Hachemi ! Tout au long de cette année 2011, tu aurais été fier, si ce n'était ce funeste adieu le 2 août 2005, de voir le monde arabe ressusciter sous tes yeux et marcher pacifiquement vers le printemps des peuples libres ! Après un long mutisme, du fracas des slogans ont surgi les mains nues du combat et la fronde des marches. Après les émeutes d'Algérie et les nombreuses marches empêchées par un pouvoir dictatorial, d'autres villes arabes se sont soulevées, de Tunis à Aden, de Rabat au Caire, de Tripoli à Damas, un flot ininterrompu de femmes, d'hommes et de jeunes ont une détermination résolue ! Hachemi ! Imagine-toi, le monde, tout le monde arabe en ébullition ! Non ! Ce n'est pas un mirage ! Un fleuve puissant, une déferlante impétueuse qu'aucune armée, aucun régime arabe dictatorial en place n'ont réussi à arrêter ni à apprivoiser. C'était ton rêve, n'est-ce pas ? La mobilisation a été forte en Algérie, mais les premiers résultats ne débouchent pas encore sur des succès décisifs. Tu le sais mieux que quiconque : la Révolution n'est qu'à ses premiers balbutiements et elle préfère souvent emprunter les longs chemins de traverse que passer par les raccourcis rapides. Un monde arabe nouveau est en train de naître avec le siècle pour prendre toute sa mesure dans le millénaire, avec toute sa diversité culturelle. Les gueux, les ventres creux, les crève-la-faim, ces éternels opprimés, à la surprise de tous, font le pied de nez à l'Histoire pour crier leur faim de liberté et annoncer la fin des dictatures. Des monarques sont tombés. Des murailles aussi. Celles de la peur et du silence! Celles de l'imposture et du mensonge ! Des millions d'Arabes aspirent aujourd'hui à vivre comme tous les citoyens libres de la planète. Quelle leçon magistrale à ceux qui ont fustigé les libertés, au prétexte que ce sont des «valeurs occidentales» étrangères à notre culture, pour mieux asservir les peuples ! Quelle gifle historique à ceux qui les ont vouées aux gémonies et clouées au pilori du «kofr» pour confisquer la parole et mutiler la pensée ! Les démocrates ne sont pas des minorités aliénées à l'Occident ni des «sanafirs» à jeter en pâture au peuple en les faisant passer pour ses ennemis. La liberté n'est ni un produit importé ni une utopie venue d'ailleurs. C'est le cri surgi de millions de poitrines qui refusent le pain noir et la tyrannie. Le système a affaibli, anémié, dévitalisé, mis à genoux l'Algérie et cassé l'épine dorsale de son économie à un point tel qu'elle est livrée pieds et poings liés aux intérêts financiers étrangers. Sinon, comment expliquer sa vulnérabilité chronique et ses lourdes factures ? Hachemi ! L'Algérie est au bord de l'implosion et il n'est pas exclu qu'elle ne soit atteinte du syndrome de la sécession, non pas celui de la Kabylie que le pouvoir orchestre depuis fort longtemps, mais bien celui auquel travaillent ceux qui rêvent de s'emparer à bon prix du sous-sol de «l'Algérie utile» ! L'Algérie n'est pas malade de son pétrole, mais de ce qu'en ont fait ses dirigeants et son système, une République bananière qui n'a pas su le valoriser pour en faire un levier de développement et une chance de réussite. A l'image de ce qui s'est passé dans les pays arabes, le mouvement de masse en Algérie a été exceptionnel et s'est exprimé avec une plus grande cohésion dans l'organisation. L'ampleur des manifestations a été telle que le pouvoir affolé a interdit les marches sur tout le territoire national, au moment même où il claironnait sur tous les toits qu'il mettait fin à l'état d'urgence. Un arsenal de répression sans précédent a été déployé pour dissuader et briser les mouvements de foule, plus particulièrement les étudiants, les médecins résidents, les chômeurs, et autres catégories socio-professionnelles. Les gardes communaux, les Patriotes, les militaires à la retraite, les appelés du service national, qui se sont souvent retrouvés dans un face-à-face meurtrier avec le terrorisme islamiste, ont dû descendre dans la rue pour manifester leur colère. Même les policiers, qui viennent d'être augmentés de près de 50%, subiront, eux aussi, les affres de l'inflation. Le pouvoir a lâché du lest en