Le Conseil de l'ordre des médecins dénonce les pratiques de certains médecins qui sont au service de laboratoires pharmaceutiques, notamment internationaux. Source de suspicions dans le milieu des médecins prescripteurs, voire des décideurs du secteur sanitaire, les conflits d'intérêts en médecine n'en finissent pas de soulever moult interrogations. Devant l'ampleur prise par ce phénomène récurrent, et soucieux de débattre de ce sujet en toute transparence, l'ordre des médecins de la région de Constantine a décidé d'en faire sa thématique du jour à la faveur de la 13ème journée de déontologie médicale. Organisée à l'université Emir Abdelkader de Constantine en présence de plusieurs médecins français et tunisiens et de dizaines de représentants du corps médical des wilayas de Mila, Oum El Bouaghi, Jijel et Constantine, cette rencontre vise avant tout, selon ses initiateurs, à éclaircir autant que faire se peut ce versant obscur où les non-dits ajoutent à la défiance entourant ce sujet resté longtemps tabou. Président du Conseil national de l'ordre des médecins, le Dr Bekkat Berkani dira le fond de sa pensée: «Il y a d'un côté les médecins prescripteurs et de l'autre le lobby des laboratoires pharmaceutiques dont on connaît la puissance financière et les techniques d'approche pour arriver à leurs fins. A partir de ce postulat, sont alors en jeu de gros intérêts commerciaux et de là apparaît fatalement une ambiguïté d'où il est difficile de sortir totalement indemne.» Vice-président du Conseil national de déontologie médicale et président du conseil de la région de Annaba, le Pr. Abdelaziz Ayadi enfoncera davantage encore le clou: «Lors de manifestations scientifiques organisées aux quatre coins du monde, certains de nos médecins sont invités par les firmes internationales qui leur assurent une prise en charge à la hauteur de leurs attentes. Et cela sans l'aval du Conseil de l'ordre des médecins. Une pratique qui doit impérativement cesser car, et je le répète, répondre à ce type d'invitations sans notre aval n'est pas conforme aux règles d'éthique et de déontologie, sachant que la persistance de ces conflits d'intérêts décrédibilise notre corps.» Abondant dans le même sens, en particulier sur les effets pervers de cette relation médecins-labos pharmaceutiques via les visiteurs médicaux, un collègue du conseil de l'ordre de Constantine surenchérit en soulignant «la puissance phénoménale du lobby international des labos pharmaceutiques». Ajoutant que «l'indépendance des médecins prescripteurs s'apparente à une illusion», et que «la soi-disant transparence évoquée par la tutelle de la santé n'est qu'un rideau de fumée destiné à anesthésier l'opinion publique».