Il est impérativement nécessaire de réviser en premier lieu la Constitution avant de revoir ou d'élaborer d'autres lois. La Constitution est le socle pour toute réforme, c'est la mère des lois.» Cette phrase est revenue hier, dans la bouche de bon nombre d'intervenants à la journée parlementaire organisée par le groupe parlementaire du Parti des travailleurs (PT). «Quelle réforme politique qui institue la démocratie en Algérie», était l'intitulé de cette manifestation à laquelle ont pris part des députés de différentes obédiences, des enseignants et des avocats. Louisa Hanoune, porte-parole du PT, s'est prononcée en faveur d'une réforme politique profonde afin de créer une rupture définitive avec le régime actuel. «Nous sommes contre le recours à des réformettes qui touchent une partie de la législation ou d'autres volets de la vie politique. Mais nous voulons opérer des réformes profondes avec des moyens démocratiques et un dialogue transparent et ouvert», a soutenu l'intervenante, estimant que la réforme ne doit pas garantir la continuité du régime en place qui opte à chaque fois pour le bricolage et le replâtrage ; les réformes politiques doivent connaître un changement dans le fond et la forme pour la démocratisation du régime. Mme Hanoune a fustigé les institutions ayant failli et qui sont à l'origine du marasme : «Les institutions qui ont appliqué des politiques impopulaires ne peuvent pas conduire de véritables réformes, qu'il s'agisse du volet économique, social ou politique.» Se voulant optimiste, la SG du PT pense qu'il n'est pas trop tard pour rattraper le retard et accélérer l'ouverture de perspectives démocratiques, car selon elle, «si la situation actuelle perdure elle sera dangereuse pour le pays». Elle a fait remarquer que l'Algérie est devant une révolution douce «qui ressemble à un fleuve qui doit être débarrassé de ce qui retarde l'avancée de ses eaux pour éviter la crue». Mme Hanoune à l'instar de certains intervenants réfute le terme «changement» et tient au terme «réforme» parce que, a-t-elle expliqué, «on ne démarre pas du néant, on doit réactiver les droits et libertés consacrés déjà par la Constitution et ajouter celles qui manquent». De son côté, maître Ghachir, porte-parole de la Ligue algérienne des droits de l'homme, et M. Ferad, historien et ex-militant du FFS, ont défendu le principe d'aller vers une refonte de la Constitution ; ils se sont exprimés pour une constituante qui perpétue l'Etat algérien. «L'Algérie vit une situation désastreuse et a beaucoup de défaut que ce soit sur les plans économique, social et politique», a déclaré Me Ghachir, déplorant le fait que les événements des années 1990 et le printemps berbère aient été mal interprétés par nos dirigeants. «Nous sommes restés malheureusement au stade des futilités. Nous nous sommes éloignés de la réalité et du concret», a-t-il noté. Et de s'interroger : «Que voulons-nous ? Un changement ou une réforme ?» Si ce flou perdure, Me Ghachir n'écarte pas une révolution populaire : «Il y a beaucoup d'animosité dans notre société. La situation est grave. Il faut à mon sens un changement radical. Il faut donner la priorité à deux aspects ; comment désarmer les esprits et comment rétablir la confiance entre l'Etat et le citoyen.» L'intervenant, qui plaide pour une Constituante car représentant la souveraineté populaire et pour le combat du terrorisme administratif, affirme qu'il faut aussi trancher définitivement la question des mandats présidentiels et les limiter. Enfin, Me Ghachir a révélé que la Ligue dont il est responsable n'a pas été invitée aux assises sur la société civile organisée par le CNES, s'interrogeant : «Faisons-nous partie de la société civile ou pas ?»