Jusqu'où ira l'aveuglement criminel du régime du président syrien Bachar Al Assad ? Hier, comme tous les vendredis depuis le 15 mars dernier, des centaines de milliers de personnes – un million, selon l'opposition – sont descendues dans la rue pour demander le départ du régime alaouite. Hier encore, comme tous les vendredis depuis quatre mois, la police, l'armée et les milices du Président ont tiré à balles réelles sur les manifestants, tuant 17 personnes et blessant des dizaines d'autres. Presque toutes les villes du pays se sont soulevées contre le régime, suivant ainsi l'exemple de la ville martyre de Deraa, où a débuté la contestation durement réprimée par Bachar Al Assad jusqu'à la «fière Alep» qui, traditionnellement, est toujours restée en marge de toute rébellion, de tout soulèvement, y compris contre la présence étrangère. Les centaines de milliers de personnes qui sont sorties dans les rues de plusieurs villes et dans les quartiers de Damas réclamaient la libération des 12 000 prisonniers et la fin du régime du parti unique en place depuis cinquante ans. Un régime qui a durement réprimé la contestation depuis quatre mois, faisant plus 1400 victimes parmi les manifestants. Apparemment, rien ne semble arrêter la folie meurtrière dont il fait preuve, enfermé dans ses certitudes comme l'ont démontré les propos de Bachar Al Assad affirmant au Wall Street Journal, en janvier dernier, que son pays n'était pas l'Egypte de Moubarak et sûr, sans doute, que les Occidentaux, déjà engagés et enlisés en Libye, n'envisageraient pas de sitôt une «expédition» du même genre contre la Syrie. Conforté, surtout après la chute du régime de Moubarak, que son pays, derrière un «anti-impérialisme» de façade, demeure une garantie pour la sécurité d'Israël que les Occidentaux eux-mêmes lui reconnaissent. Et cela, mis en balance avec le règne de l'arbitraire instauré depuis une cinquantaine d'années avec la mise en place de l'état d'urgence en 1963, le clientélisme instauré comme mode de gouvernance par le régime alaouite, était sans doute plus important que les aspirations du peuple syrien à la liberté et à la démocratie. L'espoir pourrait venir de l'opposition qui tient aujourd'hui une conférence de «salut national» à Damas et Istanbul et qui veut ni plus ni moins que la chute du régime.