Décidément, les choses ne s'améliorent guère pour la corporation médicale à Constantine, et la nouvelle année s'annonce comme s'est achevée la précédente au rythme des scandales. L'actualité ne fait pas les beaux jours, en effet, de la corporation qui suit les péripéties tristes du drame des circoncis d'El Khroub et de celui de la maternité de Sidi Mabrouk, pour ne citer que ceux-là. Même si le licenciement du directeur de l'hôpital d'El Khroub a servi de fusible pour amortir le scandale et détourner la responsabilité, il n'en demeure pas mois que cette affaire de circoncision, qui a brisé la vie de plusieurs enfants, a diabolisé le personnel médical et achevé ce qui restait d'une réputation largement entamée. L'opinion publique a du mal à se changer les idées depuis que les citoyens sont directement confrontés aux erreurs itératives et à tous les exemples qui forment le côté cour des établissements sanitaires. La société tente même de s'organiser contre cet état de choses à l'image de cette mère qui tente de former une association et jure par tous les saints de faire éclater la vérité sur le décès de sa fille qui a accouché à la maternité de Sidi Mabrouk. Ce drame survenu au mois de novembre dernier avait éclaboussé le staff médical d'un établissement déjà très mal vu, où les chats sévissent comme une menace contre les mamans et leurs bébés. Cette fois, par contre, la police et la justice se sont emparées de l'affaire et enquêtent actuellement sur les quatorze membres du staff accusé par la famille de la défunte de négligence médicale et d'erreur ayant entraîné la mort. D'éventuelles inculpations ne sont pas à écarter dans ce cas et viendront faire la une affligeantes de la presse et accélérer la descente aux enfers d'une profession privée de sa noblesse. Last but not least, l'hôpital psychiatrique de Djebel El Ouahch qui peine à recouvrer sa stabilité a été de son côté soulevé par le décès d'un malade dans des conditions douteuses, et ensuite la mutilation d'un autre interné qui a nécessité l'ouverture d'une enquête policière la semaine dernière. En l'absence d'un conseil de l'ordre, censé mettre de l'ordre et veiller au respect de l'éthique au sein de la profession, les citoyens agissent par eux-mêmes et ont recours à la justice. Un affront jadis inimaginable pour les disciples d'Hippocrate qui semblent perdre pied et reculer en matière d'organisation. Le gel du conseil national de déontologie médicale et la déconfiture qui empêche l'élection de nouvelles structures enfoncent la corporation qui en désespoir de cause voit ses animateurs à Constantine se bousculer brutalement et multiplier procès et mise au point par journaux interposés. Par ailleurs, les révélations faites par le directeur du CHU au wali mettent à nu le manque de communication entre les grosses pointures de l'hôpital et les pratiques abusives de certains professeurs. La santé publique étant ce qu'elle est depuis l'échec de la politique de planification, c'est le citoyen algérien qui paye les frais de l'improvisation et du laxisme qui gangrènent désormais nos hôpitaux. A Constantine, la profession touche le fond. Sans vouloir lui ajouter un énième procès, il est temps que l'élite prenne la peine de faire une révision mure et responsable et amorcer la réorganisation de la maison avant que cela ne soit imposé par l'extérieur.