la révolution algérienne nous a, dans cette entretien à bâtons rompus, fait part de ses impressions, avec son franc-parler bien connu, concernant la loi portant reconnaissance de l'action et contribution nationale en faveur des rapatriés.
L'Expression: La loi portant reconnaissance de l'action et contribution nationale en faveur des français rapatriés notamment dans son article 4 votée le 23 février dernier par le parlement de l'Hexagone est à l'origine d'une vive polémique en Algérie comme en France, comment l'avez-vous accueillie?
Mme Zohra Drif Bitat: Je n'ai pas été surprise d'autant plus que cette loi procède d'une relecture et si je peux dire une «re visitation» de l'histoire que certains anciens colonisateurs entreprennent aujourd'hui. je ne sais si dans les pays anciennement colonisés par la Grande Bretagne, les récentes décisions, discussions et débats à divers niveaux ainsi que certaines publications tendant à démontrer à démontrer que la colonisation britannique a été un bienfait pour ces pays sont connus. En vérité, il semble que l'évolution du monde moderne qui reste largement dominé et mené par les ex-puissances coloniales et les nouvelles puissances impérialistes tend vers une domination d'une forme nouvelle des pays dits en voie de développement et dont la plupart sont dans une situation de sous-développement surtout et spécialement humain et matériel. Maintenant que les français décident de glorifier une page sombre de l'histoire de l'humanité, c'est d'abord leur problème et cela répond sans doute à des objectifs non avoués. Cependant, cela n'entraîne certainement pas le gommage des faits historiques entrés dans l'histoire de l'humanité.
Je m'adresse d'abord à l'une des héroïnes de la Bataille d'Alger qui a vécu une période cruciale de la révolution algérienne comment percevez-vous une loi qui touche à la lutte de libération nationale?
Oh! vous savez, personnellement , cette loi et la philosophie qui la sous tend ne me surprennent pas pour la simple raison que je sais que la France a toujours construit son histoire officielle. C'est à dire qu'à partir d'événements historiques, elle a toujours chercher à donner une image valorisante de son action politique et militaire. Je n'oublie pas et tous les hommes et les de ma génération n'oublient pas que la France a justifié l'occupation de l'Algérie et sa politique de dépossession totale du peuple algérien et sa politique de déculturation par sa volonté d'apporter à notre peuple «la civilisation» alors que l'Algérie en 1830 et ce, à travers les écrits des français eux-même, était un pays qui connaissait un développement, en tous cas le même que celui des pays méditerranéens avoisinants, plus que cela il est de notoriété publique que l'Algérie participait à l'alimentation de la France ainsi que d'autres pays d'Europe grâce à ses productions agricoles. Ce qui m'importe aujourd'hui, ce ne sont pas les lois que votent le parlement français, c'est ce que fait mon pays dans le domaine de l'écriture de son histoire et dans la transmission aux générations post-indépendance de la réalité historique de leur pays avant, pendant la colonisation et pendant la guerre de libération nationale. Ceci dit, cette loi n'est pas un fait nouveau, la glorification de l'acte coloniale a toujours primé dans le discours officiel. Vous n'avez qu'à lire les auteurs du XIXe siècle qui faisait l'éloge de la France en la décrivant comme une grande nation de civilisation et des droits de l'homme et si elle était venue dans les pays où elle s'est installée, c'est pour amener la civilisation, donc c'est une constante chez la France pour justifier son occupation de certains pays. Que les français décident de faire une loi pour dire que la colonisation a joué un rôle positif dans l'évolution de notre pays, elle ne fait encore une fois que couvrir sa politique de destruction et de dépossession. On a tué des millions de personnes pour les remplacer par une population européenne. Pour ce faire on a élaboré des lois. Les lois sont des actes politiques.
Vous insinuez que la France falsifie l'histoire en créant une histoire sur mesure dans laquelle elle sublime son image et pourtant vous êtes présidente du groupe d'amitié algéro-français des sénats. N'y a t-il pas là contradiction dans vos positions?
Il n'y a aucune contradiction. Une chose est claire et établie dans les faits. Après l'indépendance , nous avons pour notre part refuser la haine. Nous avons toujours montrer la volonté d'établir des relations amicales fortes avec le peuple français, avec lequel nous avons une histoire commune et avec lequel nous avons entretenu des relations humaines sur les plans politique, économique et culturel. En ma qualité de parlementaire donc représentante du peuple, j'estime de mon devoir de travailler à dépasser les tensions et le passé et à créer des liens d'amitié entre les hommes et les des deux rives de la Méditerranée qui ne nourrissent aucune hostilité les uns envers les autres. Et croyez moi ils sont nombreux.
Et ce groupe d'amitié algéro-français que vous présidez, peut -on savoir si il est opérationnel?
Depuis la création du Sénat, on s'est attelé à mettre en place des structures entre les différents Parlements, notamment avec le Sénat français, mais évidemment la conjoncture politique de l'époque ne le permettait pas. Les rapports tendus entre les deux pays ont fait que ce groupe n'a pas fonctionné. Afin d'insuffler une nouvelle dynamique au groupe, une rencontre entre les parlementaires le composant a été programmée pour le mois de septembre. Nous nous préparons pour cette réunion surtout concernant les problèmes que nous auront à aborder.
Allez-vous débattre de la loi sur les rapatriés français avec les parlementaires français?
