Alors que les combats faisaient encore rage hier, au sud de Tripoli, entre les troupes fidèles au colonel El Gueddafi et les insurgés, l'ONU a amorcé des discussions avec les deux parties sur les moyens d'alléger les sanctions internationales imposées à la Libye. La raison : les Nations unies veulent pallier une grave pénurie de médicaments. Des responsables de l'ONU, bien informés, ont déclaré que des représentants du Conseil national de transition (CNT), organe politique de la rébellion et du régime du colonel Mouammar El Gueddafi, avaient eu des discussions la semaine dernière avec l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en vue d'établir une liste des domaines qui pourraient être exemptés de sanctions. La rencontre à Genève avec l'OMS fait partie d'un plus vaste mouvement visant à éviter que les sanctions financières imposées à la Libye – au gouvernement et aux banques – ne soient à l'origine d'une crise humanitaire majeure. Des organisations chargées de l'aide humanitaire dans le pays ont signalé des pénuries de produits de base comme les vaccins dont les stocks, tant dans les régions de l'Ouest contrôlées par les forces du colonel El Gueddafi que dans celles de l'Est aux mains des rebelles, ont fondu en près de cinq mois de guerre. Parallèlement à ces discussions, des milliers de partisans du guide libyen, après avoir prié hier sur la place Verte à Tripoli, ont appelé à la mobilisation pour combattre les «forces croisées» et à libérer les villes occupées par les rebelles. Des imams relayés par des SMS exhortaient, rapporte la presse présente sur place depuis jeudi les Tripolitains à participer massivement, sur cette place symbolique, à la prière collective. Celle-ci a été suivie par une manifestation au cours de laquelle ont été scandés des slogans à la gloire du «guide de la révolution», le colonel El Gueddafi, qui, contrairement à ce qu'il avait fait une semaine auparavant, le 1er juillet, ne s'est pas adressé cette fois-ci à la foule. «L'heure du djihad a sonné», s'est écrié l'imam dans son prêche, appelant les fidèles à «marcher» sur les cités prises par les insurgés pour les libérer. Sur le terrain, les rebelles – qui en sont au troisième jour de leur offensive – avaient progressé hier vers le centre de Zliten (est de Tripoli), occasionnant d'importants dégâts aux forces loyalistes. Le début de l'offensive a eu lieu dans les montagnes berbères, au sud de la capitale libyenne. Les rebelles libyens ont, dans le même temps, lancé une deuxième attaque à partir de la ville côtière de Misrata, à 200 km à l'est de Tripoli. Malgré l'intensité de l'attaque, les hommes du colonel El Gueddafi ont cependant réussi très vite à se réarmer et à se regrouper. Autre mauvaise nouvelle pour Benghazi : après la décision de la France d'arrêter le largage d'armes aux insurgés des régions berbérophones libyennes, voilà que la Chambre des représentants américaine vient de voter un amendement interdisant au Pentagone de fournir des équipements militaires au CNT libyen. Pour le moment, aucune raison n'est venue étayer cette décision. Une chose est cependant sûre : ces deux décisions auront un impact autant sur le moral que sur les capacités militaires des insurgés qui, malgré l'aide de l'OTAN, éprouvent encore le plus grand mal à se débarrasser d'El Gueddafi. Au plan politique, le vote de la Chambre des représentants n'ira également pas sans affaiblir la position du CNT qui semble résolument avoir opté pour la «politique du tout ou rien» dans son approche avec Tripoli. Concernant les nouvelles du front, les insurgés ont affirmé, dans un communiqué, avoir avancé hier en direction du centre de Zliten, à 150 km à l'est de Tripoli, après des combats qui ont fait 5 morts et 17 blessés dans leurs rangs. Ils ont dit n'être qu'à un peu plus d'un kilomètre du centre-ville et avoir libéré plusieurs familles qui étaient emprisonnées par les loyalistes qui ont fui vers l'ouest de Zliten. Après avoir pris le contrôle, fin juin, d'un important dépôt de munitions à plus de 120 km au sud de Tripoli, les membres du CNT cherchent désormais à faire sauter deux verrous stratégiques : Bir El Ghanem qui leur permettrait d'avoir Tripoli dans leur viseur et Gharyane où sont basées les garnisons de l'armée protégeant la capitale.