Socothyd, une marque, un label qui, depuis 1969, accompagne la santé publique dans la prise en charge médicale du citoyen, le libérant de la dépendance des pays étrangers pour ses besoins en coton médical, pansements divers, bandes plâtrées et autres produits hygiéniques, telles les couches bébé et les serviettes périodiques. Durant 36 ans, tous ces produits nous sont parvenus d'une seule adresse : Socothyd (société de production du coton hydrophile) des Issers, dans la wilaya de Boumerdès. Située au cœur de la ville, l'usine s'étend sur plus de 85 000 m2 dont 58 400 m2 demeurant vierges permettant ainsi d'éventuelles expansions en cas de besoin, car « Socothyd s'est inscrite dès le départ dans une logique de développement ». Une logique qui ne sera pas remise en cause même lorsque le pays a frôlé la catastrophe avec la menace terroriste et le poids de la crise économique, durant les années 1990,surtout. C'est lorsque beaucoup d'entreprises étaient contraintes à la compression de leurs effectifs que Socothyd a doublé les siens. Signe révélateur de sa bonne santé. L'entreprise tourne actuellement avec 675 travailleurs dont plus de 300 ont été recrutés à titre permanent, durant les dix dernières années. Ils sont en majorité dans les ateliers des départements de coton, des compresses, de tissage et de bandes plâtrées. Les autres sont dans les magasins de stockage et dans les blocs de l'administration. Sous l'impulsion que lui a insufflé son PDG, M. Achaïbou, qui est à sa tête depuis 1984, Socothyd a investi durant les dix dernières années pas moins de six millions de dollars US, dont près de 2 millions ont été dépensés dans la mise à niveau et la réhabilitation de l'outil de production. L'entreprise, unique en son genre à l'échelle nationale et l'une des rares au niveau continental, se conforte ainsi dans sa position de partenaire incontournable de tous les établissements de santé, publics et privés, civils et militaires. A tel point qu'il n'existe pratiquement pas de foyer qui n'a pas eu à faire usage de ses produits. Durant 36 ans, tout en couvrant les besoins de la santé publique, Socothyd n'a pas cessé de songer à son développement. Ses efforts ne seront pas vains, puisqu'en 2000, elle entre avec sa certification ISO-13485 dans la cour des grands. En octobre 2004, elle obtient la certification ISO 9001/2000 grâce à la qualité de ses produits. Socothyd se targue aussi du marquage européen sur tous ses produits. Cela n'a pas été le fruit du hasard, nous déclare un cadre de l'entreprise qui nous explique qu'en plus de l'investissement dans l'élément matériel, l'entreprise a beaucoup tablé sur la valorisation de ses ressources humaines. D'où les cycles de formation qu'elle a lancés au profit de ses travailleurs allant des séminaires au sein de l'entreprise même aux regroupements à l'extérieur. « Bien lancée, notre entreprise ne peut se permettre de faux pas. D'ailleurs, suite à la certification ISO, nous avons chaque année une audit de surveillance, de contrôle », dit noter interlocuteur. Les travailleurs que nous avons rencontrés sont unanimes à dire, surtout les syndicalistes, que l'entreprise se porte bien. Cependant deux éléments nouveaux interviennent et suscitent quelques appréhensions : la concurrence (déloyale ?) et la privatisation. qualité certifiée Les clients potentiels de Socothyd sont les établissements de la santé publique. « 80% de nos marchés sont contractés avec le secteur public (civil et militaire). Mais le ministère de la Santé vient d'ordonner aux responsables de ses établissements de ne plus traiter de gré à gré et tout le monde sait que pour nos produits, qui sont d'une qualité certifiée, il n'est pas possible d'appliquer les prix des articles importés d'Asie. Les hôpitaux vont donc traiter avec les moins-disants par des produits de qualité inférieure certes, au détriment de Socothyd », nous dira un syndicaliste de l'entreprise. Le dossier de la privatisation, bien que traité « avec la plus haute prudence », fait naître lui aussi moult inquiétudes. « Le dossier se trouve depuis quelques jours au niveau du conseil de participation de l'Etat (CEP) qui devra trancher cette question », a-t-on appris d'une source proche de l'administration. Or deux professionnels seulement ont soumissionné pour l'acquisition de cette entreprise d'une valeur de deux milliards de dinars, dont le plus offrant (Fadelco) propose 80 milliards de centimes. Ce qui a semé la peur et des inquiétudes au sein des travailleurs. « Lorsque nous nous sommes proposés pour reprendre l'entreprise, on nous a dit qu'elle vaut plus d'un milliard de dinars. Mais voilà que les privés se proposent de la prendre pour 80 milliards seulement. Nous avons peur qu'on la brade. Cependant, nous n'allons pas nous laisser faire », nous diront les employés de Socothyd. Un syndicaliste estime que « l'enjeu réside dans les 10% qui reviennent aux travailleurs de l'entreprise est privatisée ». Moins chère elle est vendue, plus faible sera notre poids, proportionnellement à ce taux, a-t-il dit. Or une source proche de l'administration nous confie que le choses ne se dérouleront pas comme les travailleurs l'imaginent : « Dans tous les cas, l'intérêt des travailleurs sera préservé, puisque l'éventuel repreneur s'engage à maintenir l'usine en activité, à recruter 280 autres employés sur cinq ans tout en maintenant les 675 déjà existant à Issers et dans l'unité des produits hygiéniques de Bordj Menaïel et à investir 1 milliard de dinars en 5 ans. Ce sont là des conditions sine qua non de la privatisation », nous dit notre interlocuteur. Mais « pour l'heure rien n'est encore décidé ». Et en attendant, Socothyd continue à tourner très normalement et à « couver » un conflit syndico-syndical qui depuis juin dernier a provoqué de nombreux débrayages. Le conflit oppose en effet le conseil syndical local à l'union locale de l'UGTA de Bordj Menaïel. Tout a commencé lorsque celle-ci a décidé de « suspendre » le chargé de l'organique de la section syndicale de Socothyd, lui reprochant d'être « indiscipliné ». Les travailleurs se mobilisent derrière leur conseil syndical et réfute à l'Union locale le droit de suspendre un élément par lequel ils ont voté. Le débrayage du 6 juin 2005 force l'union locale de l'UGTA à lever la suspension le jour même. Mais suite à une « demande d'explications » de la part du conseil syndical, celle-ci revient à la charge pour suspendre de nouveau le syndicaliste « indésirable » et s'ensuivent d'autres mouvements de grève le 22 et le 25 juin. Depuis le conflit perdure et les travailleurs continuent à refuser à l'instance de la centrale syndicale de s'« ingérer » dans une « élection démocratique ». Le bras de fer continue toujours et, dernièrement, il a été décidé d'installer un comité des sages pour tenter de trouver une issue au conflit. Certains travailleurs voient dans cette « ingérence » une « façon d'immobiliser le syndicat pour parachever la privatisation ». « Faux » rétorque-t-on du côté de l'administration où l'on nous dira que « la section syndicale a été dissoute » et qu'on a « mis en place une commission chargée d'organiser les élections dans les meilleurs délais ».