Je ne peux pas anticiper sur cette question mais nous allons sûrement discuter des problèmes et des contraintes que nous rencontrons dans la concrétisation des relations bilatérales amicales. Notre tâche première consiste à définir une plate-forme de travail.
On a appris qu'au mois de juillet prochain sera inaugurée une stèle à Marignane dans les Bouches-du-Rhône à la mémoire des combattants morts pour que vive l'Algérie française dont l'objectif selon des associations de la société civile est de réhabiliter l'OAS. N'est-ce pas le début des effets de cette loi qui de toute vraisemblance peuvent aller encore loin?
Si les Français ont poussé leur «humanisme» jusqu'à vouloir réhabiliter les criminels cela reste leur problème, nous les avons combattus, nous avons payé un lourd tribut mais nous avons gagné. Un mouvement comme l'OAS est une ex-croissance de l'armée française, ce sont des officiers, ils ont commis les pire s de l'armée française. Nous avons rien oublié et ce n'est pas en réhabilitant les assassins qu'ils vont changer quelque chose à l'histoire. Les Algériens doivent être fiers d'eux même de leur prestigieuse histoire et de leurs révolution qui a ébranlé et vaincu la France.
Alors ils peuvent ériger autant de stèles qu'ils désirent, les faits historiques restent probants. Nous savons à travers l'histoire que leurs actes barbares ont été justifiés comme des actes d'auto-défense pour leur peuple et pour les autres nations. Quand il s'est agi des actes d'extermination contre leurs populations pendant les périodes d'occupation, ils les qualifient de génocides et de crimes contre l'humanité mais quand ces crimes sont commis contre les populations d'Afrique, ils ne sont pas qualifiés de tels. Comme je constate malheureusement une chose, c'est la force qui fait la loi. Quand vous êtes puissant, vous pouvez imposer ce que vous voulez.
A votre avis, comment faut-il riposter à ces attaques?
La riposte est l'écriture de l'histoire. Il faut écrire l'histoire. Il faut construire le pays. Il faut que les générations connaissent leur histoire. Que les Français disent qu'ils n'ont pas commis de crimes contre l'humanité contre l'Algérie. Qu'ils nous ont occupés pour apporter la civilisation, la réalité je la connais et ce qui m'importe c'est qu'elle soit transmise.
On dit justement qu'il y a un vide et si on a pas voulu écrire l'histoire c'est parce qu'on a peur d'ouvrir la boîte de Pandore?
L'histoire de l'Algérie est écrite par des personnes étrangères à l'Algérie et c'est à nous de l'écrire. Je ne parle pas de l'histoire récente c'est-à-dire depuis la colonisation, mais la grande Histoire du pays. On peut répondre politiquement aux Français. Ce sont des positions conjoncturelles mais prendre conscience de l'importance de l'écriture de l'histoire voilà ce à quoi nous renvoie à la face les Français.
Je reformule ma question autrement. Est-il possible d'écrire en toute liberté l'histoire dans sa vérité absolue sachant que cette démarche risque de toucher aux intérêts de certaines personnalités qui sont présentement au pouvoir?
Ecoutez! L'histoire est au-dessus des personnalités. On n'écrit pas l'histoire pour des personnes présentes. Il y a des documents, des témoignages. Quand la France dit que la colonisation a fait du bien à l'Algérie. Or, les documents existent qui battent en brèche ces assertions. Ils montrent que le développement et la prospérité existaient bel et bien avant l'arrivée des Français. Il faut rappeler que ce sont les écrits des historiens français eux-mêmes qui parlaient de dix millions d'habitants en 1830 et qu'en 1875, quand ils ont fait le recensement, nous n'étions plus que deux millions, ils ont commis un génocide. La situation dans laquelle se trouve actuellement l'Algérie est la conséquence de la colonisation parce qu'ils nous ont déculturés, ils nous ont dépossédés de notre pays. Leurs terres qu'ils cultivaient étaient celles de nos ancêtres alors que les Algériens étaient relégués dans des grottes dans les montagnes et ceux qui travaillaient à les servir ils travaillaient pour deux sous. Ils ont fait d'un peuple, qui en 1830 avait le même taux de scolarisation que celui qui existait en Europe, soit 44%, un peuple analphabète à 99%. C'était une entreprise de dépossession et de déculturation. On peut l'écrire avec des documents irréfutables.
Vous soulevez le problème des archives qui sont toujours interdites à la consultation?
On peut déjà écrire l'histoire à partir des archives qui sont dans le domaine public et qui établissent la vérité sur la colonisation française à la fin du XIXe siècle. On les retrouve à la Bibliothèque nationale française, à la vidéothèque de la même Assemblée nationale française en dehors d'autres documents algériens qu'ils ont pris. Ce n'est pas du domaine de l'impossible.
Pourquoi votre génération n'a rien écrit et pourtant vous êtes les mieux placés pour le faire?
Après l'indépendance, nous n'avions pas beaucoup de temps et l'urgence était de construire le pays. Nous étions en face d'une situation chaotique et il fallait retrousser les manches. Nous ne voulions pas que les générations futures soient marquées par les horreurs que nous avons vécues. Aujourd'hui, la relève peut le faire et nous sommes là pour les aider dans ce projet.
Vous êtes proche du président de la République, que pense-t-il de cette loi car il faut dire que jusqu'à présent il n'a pas réagi?
Je ne peux pas parler à sa place, mais tel que je le connais c'est un grand moudjahid. Il a beaucoup donné pour son pays. Il n'accepterait jamais que la mémoire des martyrs soit avilie.


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