La conservation des repères mémoriels et l'épanouissement de la culture livresque ont été perpétués à travers le temps et les âges par des générations successives à la Citadelle d'El Djezaïr. Le livre a ainsi occupé une place privilégiée dans la vie quotidienne de la Cité avec un lectorat assidu, avide de savoir, de découvertes et de connaissance de l'univers culturel.Avec son environnement et ses lieux connus des lecteurs, le livre était répandu par la vente, l'achat, l'échange à La Casbah chez les bouquinistes populaires de quartiers, dans les marchés, places publiques et chez les marchands ambulants.Cinémas d'enfance : Un patrimoine dans la mémoire du souvenir. Au souvenir des vieux cinémas de La Casbah et de sa périphérie qui avaient pour noms Nedjma, Odéon, Dounyazad, El Djamal, nous revoyons encore et avec nostalgie les étals de fortune astucieusement aménagés et richement achalandés d'illustrés d'aventures, compagnons inséparables de la jeunesse de l'époque. Qui ne conserve pas en souvenir avec tendresse et émotion les images fabuleuses de Tintin, Akim, Bleck le Rock, Ivanhoé qui peuplaient nos rêves à travers les découvertes de jungles d'Amazonie et des féeriques planètes de paysages édéniques. Ce fut notre première littérature d'enfance et l'univers d'un imaginaire en quête d'évasion et de répit à une étape tragique d'oppression coloniale vécue dans la douleur et la tourmente. Ainsi s'est accompli dans l'épreuve existentielle l'éveil à l'amour du livre et des vertus émancipatrices de la lecture qui constituaient, pour la jeunesse que nous étions, une immense fenêtre ouverte sur le savoir et la connaissance dans un monde vaste à l'infini, mais en proie aux turpitudes d'un siècle agité. De ce substrat culturel d'enfance, s'est affirmé plus tard à l'adolescence un attachement ombilical pour le livre dans une avidité des découvertes du monde et de son humanité.Le livre et La Casbah : Un lien ancestral multiséculaire à travers les cycles de l'histoire. C'est à cette étape que nous avions pénétré l'univers livresque à travers des espaces qui avaient pour noms : la bibliothèque municipale du jardin Marengo (actuellement jardin de Prague), la bibliothèque des pères blancs de la rue Bencheneb où nous rencontrions fréquemment le regretté Tahar Djaout, un familier assidu des lieux et un insatiable fouineur des rayonnages de livres dont la sève créatrice de lumière a ainsi généré un immense écrivain d'une renommée et d'une notoriété universellement reconnues. Pour la genèse anthropologique et historique de lieux patrimoniaux, nous rappellerons que la première bibliothèque nationale d'Alger a été aménagée par l'administration coloniale dans l'enceinte de la Basse Casbah au palais Mustapha Pacha actuellement Musée national de l'enluminure, de la miniature et de la calligraphie rue des frères Mechri et transférée plus tard vers la fin des années 1950 aux nouvelles infrastructures actuelles du boulevard Frantz Fanon. Ce repère évocateur de culture et d'érudition témoigne encore de l'impact du vivier de connaissance qu'il fut dans un passé récent et qui avait pour fidèles adeptes des lycéens de l'époque dont les noms allaient devenir des célébrités de renommée mondiale tels le lumineux philosophe, penseur et islamologue Mohamed Arkoun et l'immense historien sociologue Mostefa Lacheref, l'auteur de l'œuvre éclairante Des Noms et des Lieux ; un titre judicieusement révélateur pour ne point oublier. Des sommités de compétences savantes, à l'image de l'éminent professeur Kheireddine M'hamsadji, frère de l'écrivain Kaddour M'hamsadji – lui-même, jeune, précocement habitué des lieux, initié en cela dans le sillage de son frère aîné – ont ainsi complété le palmarès de ce repère de ressourcement de la mémoire de l'intelligentsia algérienne. Medersa d'Alger : Un vestige pérenne de rayonnement culturel Enfin, pour illustrer la place jadis privilégiée du livre dans la vieille ville, nous évoquerons un vestige, d'une charge symbolique exceptionnelle qu'est la célèbre Medersa d'Alger. Ce lieu mythique, qui est un repère mémoriel majeur d'histoire et de savoir, pérennise toujours le souvenir de fournées de penseurs et de l'élite intellectuelle algérienne pétries en son sein. A travers les reflets de son imposante bâtisse, un joyau architectural d'époque et l'émanation de l'empreinte des éminents personnages de savoir qui s'y sont succédé, ce sanctuaire de l'univers de la connaissance nous rappelle avec force une vocation de rayonnement culturel qui fut le sien à la porte de la pluriséculaire Casbah. Que cette vocation se pérennise pour que ce vestige repère de mémoire et d'histoire redevienne le pôle de fertilisation et de diffusion de la culture algérienne à une de ses sources jadis féconde à l'entrée de la Cité antique. C'est en symbiose de ce legs culturel que la raison d'être du premier Café littéraire Casbah créé par l'association le 2 juillet 2009 constitue ainsi un espace de rassemblement et de rapprochement d'auteurs, de lecteurs, d'éditeurs et d'amis du livre pour impulser un renouement de l'action culturelle à travers la pratique de la lecture dans sa matrice originelle que fut La Casbah d'Alger. Dans cette perspective, l'édition «Thé Littéraire Ramadhan» de cet espace livresque, qui sera centré sous le thème «du rayonnement du patrimoine culturel à travers la promotion de la pratique de la lecture», rassemblera en une circonstance conviviale des auteurs et leurs lecteurs le jeudi 25 août 2011 à 22h au palais El Menzeh (face au mausolée Sidi Abderahmane – Casbah).