accédant aux revendications salariales des travailleurs, l'essentiel pour lui étant de réduire au silence la grogne, de gagner les grâces des manifestants et d'asseoir une popularité en chute libre, fusse-t-il au prix de la ruine du pays ! Hachemi ! Tu l'avais prédit ! Le bazar a fait souche sur les décombres de l'économie de production et le pouvoir a reculé face aux maquignons du marché noir. La corruption a gangrené le pays par métastases cancéreuses fulgurantes. Tout est dans le «t'bezniss» et «l'import-import». Des pans entiers de l'industrie se sont effondrés. Triste destinée pour un pays qui avait vocation à conquérir une place honorable dans la division internationale du travail. La saignée du pays continue par la fuite des cadres qui s'expatrient, forcés de monnayer leur savoir pour un ailleurs improbable. Pendant ce temps, la course aux sièges et aux sinécures bat son plein. Jusqu'à quand la misère poussera-t-elle sur les fortunes ? Jusqu'à quand la médiocrité chassera-t-elle les compétences ? Jusqu'à quand le chômage, la drogue et le suicide des jeunes ? Les femmes n'en finissent pas de payer un lourd tribut à l'obscurantisme et au laxisme. Après Ouargla et Hassi Messaoud où des femmes avaient été brûlées vives, M'sila se réveille à l'horreur des expéditions punitives contre les femmes seules. En l'espace d'un mois, par deux fois, des dizaines de bourreaux dressés dans le discours misogyne ont attaqué des femmes sans défense en incendiant leurs domiciles dans le quartier de Chebilia. Voilà comment dans ce pays l'on descend dans les bas-fonds de la barbarie et l'on tire ses titres de gloire de l'infamie. Voilà où mènent les bombes à retardement de «la réconciliation nationale» et de «la concorde civile», et à un moment où l'Algérie est encore dans les convulsions du terrorisme islamiste, on parle sans vergogne du retour officiel du FIS en attendant peut-être d'accueillir ses assassins comme des... héros à la veille du cinquantième anniversaire de la Libération ! Hachemi ! Tu avais raison de le dire : le pouvoir a trahi Novembre ! Après... dix années dans les geôles de Bouteflika, un des artisans de l'indépendance nationale, le Patriote Mohamed Gharbi vient d'être libéré (définitivement ?) pendant que courent en toute impunité des milliers de «repentis» ! Le pouvoir s'est drapé de la tunique vertueuse du dialogue pour laisser transparaître ses prétendues dispositions à engager des réformes, mais personne n'est dupe ! La commission de Bensalah «consulte» la classe politique pour gagner du temps. L'Algérie n'est pas près de sortir de l'abîme au fond duquel elle a été précipitée par la politique de la compromission avec l'islamisme politique et de ceux qui ont semé le chaos dans son tissu économique et social. C'est pourquoi la naissance de la CNCD dans ce contexte est une première réponse politique. Ce qui est réconfortant, c'est que ce cadre de convergence des démocrates est né dans l'action avec l'ambition de rallier tous les courants démocratiques de la société civile sur la base d'une plate-forme faisant de la rupture avec le système son principal cheval de bataille. Tous les démocrates algériens ne parlent pas encore de la même voix, mais des échanges existent pour réaliser une plus grande cohésion dans la perspective des actions à venir. Il s'agit aujourd'hui de mettre un terme à la solution chimérique du rafistolage. L'heure n'est ni aux retouches cosmétiques d'un système moribond ni à un repositionnement tactique dicté par les échéances politiques du court terme, mais à la construction d'un large front républicain, laïc et démocratique en vue d'une alternative radicale au système. Hachemi ! Le jour se lève sur de nouvelles moissons ! Notre jeunesse prend la relève des luttes. Celle du PLD aussi, comme la démonstration en a été faite lors de l'université d'été que vient d'organiser le PLD, les 2, 3 et 4 juillet 2011, pour ses étudiant(e)s. La jeunesse algérienne et celle du PLD ont compris que la libération n'est pas un changement de joug. Elle est aujourd'hui l'audace et l'espoir du pays !
Parti pour la laïcité et la démocratie (PLD) «Pour une Algérie Républicaine Moderne et Sociale»