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«Le Festival international des danses populaires court à sa perte» Mohamed Kazouz, président de l'association culturelle Béni Ameur et porte-parole du MAC
Membre fondateur du Festival international des danses populaires de Sidi Bel Abbès et président de l'association Béni Ameur, Mohamed Kazouz explique dans cet entretien les raisons du boycott décidé par une vingtaine d'associations folkloriques, regroupées au sein du mouvement associatif culturel MAC, dont il est le porte-parole. Il est également membre de l'Organisation internationale of Folk-Art (IOV) et du Conseil international de danse(CID). La troupe Béni Ameur, connue mondialement, a, entre autres, décroché en 2009 le 3e prix au Festival international d'Ankara (Turquie) et en 1997, le prix du meilleur thème au Festival mondial de Palma de Mallorca (Espagne). - Le Festival des danses populaires, qui est à sa 7e édition, est critiqué de toute part, aussi bien sur le plan organisationnel qu'artistique. Comment expliquez-vous ce recul par rapport aux précédentes éditions ? Lorsque le choix des troupes étrangères se fait dans la précipitation, via Internet de surcroît, sans qu'il ne fasse l'objet d'une évaluation de la part d'un comité artistique, il est tout à fait normal qu'on assiste à des spectacles insipides et sans aucune originalité. Les standards internationaux en la matière sont pourtant clairs à ce sujet. Il suffit, en ce sens, de consulter les règles définies par le Conseil international des organisations de festivals de folklore (CIOFF) en matière de sélection et d'organisation de ce genre de manifestions. Il n'est pas, d'ailleurs, étonnant que le festival de Sidi Bel Abbès ne soit pas reconnu par le CIOFF comme événement culturel international du folklore. Des Etats disposant de peu de moyens se distinguent chaque année et contribuent à mieux vendre l'image de leur pays. Le festival de Sidi Bel Abbès, malgré les fonds colossaux injectés par les pouvoirs publics depuis 2005, passe presque inaperçu. Un festival qui, de l'avis de nombreux observateurs, a commencé à connaître un sérieux déclin depuis 2008. - Les troupes locales qui ont représenté l'Algérie à l'étranger en de nombreuses occasions se refusent de s'impliquer dans l'organisation du festival. Pourquoi ? Il est important de rappeler, tout d'abord, que le festival des danses populaires est né au milieu des années 1990 à Sidi Bel Abbès dans un contexte particulier. A l'époque, les hommes et les femmes de culture étaient les derniers remparts face à l'intolérance et à l'obscurantisme. Parallèlement à cela, l'action des associations culturelles consistait à redorer l'image d'un pays en pleine tourmente. C'était notamment le cas à Sidi Bel Abbès. Pour l'histoire, l'association culturelle Banou Houlal avait organisé le premier Festival national des danses folkloriques en 1997, au moment où l'Algérie était à feu et sang. En 2000, le ballet Eden, présidé à l'époque par Hocine Aberkane, avait réussi la gageure de faire venir des troupes de Hongrie, de Pologne et du Maroc, alors que l'Algérie passait pour être un pays infréquentable. La dynamique culturelle amorcée par le Ballet Eden a donné lieu à une manifestation d'envergure internationale en 2005, à laquelle ont pris part des troupes de Grèce, de France, du Niger et du Maroc. L'institutionnalisation du festival de 2005 s'est concrétisée grâce à l'apport du mouvement associatif culturel (MAC), qui regroupe une vingtaine de troupes artistiques de Sidi Bel Abbès. Une année après, le festival fut une réussite avec une participation record de 16 troupes étrangères. C'est à partir de cette année que des dissensions sont apparues. Le MAC avait exigé de l'ex-directrice de la culture de rendre publics, en toute transparence, les bilans moral et financier de cette édition. Les associations ont dès lors pris leurs distances avec le festival, tout en refusant de cautionner une manifestation en plein déclin. - Pourquoi avez-vous boycotté le festival cette année ? Le boycott est le seul moyen pour faire comprendre aux responsables de la Culture que le festival court à sa perte. La marginalisation des acteurs culturels locaux, en dépit des engagements pris par le wali en juin dernier dans l'organisation de cette édition en est la preuve. La demi-douzaine de réunions tenues dans le cadre des préparatifs du festival n'a finalement servi à rien. Nous n'avons pas été associés en tant que partenaires à part entière. Franchement, nous ne pouvons plus travailler dans un climat de division et d'improvisation. - Le festival a vu son budget (8 milliards de centimes) augmenter par rapport à l'année dernière… L'argent n'a jamais été un élément déterminant dans la réussite de telle ou telle manifestation culturelle. On peut avec deux fois moins d'argent rassembler des artistes du monde entier. Nous l'avons fait en 2000, 2005 et 2006. Avec moins que ça, ont a pu rassembler des dizaines de troupes des quatre coins du pays, animer toutes les places publiques, lancer des ateliers de formation et organiser des conférences-débats sur l'art chorégraphique. Malheureusement, cette année, l'improvisation a atteint son expression maximale. L'on s'est rendu compte, à la toute dernière minute, qu'il n'y avait pas de groupe électrogène au stade où devait avoir lieu la cérémonie d'ouverture… Vous vous rendez compte… C'est aberrant. Pis encore, des troupes étrangères se sont produites à la place du 1er Novembre sans que l'on songe à installer une scène de danse… Le comble c'est que cette année nous avons assisté à une délocalisation déguisée du festival, inscrit dans le cadre de : «Tlemcen capitale de la culture islamique».