Après plusieurs mois d'intervention inefficace en Libye, Français et Britanniques ont infléchi leur position initiale sur le sort d'El Gueddafi. Pour Paris et Londres, le colonel pourrait rester dans son pays s'il accepte de quitter le pouvoir. Si ce n'est pas un aveu d'échec, ça y ressemble fortement. Malgré les nombreuses frappes aériennes et les armes livrées aux insurgés, la coalition internationale ne parvient pas à déloger le «guide» de Tripoli. Du coup, l'heure est au changement de stratégie. Désireux d'achever une aventure militaire coûteuse qui s'apparente de plus en plus à une impasse, Paris et Londres disent désormais que Mouammar El Gueddafi pourrait rester en Libye s'il quittait le pouvoir. «Il y a une pression du côté français pour essayer de trouver une solution politique», note Denis Bauchard de l'Institut français des relations internationales (Ifri). «Les Britanniques vont dans le même sens que la France, chef de file dans cette affaire», ajoute-t-il en évoquant la possibilité que le dirigeant libyen reste dans son pays après avoir abandonné le pouvoir. En début de semaine, le chef de la diplomatie britannique, William Hague, a souligné que le mieux pour les Libyens était qu'El Gueddafi quitte le pays. Mais «la décision appartient en dernier ressort au peuple libyen», a-t-il précisé, faisant allusion à la possibilité que le colonel reste dans son pays alors que la Grande-Bretagne souhaitait jusqu'à présent son départ pour l'étranger. Quelques jours auparavant, son homologue français, Alain Juppé, avait ouvert la porte au mai,ntien d'El Gueddafi en Libye. «L'une des hypothèses envisagées, c'est qu'il séjourne en Libye, mais à une condition, c'est que très clairement il se mette à l'écart de la vie politique libyenne», a dit le ministre français à la chaîne de télévision LCI. Le dernier ralliement en date, et non des moindres, à un maintien du colonel en Libye est venu de Moustapha Abdeljalil, chef du Conseil national de transition (CNT). «Il peut rester en Libye sous conditions», a déclaré le chef des insurgés au Wall Street Journal. Il a toutefois souligné qu'il appartiendrait alors aux rebelles de décider de son lieu de résidence et de son mode de surveillance. Pourtant, un tel scénario semble difficile à mettre en place. Un éventuel maintien d'El Gueddafi en Libye serait extraordinairement difficile à concrétiser, relève-t-on de source diplomatique française. Il faudrait négocier sa situation dans le moindre détail, lui assurer une protection contre un acte vengeur et lui garantir de ne pas être inquiété par la justice internationale ou celle de son pays. De son côté, le dirigeant libyen a de nouveau défié l'OTAN et les insurgés dans un message sonore diffusé à ses partisans mercredi soir à Zalten. «Nous n'avons pas peur. Nous les défions. Nous paierons le prix avec nos vies, nos femmes et nos enfants. Nous sommes prêts au sacrifice pour défaire l'ennemi», a-t-il assuré avec un ton déterminé. En attendant une éventuelle solution politique au conflit libyen, la Grande-Bretagne a reconnu le Conseil national de transition en tant que seul «gouvernement légitime» de Libye. Les autorités britanniques ont invité ses responsables à venir s'installer à l'ambassade libyenne à Londres après l'expulsion des derniers diplomates loyaux au colonel El Gueddafi.