La ville de Tizi Ouzou a été ébranlée, hier à l'aube, par un attentat kamikaze qui a ciblé le commissariat de la première sûreté urbaine sis au niveau du rond-point Djurdjura. Cet acte terroriste a fait 33 blessés, dont 12 policiers et 4 Chinois qui tiennent un magasin d'habillement sur la rue Lamali. L'explosion de la voiture de type Toyota Hilux a eu lieu à 3h50. Un jeune homme de 29 ans, propriétaire d'un kiosque non loin du lieu de l'attentat, a été brûlé au deuxième degré ; son local a été sérieusement touché. La population a été secouée par cet acte. D'ailleurs, quelques minutes seulement après l'explosion, des gens affluaient vers le centre-ville. «Qu'est-ce qui se passe ?» s'interrogent de nombreux citoyens rencontrés, à 4h30, près du stade du 1er Novembre, à 300 mètres du carrefour Djurdjura. Les habitants étaient toujours sous le choc. Il était difficile de leur soustraire la moindre information. Sur la rue Lamali, à proximité du portail principal du CHU Nedir Mohammed, des policiers ont mis en place un cordon de sécurité. «C'est un attentat kamikaze», nous dit un citoyen qui habite le quartier les Genêts. «J'ai entendu un souffle suivi d'un grand bruit, à l'heure du s'hour. Puis, je suis sorti et j'ai vu des gens, paniqués, qui quittaient leurs maisons pour sortir dans la rue», ajoute-t-il. Selon des témoignages recueillis sur les lieux, l'attentat s'est produit au moment où un kamikaze fonçait sur la clôture de l'enceinte du siège de la première sûreté urbaine avant d'être repoussé par des policiers ; puis il s'est fait exploser sur la chaussée. «J'habite à 200 m d'ici et le plafond de ma maison a été endommagé par l'explosion. Cela démontre la force de la déflagration», nous précise un quinquagénaire. Les débris de la voiture étaient toujours sur la chaussée alors que son moteur a été retrouvé à l'intérieur d'une pâtisserie, au rez-de-chaussée du bâtiment bleu. «On ne sait pas comment ce moteur a pu atterrir ici. Cela explique que la charge de l'explosion était vraiment forte», témoigne le propriétaire de ce magasin, dévasté par le souffle : le rideau a été endommagé et les murs fissurés. Il en est de même pour plusieurs commerces situés sur le boulevard Abane Ramdane. Une cafétéria, des bijouteries et une pharmacie ont subi le même sort. Les bureaux de nos confères Liberté, le Soir d'Algérie et l'Expression ont également enregistré des dégâts importants. Des vitres ont volé en éclats, des climatiseurs ont été arrachés par le souffle de la bombe. Des habitations ont connu des dégradations remarquables. On a constaté de visu des trous causés par des bouts de fer sur la tôle des rideaux métalliques des magasins. Des détritus jonchent le pavé. Des morceaux du corps déchiqueté du terroriste ont été retrouvés sur la chaussée. «Tous les meubles de ma maison ont été détruits et les murs fissurés. On a dû sortir rapidement pour éviter une autre catastrophe à l'intérieur, surtout avec l'électricité et le gaz», nous raconte un père de famille qui habite le bâtiment Djurdjura. Là aussi, le centre commercial a presque été réduit en ruine. Des magasins d'habillement, de parfumerie et de chaussures ont subi de sérieux dommages. Avant la levée du jour, alors que des travailleurs communaux étaient mobilisés pour le nettoyage de la chaussée, les propriétaires des commerces sis en face du commissariat ciblé constataient les dégâts. Les éléments de la Protection civile ont évacué tous les blessés vers les urgences du CHU. Sur place, à 6h, le professeur Ziri, directeur général de l'établissement, nous a donné un premier bilan qui fait état de 29 blessés. «Il n'y a pas de cas vraiment grave. Toutes les personnes admises aux services des urgences sont bien prises en charge», nous a-t-il indiqué. Le personnel du SAMU était également mobilisé pour apporter les premiers secours aux blessés. «Heureusement qu'il n'y a pas eu de mort, car l'explosion était très forte. Je l'ai entendue de ma maison qui se trouve à plus de quatre kilomètres d'ici», ajoute un agent du SAMU rappelé en urgence pour assurer son service. Deux heures plus tard, quatre autres blessés légers ont été évacués à l'hôpital. A 10h, le directeur général de la Sûreté nationale (DGSN), Abdelghani Hamel, en compagnie du wali de Tizi Ouzou, s'est rendu sur les lieux de l'attentat avant d'aller à l'hôpital pour rendre visite aux blessés. Notons qu'il n'a fait aucune déclaration sur cet acte terroriste. Nous avons remarqué aussi la présence de députés du RCD, du RND et du FLN ainsi que d'un sénateur, Mohamed Ikherbane. «C'est un lâche attentat qui est à condamner énergiquement. Cet acte veut nous rappeler que l'islamisme politique est toujours actif. Malheureusement, il a pu se régénérer après toutes les compromissions faites par le pouvoir en faveur de l'islamisme. Nous appelons la population, une nouvelle fois, à la vigilance pour déjouer tous les complots contre la Kabylie», a déclaré M. Ikherbane. De son côté, Saïd Lakhdari du FLN ajoute : «Nous condamnons fermement cet attentat barbare perpétré contre une structure de police et qui a touché même des civils. Donc nous faisons toujours confiance à l'Etat qui est en train de combattre cette bête immonde. La vigilance est toujours de mise pour déjouer ce genre d'attentat.» Le premier secrétaire fédéral du FFS, Farid Bouaziz, dira pour sa part : «On ne peut pas exprimer maintenant de réaction à chaud.» Durant l'après-midi, les habitants du bâtiment bleu et de l'immeuble Djurdjura, étaient toujours sous le choc ; ils se rappellent d'un attentat similaire qui avait ciblé, le 3 août 2008, le siège des renseignements généraux qui avait été détruit par un attentat kamikaze. En fin de journée, 18 blessés seulement étaient gardés en observation au niveau du CHU de Tizi Ouzou.