On le constatera de visu, les chemins menant à certains quartiers sont dans un état lamentable. « Ici, vous ne pouvez pas circuler par temps de pluie sans porter des bottes en caoutchouc. En effet, la circulation est très difficile à l'intérieur de plusieurs quartiers. » En outre, affirmeront les citoyens, l'éclairage public n'existe pas dans plusieurs endroits de la commune située tout à fait à l'extrémité dans un isolement total, atténué seulement pour la présence de gardes communaux. Dans le domaine de l'emploi ou du chômage, devrons-nous préciser, les jeunes regretteront l'absence de perspectives dans cette commune. Un citoyen interviendra pour souligner : « Une seule entreprise liée à l'activité agricole peut fixer toute la population apte à travailler. » Tous étaleront leurs difficultés à joindre les deux bouts, surtout en cette saison froide où le prix d'une bouteille de gaz butane peut atteindre 350 DA. On nous montre une bâtisse neuve, une sorte de grand hangar relevant, selon nos interlocuteurs, du secteur de la formation professionnelle, mais désespérément fermé. Peut-être sera-t-il bientôt ouvert après les engagements pris jeudi dernier à Aïn Defla par El Hadi Khaldi, ministre de la Formation et de l'Enseignement professionnels : « Cet espace conviendrait parfaitement à nos enfants dont plusieurs sont universitaires et actuellement au chômage », nous feront savoir des citoyens. Quant à cet habitant, il tiendra absolument à apporter son grain de sel en lançant : « Il est vrai que l'analphabétisme règne parmi nous, mais nous savons distinguer entre ce qui est juste et ce qui ne l'est pas. » « La salle de soins ne suffit plus... ». En matière de soins, l'imam de la mosquée, entouré de plusieurs fidèles, affirmera que cette commune a besoin d'une polyclinique, car la présence permanente d'un médecin s'avère indispensable. D'autres interviendront pour dire que la salle de soins ne suffit plus, d'autant que les produits manquent. De nouveau, l'imam interviendra pour ajouter : « Si quelqu'un tombe malade la nuit ou une femme est sur le point d'accoucher, se déplacer jusqu'à Khemis Miliana comporte des risques certains. » S'agissant du transport public, la ligne est bien desservie et à des heures régulières. Il faut souligner à ce propos que les clients sont pratiquement les mêmes. Leur destination privilégiée est Khemis Miliana où ils se rendent quotidiennement pour faire leurs emplettes, car dans leur village il n'existe pas de commerce digne de ce nom. Sur le chemin du retour, nous apercevons dans les champs des fellahs récoltant la pomme de terre de l'arrière-saison Ici, l'arboriculture n'est pas privilégiée, pourtant, diront des agriculteurs, la terre fertile peut tout donner. Dans le véhicule de transport en commun où le confort est totalement absent règne une atmosphère sereine, preuve que la route ne fait plus peur comme durant les années de terreur où ce tronçon faisait partie du triangle de la mort. De Oued Djemaâ, nous garderons également l'image de ces deux collégiennes assises devant les maisons de fortune paternelles au milieu des poules. Brillantes, l'une d'elle se destinera plus tard à la médecine, tandis que l'autre son choix est déjà fait : elle sera professeur d'histoire et de géographie. Deux vocations inspirées sans doute de la réalité de la région. Quelques heures seulement nous séparent de l'année 2006, mais de cela la population de Oued Djemaâ et les douars avoisinants ne paraissent pas s'en préoccuper outre mesure, car ici on a l'impression que le temps a une autre dimension.